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22 janvier 2009

Le moment Obama

 

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Mardi, après avoir prêté serment sur la bible d’Abraham Lincoln, Barack Obama est devenu officiellement le 44ème président des Etats-Unis d’Amérique. L’arrivée d’un noir - selon la terminologie américaine car chez nous on dirait simplement qu’il est métis - à la tête de la super-puissance du monde est tout un symbole au regard de l’histoire sociale américaine, marquée on le sait par la ségrégation raciale et la lutte pour les droits civiques.

Ces images de bonheur, au soir du 4 novembre 2008 où la victoire du candidat démocrate fut annoncée, de ces milliers d’américains, rassemblés dans toute leur diversité, avaient quelque chose de magiques. Les larmes du révérend Jesse Jackson, candidat malheureux aux primaires démocrates dans les années 80 et combattant infatigable pour les droits civiques, résonnent alors comme une victoire politique.

Mais l’activité symbolique, c'est-à-dire l’aptitude des hommes à produire et donner du sens à leurs actions et existences même et qui constitue un des aspects du politique, qui entoure l’élection puis l’entrée en fonction de Barack Obama, ne doit pas faire illusion. L’obamania, très rependue ces derniers temps dans les média traditionnels (mais aussi modernes, comme le net) et repris de façon presque pathétique par nombre de responsables politiques, me semble une attitude aussi puérile qu’hypocrite. Pour le dire d’une autre façon : on se ment à nous même.

 

La nouvelle administration américaine a été élue sous la bannière du changement. Oui, le départ de Georges W. Bush et de ses amis néo-cons est une très bonne nouvelle. Un soulagement même. Mais un changement d’équipe signifiera-t-il un changement d’orientations politiques ? A voir.

En matière économique, le risque de récessions est tel que la régulation publique - soit l’intervention de l’Etat dans l’économie - redevient légitime. Mais l’Etat américain ne s’est jamais privé d’intervenir dans l’économie pour défendre ses industries, et Georges W. Bush a déjà amorcé, à la fin de son mandat, un retour vers l’Etat mais selon la logique de « socialisation des pertes en attendant de re-privatiser les profits ».

 

Obama s’est engagé à réinvestir dans les infrastructures publiques, dégradées après trente ans d’Etat minimaliste, et dans le secteur automobile et énergétique. Mais s’il souhaite revenir sur les baisses d’impôts des hauts revenus accordées sous l’ère Bush, il vient d’annoncer des baisses d’impôts sur les classes moyennes pour relancer la consommation. Du côté du secteur bancaire et financier, nul ne sait encore très bien ce que compte faire la nouvelle administration : nationalisation temporaire des banques, refonte profonde du système, avec pourquoi pas une coordination au niveau des gouvernements (G20). Il reste qu’Obama est entouré de conseillers économiques aux positionnements différents. Lesquels écoutera-t-il ?

 

 

En matière sociale, comme l’a montré Thomas Piketty, le niveau des inégalités outre-Atlantique est revenu en trente ans à ce qu’il était au début du siècle dernier. Près de 40 millions d’américains sont sans couverture maladie (et dans la mesure où l’assurance sociale est au niveau de l’entreprise et qu’avec la crise, les licenciements se multiplient, on peut craindre le pire). Avec la crise de l’immobilier, des milliers d’américains se retrouvent à la rue. De même l’investissement en éducation est quand même à revoir. La question des syndicats est aussi posée. Enfin les inégalités sociales et de chances entre les populations blanches et noires ne doivent pas être occultées par les discours sur la diversité et le vivre-ensemble inter-ethniques.

Barack Obama s’est engagé à étendre le système d’assurance sociale. Nul ne sait vraiment s’il s’agira d’instaurer une sécurité sociale universelle (inspiré du modèle français) comme avait voulu le faire Hilary Clinton en 1993 ou bien d’une simple mesure visant à encourager la prise d’une police d’assurance. Le fait est que les lobbying des compagnies d'assurances sont très puissantes à Washington.

 

En matière de politique étrangère, la ligne américaine restera la même : la défense des intérêts américains.  Mais des variantes sont attendues. Sera-t-il plus ferme sur la question du Proche Orient ? Les Démocrates, comme les Républicains, restent proches de l’Etat hébreux. Sera-t-il moins va-t-en guerre que son prédécesseur ? Les Etats-Unis sont la seule puissance militaire capable de se battre sur deux fronts, mais le bourbier irakien et le gouffre financier qu’il représente laisse à penser qu’ils n’ont plus les moyens financiers d’entreprendre une autre guerre. Par ailleurs il ne faut pas oublier que le désengagement militaire en Irak impliquera un renfort en Afghanistan, où les forces internationales – dont française – agissant sous le mandat de l’ONU, sont appelés à être renforcées.

L’hyper-puissance américaine devrait donc utiliser le soft-power (diplomatie, dialogue, politiques d’influences) plutôt que le hard-power (action militaire, menaces). Est-ce à dire qu'il s'agit là de la fin de l'aventure néo-conservatrice des 8 dernières années ? Là où la doctrine réaliste met la défense des intérêts nationaux et l'équilibre des puissances au coeur de la politique étrangère des Etats, la doctrine néo-conservatrice met l'idéologie libérale (politiquement et économiquement s'entend) au service d'une politique internationale active, voire agressive. Et historiquement, jusqu'au années Reagan et Bush fils, ce sont plutôt les Démocrates qui ont activer la politique étrangère américaine (avec ce que cela a apporté en bien et en mal).

Le "moment Obama" annoncera-t-il une sorte de rupture dans la doctrine économique et sociale dominante comme l'a été le New Deal de Roosevelt à son époque ou bien sera-t-il simplement un repli stratégique de la puissante Amérique, le temps de relancer la machine économique et redorer la puissance ?

22:52 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : média, capitalisme

Commentaires

Tu soulèves de bonnes questions Pablo ... ;-) (non, non, je fais pas mon prof, là :-))

Une inflexion, certes, est à attendre, mais certainement pas une révolution, et en tout cas pas de quoi rêver pour moi, ni faire que je me rende à nouveau dans ce pays ne serait-ce que comme touriste.

Il demeure dans ma liste personnelle de pays à boycotter pour raisons de principe. :-))

Écrit par : Quidam LAMBDA | 23 janvier 2009

J'avoue que j'aimerai visiter au moins une fois aux Etats-Unis dans ma vie.

Tu y as déjà été, Quidam, il me semble ?

Écrit par : Pablo | 24 janvier 2009

La question ne s'est pas posée, mais si une de mes filles avait voulu y aller, je crois que j'aurais cherché à la dissuader. Pour moi c'est un pays de double insécurité, insécurité physique avec une violence omniprésente, y compris au niveau des forces de l'ordre, et insécurité juridique, on est attaqué pour un oui, pour un non la-bas, mais surtout avec un risque financier autre que ce qu'on peut subir au civil chez nous.

Mais je comprends que tu soit tenté ... ;-)

Oui j'y suis allé quand j'avais ton age ... J'y ai même travailler un peu en job d'été. Ça avait été ma première confrontation avec l'exploitation patronale dans toute sa splendeur. Rien à voir avec le "rêve américain". Mais parallèlement j'y ai rencontré des américains vraiment supers ... :-)

Écrit par : Quidam LAMBDA | 24 janvier 2009

Mon arrière grand père y a vécu 15 ans, est revenu pour la guerre 14-18, une semaine après il mourrait à Verdun
Mon grand père y a vécu 13 ans est revenu pour la guerre 39-45, 3 jours plus tard il était prisonnier
Non nous n'irons pas aux USA, selon l'adage jamais deux sans trois ça me parait risqué :o)))
Sur les vieilles photos beaucoup de familles italiennes et ma grand mère en a rapporté une version personnalisée de la sauce bolognaise :-p
Revenir au fin fond de la Bretagne fût pour elle un drame..mais ses souvenirs ne me faisaient pas rêver avec toute cette tristesse. Je ne ressens rien pour ce continent peut être parce son âme est en réserve loll Sioux Cheyennes Comanches Nez Percés Navajos Apaches Iroquois et j'en oublie

Écrit par : Catherine | 26 janvier 2009

Quidam,

Je suis d'accord sur la double insécurité, du moins c'est en partie comme ça que je me représente la société américaine, mais pour un séjour touristique, ça ne doit pas être aussi terrible j'imagine !?

Cath,

Nous parles-tu de "grand mère Ouenja" dont tu as donné une ou deux recettes sur le blog du PR ? Va falloir nous donner la recette de cette sauce bolognaise maintenant :p ;-)

Écrit par : Pablo | 26 janvier 2009

Ho Pablo si tu restes dans un 4X4 blindé tu ne devrais pas avoir de problèmes lolll
pour la bolognaise... secret de famille, il faut que je la retrouve :-p
mamie Ouenja c'est la grand mère de Minimiel qui lui cuisine des fars ;-)
là il s'agissait de ma grand mère à me, Louise

Écrit par : Catherine | 26 janvier 2009

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