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03 avril 2014

Re(ma)niement

Municipales

Le résultat de ces premières élections depuis la présidentielle de 2012 – laissons de côté les quelques législatives partielles – est sans appel : la gauche est en net recul. Les socialistes se prennent une sacrée déculottée. On espérait limiter les ravages d’une nationalisation du scrutin, en jouant la proximité et le bilan du socialisme municipal (à mon avis souvent honorable) : peine perdue. Personne ne s’attendait à revivre une situation comparable aux municipales de 1983: une déroute.

Autant la nécessaire oxygénation de la vie démocratique explique (voir peut justifier) le basculement de certains territoires et municipalités d’un bord à l’autre, autant c’est vraiment dommage que le travail formidable de nombreux élus locaux n’ait pas été reconnu à leur juste valeur. Je suis bien triste pour Toulouse et Narbonne, qui rebasculent à droite alors que celle-ci a dominé la vie locale 37 ans durant.

Grosse déception pour ma petite commune de 10 000 habitants où le maire UMP a gagné dès le premier tour. Maire depuis trois mandats, gérant la ville en autocrate, écrasant toute initiative d’opposition (politique ou non), enfermant la ville dans une image de « paisible village » alors qu’elle devient une ville dortoir sans dynamisme… autant de raisons qui auraient du aider au basculement.

D’autant plus que l’équipe en face était cette fois d’un meilleur niveau. Contrairement à 2008, campagne à laquelle j’avais participé (sans être sur la liste), le PS et le PC ont fait liste commune. Et l’homme à la tête de la liste, infatigable travailleur et militant expérimenté, a mené une campagne active, bien rythmée et riche en propositions. J’espérais cette fois au moins un second tour…

 

Ayrault-Valls

Il est probable que Hollande attendait l’issu des européennes, que les sondages annonçaient bien plus catastrophiques que les municipales, pour opérer un remaniement du gouvernement. Il a souvent dit qu'avec le quinquennat on ne pouvait changer de Premier ministre qu’une seule fois. L’échec électoral est tel qu’il devait agir vite. Manuel Valls succède donc à Jean-Marc Ayrault.

En 2012 le choix de Jean-Marc Ayrault m’avait paru pertinent. Au vu du score de Hollande au 2nd tour – une victoire claire et nette mais un écart mince - et ses discours d’apaisement et de rassemblement, le profil social-démocrate et austère d’Ayrault était préférable au choix de Martine Aubry par exemple. Sans compter que les deux hommes se connaissaient bien. C’est important.

Mais la grandeur des hommes se révèlent dans les épreuves. En un peu moins de deux ans d’activité, le gouvernement Ayrault n’a pas démérité. De nombreuses promesses présidentielles ont été tenues. Mais depuis l’été dernier, l’exécutif multiplie les faux pas, les atermoiements et les reculades. Ayrault a bien réussi quelques coups mais sa communication était poussive, son autorité trop contesté, son profil trop similaire à celui du Président.

En ce sens le choix de Valls me plait. Qu’on se comprenne bien : le positionnement politique de l’homme ne m’a jamais vraiment emballé. Un homme qui a pris presque quasiment le contrepied des positions de son parti pour faire parler de lui et apparaitre comme un « moderne » ou un « briseur de tabou », c’est pas plus courageux que novateur.

Mais l’homme a montré depuis fin 2011, c'est-à-dire lorsqu’il a rejoint l’équipe de Hollande à l’issue des primaires, sa loyauté, son énergie, son professionnalisme et sa combativité. On l’a beaucoup présenté comme le sosie de Sarkozy à gauche, mais je crois que c’est un faux procès. On a besoin d’un couple exécutif au tempérament différent mais complémentaire, pour créer une dynamique permanente.

La composition du gouvernement a été annoncée. Je suis content pour Montebourg, Fabius, Taubira... Je suis plus surpris pour Caseneuve, qui était bon au Budget, et Sapin qui était parvenu à faire conclure plusieurs accords entre les partenaires sociaux. Idem pour Rebsamen qui était pressenti pour l'Intérieur. A voir maintenant ce que va faire ce gouvernement (à nouveau) paritaire, resserré, et « de combat ».

 

Le Pacte de responsabilité

Depuis janvier, et sous la pression médiatique et de la conjoncture économique, François Hollande a fixé un certain nombre d’orientations (politique de compétitivité, réduction de la dépense publique, réforme fiscale) qui sonnent, pour beaucoup de gens de gauche, comme de terribles reniements. La critique est un peu rude parce que Hollande a été plutôt clair sur ces sujets durant la campagne.

Le candidat Hollande s’était clairement engagé sur le redressement des comptes publics, via l’augmentation des prélèvements et la maitrise de la dépense (qui doit être revu via la Modernisation de l’Action publique). Quant aux entreprises, il n’a jamais nié le problème de compétitivité (mais insistait sur l’aspect qualitatif ou hors coût) et n'excluait pas le principe de « TVA sociale » mais à travers la fiscalité environnementale (comme dans de nombreux pays scandinaves).

Maintenant c’est vrai aussi qu’en 2012 et 2013 le gouvernement Ayrault, dans la continuité de Fillon, a fait voter une série d’augmentation de prélèvements fiscaux et sociaux pesant sur les ménages et les entreprises. Je rappelle qu’en mai/juin 2012 il manquait plus de 7 milliards d’euros pour rester dans les clous de la loi de finances votée sous Sarkozy (c'est à dire pour ne pas creuser d'avantage le déficit voté).

Face au discours sur le "ras le bol fiscale", il faudrait toutefois rappeler que la gauche a privilégié le levier fiscal parce que c’est celui qui rapporte le plus rapidement et le plus massivement de l’argent pour combler (ou stabiliser) le trou. Jusqu’à un certain point (en 2013 le déficit s’explique plus par de moindres recettes que par le dérapage des dépenses). Le vrai sujet c’est que la gauche n’a pas engagé en début de mandat la grande réforme fiscale qu'elle avait promis…

Le problème du pacte, ce n’est pas qu’il soit un "cadeau" aux entreprises (car honnêtement augmenter les charges/ cotisations sociales n’est pas un but en soi et impacte la santé et les choix des entreprises), c’est qu’il risque d’enfermer les entreprises dans le bas de gamme et l’emploi peu ou faiblement qualifié… et encore s’il y a bien création d’emploi.

Et puis on le finance comment ce pacte ? 50 milliards d’économie sur 3 ans ? Ce n’est peut être pas insurmontable mais ça représente en France un effort jamais atteint jusqu’ici. Qui va payer ? (parce qu’il faudra bien payer). Les retraités ? Les agents publics ? Les usagers ? Les bénéficiaires d’allocations sociales diverses ? Un peu tout le monde... On peut bien sûr réformer l’Etat mais les gisements d’économie demandent du temps or on en a pas et on va au plus pressé.

Ce qui est plutôt inquiétant, et le discours de politique générale de Manuel Valls devant l'Assemblée Nationale cet après midi ne fait que le confirmer, c'est que les économies ne sont même pas engagées que le gouvernement promet des baisses d’impôts et de prélèvements d’ici 2017… Signe d'un retour d'une politique de relance par les baisses d'impôts peu concluantes sous Chirac et Sarkozy ?

(Mis à jour le 8/04/2014)