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12 décembre 2012

Hollande : comparaison n’est pas raison.

Les média et politiques français adorent faire des comparaisons entre la France et ses partenaires étrangers, européens en particuliers. Et ce pseudo exercice de brainstorming se conclue généralement par une apologie d’un modèle extérieur, qui change au fil des années (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Espagne, Allemagne) et qu’il conviendrait de copier en intégralité, et par contrecoup, par une auto-flagellation nationale.

Depuis son élection à la présidence de la République en mai dernier, François Hollande est quotidiennement comparé à des chefs d’Etat ou de gouvernement de sensibilité progressiste, socialiste ou social-démocrate, exerçant le pouvoir ou l’ayant exercé de nombreuses années. Ceux qui osent ce parallèle appellent le chef de l’Etat à suivre tel modèle et à fuir celui-ci, sous peine de laisser le pays s’enfoncer un peu plus dans le déclin : « moi ou le chaos » en somme.

Mélenchon l’a comparé à Papandréou, l’ancien premier ministre grec, pour lui reprocher de capituler face à l’ « Europe austéritaire ». Larrouturou et son collectif Roosevelt 2012 appelle à s’inspirer du père du New Deal pour sortir de la crise. Fressoz, journaliste au Monde, le met en garde contre le syndrome Zapatero qui a privilégié les réformes sociétales aux réformes économiques. Avant l’annonce du pacte de compétitivité, Schröder était l’exemple à suivre. Maintenant c’est Bill Clinton ou Mario Monti.

Evidemment les critiques adressées au nouvel exécutif ne sont pas sans fondements. Oui, Hollande aurait du aller plus loin dans le bras de fer avec Merkel, même s’il a obtenu des avancées sur la croissance et la taxe tobin. Oui, il est urgent de réformer le système bancaire et financier. Oui, la France souffre d’un problème de compétitivité mais Hollande a toujours dit qu’il fallait centrer nos efforts sur la qualité, la recherche, l’innovation. Oui, les réformes sociétales (mariage pour tous, vote des étrangers en situation régulière aux municipales) sont loin d’être prioritaires alors que l’économie stagne voir recule.

Mais quand on regarde à l’étranger, autant le faire le plus objectivement possible.

- On passe souvent sous silence que Clinton a relevé le salaire minimum et le niveau d’imposition durant son premier mandat, comme le fait que c’est sous sa présidence (mais majorité républicaine) qu’a été abrogé le Glass-Steagal Act (qui encadrait les activités bancaires). Enfin ses mandats coïncident avec la reprise économique liée aux NTIC.

- Plombée par les années Berlusconi, l’Italie avait grandement besoin d’un homme sérieux à sa tête. Européen convaincu, économiste et ancien commissaire européen à la concurrence, Mario Monti a donné un gage de sérieux et de crédibilité auprès des marchés. Mais il a gouverné sans aucune légitimité politique, avec une majorité parlementaire bricolée et donc fragile. Malgré un rythme de réformes très soutenues, l’Italie s’enfonce dans la récession et les primes de risques sur sa dette ont jouées au yoyo tout au long de l’année.

- Zapatero s’est beaucoup illustré sur les réformes de sociétés : mariage homosexuel, droit à l’adoption pour les couples homosexuels, la parité, la lutte contre les violences conjugales, loi sur la mémoire historique, réforme de l’avortement etc. La plus part de ces réformes ont été menées au moment où l’économie espagnole marchait à plein régime. Le bilan économique de son premier mandat est plutôt honorable.

- Le dynamisme allemand tient plus de son réseaux de PME (plus nombreuses et plus exportatrices qu’en France), de son positionnement vers le haut de gamme, qu’à une modération salariale, certes bien réelle, mais d’une portée limitée face aux pays émergents. Derrière le « miracle » allemand, se cache des réalités sociales très difficiles : quatre millions de personnes gagnent moins de 7 € bruts de l’heure, 11 % des travailleurs avec des CDI sont des travailleurs pauvres, 761 000 seniors complètent aujourd’hui leur pension avec un mini-job etc.

Il revient à Hollande et à notre pays de créer son propre modèle, son propre succès. S’inspirer sur certains points de nos voisins, c’est une chose, nous vendre des mirages pour engraisser les mêmes, ça va un moment. L’efficacité de la méthode Hollande, négociation sociale/ rapports d’études/ commissions, très sociale-démocrate, se vérifiera à l’usure. La difficulté tient en ce qu’elle exige du temps alors que les attentes et les difficultés sont elles très urgentes et présentes.

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