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02 février 2013

Rocard et la réforme des retraites

Michel Rocard était interviewé le 26 janvier dernier par le Journal du Dimanche. La sortie de son dernier livre – La gauche n’a plus le droit à l’erreur coécrit avec Pierre Larrouturou – crée l’occasion de reparler de la réduction du temps de travail (RTT) et de la réforme des retraites. Il faudra un jour que j’écrive une note sur la RTT. Mais sur les retraites, voilà ce qu’a dit Rocky : 

« L’amputation du pouvoir d’achat (des pensions) est imbécile, alors que le pays a besoin de davantage de consommation. La seule solution est d’allonger la durée de cotisation, d’aller peut-être jusqu’à 43 annuités. La France est le seul pays développé qui a fixé un âge de droit au départ à la retraite. La réforme Sarkozy a fait passer au forcing les 62 ans… C’est décoratif, cet âge n’est pas une limite physique, ni individuelle. (…) Il faut dire la vérité aux Français, le vrai calcul se fonde sur la durée de cotisations, pas sur un droit lié à un âge borné et inutile. En conséquence, on peut aller jusqu’à 65 ans. C’est vivement souhaitable, à tous points de vue. Il y a une mortalité forte juste après 60 ans car le travail maintient en forme. Et travailler plus longtemps résoudrait le sous-emploi des seniors. Ce serait un apport considérable. »

Mes remarques :

Le gel des pensions retraites, piste sérieusement envisagée pour rééquilibrer les caisses de retraites complémentaires, se traduit du fait de l’inflation, par une perte de pouvoir d’achat. Si le geste peut effectivement faire économiser quelques millions/milliards d’euros, c’est aussi toucher à la consommation des ménages (ici retraités) alors que l’économie fait du surplace.

La France n’est pas le seul pays développé à avoir fixé un âge de droit au départ à la retraite. Comme dans d’autres domaines, il n’y a pas là non plus de « particularité française ». En Espagne il est (était ?) fixé à 65 ans et 35 ans de cotisations. En Allemagne, l’âge légal est de 67 ans. Hélas, je ne retrouve plus le tableau comparatif que j’avais trouvé sur le sujet.

Rocard a raison sur le fait qu’avec l’allongement de la durée de cotisation, l’âge de départ à la retraite perd progressivement et complètement de sens. Pour un jeune comme moi, qui a fait des études et qui est rentré plus tard sur le marché du travail, la retraite à 60 ans est hors de portée. Il en va autrement pour ceux, en activité, qui approchent du seuil en question (60/62).

Travailler plus longtemps résoudrait le sous emploi des seniors !? La France est marqué par un taux d’emploi des seniors (plus 55 ans) assez faible (30-35%). Améliorer ce taux, comme celui des jeunes, apporterait des ressources supplémentaires au système de retraites. Mais ce n’est évidemment pas si simple.

Le relèvement progressif de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans contraint, de fait, les salariés en âge de partir, à retarder leur départ. Les statistiques ont d’ailleurs montré des départs moins nombreux suite à la réforme de 2010. Mais c’est valable pour des seniors encore en activité et en capacité à rester plus longtemps dans leurs emplois .

Le problème c’est pour ceux qui perdent leur travail au cours de la cinquantaine, et qui ont du mal à en retrouver. Dans ce cas, l’allongement de la durée de cotisation transforme des préretraités en chômeurs de longue durée ou, au vu des intentions de réformes du régime d’indemnité chômage, en bénéficiaires du RSA ou ASS,  avec in fine des pensions moindres. De quoi réduire à néant les progrès enregistrés ces dernières décennies en matière de niveau de vie des retraités (pouvoir d’achat).

Sur le taux de mortalité après 60 ans, les propos de Rocard mériterait d’être développés et précisés. Je ne sais pas d’où il sort ces chiffres/ cette tendance. Beaucoup de problématiques sont derrière tout ça : la pénibilité au travail, l’occupation de son nouveau temps-libre (loisirs, volontariat, bénévolat), la prise en charge des problèmes de santé arrivés à un âge certain (encore que je suis persuadé que ça se déclenche plus tard).

Tout ceci m’amène à parler de la réforme des retraites, mais c’est pour un nouveau billet.

10:40 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : rocard, larrouturou

Commentaires

Quelques extraits du dernier rapport du Conseil d'Orientation des Retraites (COR), consacré à l'état des lieux du système de retraite français:

"En 2011, 44,4 % des personnes âgées de 55 à 64 ans étaient actives en France métropolitaine (47,2 % pour les hommes et 41,8 % pour les femmes), plus précisément 41,5 % en emploi et 2,9 % au chômage."

"En 2011, le taux d’emploi des 55-59 ans était de 64,0 % et celui des 60-64 ans de 18,9 %."

"Fin 2011, 9,1 % des chômeurs avaient 55 ans et plus, contre 5 % en 2000, sans qu'entre temps, le taux de chômage ait davantage progressé chez les seniors que chez les plus jeunes."

"Si le taux de chômage des seniors est plus faible que la moyenne particulièrement à en sortir : 60 % des chômeurs âgés de 55 à 64 ans étaient en chômage de longue durée (c’est-à-dire depuis plus d’un an) en 2011 (contre 43 % pour les 30-49 ans)."

"Seule une personne de 55 à 64 ans sur dix s’étant déclarée au chômage en 2010 a retrouvé un emploi en 2011, contre plus de 36 % entre 30 et 49 ans."

"Au 30 septembre 2010, parmi les demandeurs d’emploi et dispensés de recherche d’emploi, âgés de 55 à 64 ans, 58 % étaient indemnisables à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), 19,3 % à l’allocation de solidarité spécifique (ASS), 8,8 % à l’allocation équivalent retraite
(AER) et 13,9 % ne percevaient aucune de ces allocations, mais pouvaient être allocataires du revenu de solidarité active (RSA) par exemple."

Conclusion provisoire: avec les réformes de retraites de 2003, 2008, 2010, le taux d'emploi des seniors a progressé. Mais reste posé le maintient et l'accès à l'emploi pour ceux qui en sont privés.

Écrit par : Pablo | 02 février 2013

Elle est bien bonne celle là. Reporter la retraite jusqu'à 65 ans pour éviter de mourir entre 60 et 65 ans!
Ah,ah,ah,ah!

Écrit par : den | 02 février 2013

La seule vraie question n'est pas abordée (et pour cause), c'est celle de la part de PIB consacrée aux retraites. C'est le seul débat qui vaille. Tout le reste n'est que blabla ... ;-))

Écrit par : Songoh Khan | 04 février 2013

http://alternatives.blog.lemonde.fr/2013/02/08/aux-etats-unis-lapres-wall-street-sera-local/

je n'ai pas tout lu, mais ce que j'ai lu en diagonale me semble intéressant ... :-))

Écrit par : Songoh Khan | 10 février 2013

Merci du lien. J'ai lu, c'est effectivement intéressant.
Ca me fait beaucoup penser aux initiatives de l'économie sociale et solidaire et à certains idées écologistes (quelques uns défendent ce modèle économique). La grosse différence, comme le dit l'article, c'est qu'aux USA, l'initiative vient d'entrepreneurs locaux alors qu'en France, ça serait plus des collectivités. Sinon la référence à wall-street est un peu un coup de com' qu'une réalité :)

Écrit par : Pablo | 12 février 2013

Je trouve qu'il est quand même sacrément gonflé de dire que le travail maintient en forme !

Je ne comprends pas non plus en quoi travailler plus longtemps résoudrait le problème de sous-emploi des seniors... quel est le lien ?

Écrit par : Laurent | 15 février 2013

On peut raisonnablement dire qu'il nous a sorti une grosse connerie :) Après je crois savoir que Rocard est un boulimique de travail, alors forcément...

Sur le sous-emploi des seniors, ses propos ne sont pas clairs. S'il parle de taux d'activité (nombre de personnes de plus de 55 ans encore en activité sur la population active occupé), c'est clair que rallonger la durée de cotisation pousse les gens à retarder leur départ, et c'est donc des cotisations supplémentaires.

Écrit par : Pablo | 17 février 2013

Donc pour lui le problème du "sous-emploi des seniors" est que l'on "n'utilise" pas assez les personnes de plus de 55 ans, et non que les personnes de plus de 55 ans qui cherchent du travail n'en trouvent pas ?
C'est à dire qu'on augmente le nombre de seniors en activité, mais ça ne réduit pas le taux de chômage des seniors.

Ou j'ai pas compris ?

Écrit par : Laurent | 23 février 2013

Pardon, j'aurais dû dire "mais ça ne réduit pas le nombre de seniors en recherche d'emploi".

Écrit par : Laurent | 23 février 2013

C'est tout à fait ça Laurent.

J'ajouterai ceci par rapport à ce sujet :

La retraite à 60 ans, qui était un engagement de François Mitterrand, a été mise en place au premier moment du tournant de la rigueur, histoire de faire passer la pilule.

Le développement des pré-retraites a servi à accompagner la restructuration de l'industrie (lorraine notamment), pour déminer les plans sociaux.

Beaucoup d'entreprises s'en sont aussi servies pour réduire leur masse salariale. Un salarié d'un certain âge (donc d'une certaine ancienneté) c'est des coûts supplémentaires aussi.

Améliorer le taux d'activité des seniors, ça doit passer par un changement de mentalités, du salarié (lui faire accepter de travailler plus longtemps) et de l'entreprise (les amener à revoir ce stéréotype du travailleur senior, moins performant).

Écrit par : Pablo | 24 février 2013

Oui mais DOIT-on augmenter le taux d'activité des seniors ?
On pourrait augmenter le taux d'activité des jeunes en faisant travailler les moins de 16 ans. Je veux dire qu'on peut aussi considérer que "c’est décoratif, cet âge n’est pas une limite physique, ni individuelle"...

Écrit par : Laurent | 18 mars 2013

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