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19 août 2011

Primaire socialiste 2012 (4)

De la légitimité d’une candidature

Avant d’aborder plus amplement les questions de fond et le positionnement politique des six candidats à la primaire des socialistes et radicaux de gauche, il m’a semblé opportun de faire le point sur la légitimité des candidats. Il ne s’agit pas de juger la pertinence et l’intérêt de chaque candidature au regard des enjeux politiques mais d’analyser plutôt la manière dont chacun cherche à légitimer sa candidature.

La première des légitimités en politique reste l’élection. C’est parce qu’on est investie du suffrage universel qu’on est autorisé, pour une période donnée, à parler au nom du collectif et à prendre une décision au nom de celui-ci. Mais on compte aussi l’expérience de responsabilités publiques, l’expertise (savoirs-savants), l’opinion publique (les sondages), le soutiens de personnalités politiques ou de la société civile etc.

Ségolène Royal met en avant son expérience à la tête de la Région de Poitou-Charentes, jouant ainsi la carte de la proximité et de l’innovation de terrain. Alors qu’elle jouissait en 2006 d’une grande légitimité médiatique, elle accuse aujourd’hui un sérieux retard dans les intentions de vote. Sa position à l’égard des média a d’ailleurs profondément changé. Comme pour compenser et se démarquer, elle revendique son expérience de candidate à la présidentielle en 2007.

Plus intéressant encore, ayant été largement attaquée par le passé sur ses compétences et son aptitude à occuper la fonction présidentielle, Royal a multiplié les voyages internationaux (histoire d’acquérir une stature internationale) et les discussions avec de nombreux experts (économistes, sociologues etc) et aime à le faire savoir. Ce faisant on dirait qu’elle délaisse l’expertise citoyenne qu’elle avait tant mise en avant en 2006 et 2007.

Depuis l’éviction de DSK, François Hollande est le nouveau favori des sondages. Ce soutien médiatique est une force dans la course à l’investiture, mais l’histoire a montré que ce n’était pas toujours suffisant. N’ayant jamais exercé de responsabilités ministérielles, il rappelle sa proximité à Jospin lorsque ce dernier était à Matignon. Mais il aime aussi jouer sur son absence d’expérience pour mieux apparaitre comme un homme neuf.

Pour mieux se démarquer de l’actuelle Première secrétaire et répondre à l’accusation d’un PS gauchisé et dépensier, Hollande se présente comme l’homme de la rigueur. Il a mis en avant son bagage intellectuel (HEC, ENA) et son réseau d’experts pour donner du poids à ses idées sur la fiscalité. Il se rêve comme l’héritier de Delors. Et la boutade corrézienne de Chirac le présente comme un républicain ouvert, capable de rassembler au-delà de son camp.

Bien qu’elle ait laissée les rênes du PS à Harlem Désir le temps de la primaire, Martine Aubry joue clairement la carte de la légitimité du parti. C’est moins le statut de Première secrétaire qu’elle met en avant que son bilan à la tête du PS : rassemblement des socialistes après la débâcle des européennes, rénovation du parti, relation avec les experts et intellectuels, travail sur des propositions.

Elle m’apparait comme celle qui revendique et assume le plus le projet des socialistes, voté en mai dernier. Sa stature internationale, elle l’a forgée en rencontrant d’autres chefs de partis en Europe (SPD, Parti Démocrate), et en signant avec eux des engagements communs pour l’avenir. Son équipe de campagne a fait le plus de place aux personnalités de la société civile (intellectuels, gens de la culture ou du mouvement social). Elle jouie aussi d’une longue expérience ministérielle et d’élue de terrain.

Du côté des « petits » candidats, Baylet a pour lui ses expériences ministérielles et d’élu local (Conseil général) mais c’est bien son statut de Président du PRG qui justifie sa candidature. Manuel Valls a lui le soutien de nombreux élus locaux et met en avant le fait qu’il soit lui-même maire d’une commune populaire. Il joue la carte de la nouvelle génération et de sa non-participation aux gouvernements Jospin pour apparaitre comme nouveau.

Montebourg joue la carte de la rénovation du PS (primaires, règle du mandat unique), dont il revendique la paternité, et du profil différent (c’est un avocat, plutôt jeune) et des propositions spécifiques (démondialisation, VIème République, capitalisme coopératif) qu’il défend. Il a reçu le soutien, tantôt public, tantôt à demi-mot, de responsables politiques de la gauche (Tobira, Mélenchon, Chevènement, chez les Verts).

Note 1 : Moscovici, candidat ?

Note 2 : Le PRG participera à la primaire socialiste

Note 3 : A propos des listes de soutiens

14 juillet 2011

Primaire socialiste 2012 (3)

De l’importance des listes de soutiens.

La phase des déclarations de candidatures s’est achevée hier à minuit. A moins d’un retour rapide de DSK, blanchi des accusations portées contre lui, ou d’une participation d’une autre formation politique (le MRC via Chevènement), non soumis au calendrier socialiste, la primaire comptera bel et bien six candidats.

Si l’on met de côté le cas de Jean-Michel Baylet, tous les candidats socialistes à la primaire appuient leurs candidatures sur le soutien de très nombreux élus. Aubry et Hollande affichent les plus importantes listes de soutiens, quand Montebourg, Royal et Valls plafonnent et cherchent à compenser par le recrutement de « volontaires ».

Alors que la primaire est ouverte à tous les français, ce sont les sympathisants de gauche qui choisiront le candidat en octobre prochain, la course au soutien d’élus détonne quelque peu. On se croirait dans la préparation d’un congrès. Pourtant, après réflexions, j’analyse quelques raisons justifiant la constitution de telles listes.

Tout d’abord, pour être candidat (socialiste) à la primaire, un certain nombre de parrainages sont requis. Mais comme pour la présidentielle, en avoir bien plus que le minimum requis n’est pas interdit (de mémoire, en 2007 Royal affichait 11 000 parrainages alors que seuls 500 suffisent). De telles listes sont donc très utiles pendant la phase des déclarations des candidatures.

Ensuite, une liste de soutiens assez importante montre qu’une dynamique collective s’est crée autour du candidat. Un bon candidat, c’est quelqu’un qui fédère autour de lui, en particulier des gens de sensibilité et d’horizons différents, que ces soutiens soient par intérêt ou par conviction. Un manque de soutiens peut décourager certaines candidatures (Moscovici par exemple).

Enfin, de nombreux militants socialistes choisiront leur candidat en fonction de ses soutiens, non qu’une consigne leur soit donné en ce sens mais parce que beaucoup sont à l’écoute de leurs élus (locaux, nationaux). Or les militants constituent la fourchette basse du corps électoral de la primaire, et restent les meilleurs relais des candidats (via le tractage, le porte à porte, les affiches, la présence sur les marchés etc).

L’inconnu de ces primaires reste la participation électorale des français de gauche. La mobilisation des militants et volontaires auprès de ces derniers sera déterminante. Mais c’est par leur style, l’approche politique, leur choix des thèmes et des priorités que les six candidats se démarqueront les uns des autres. Un messager est une condition nécessaire, mais avoir un message est encore plus déterminant.

Note 1 : Moscovici, candidat ?

Note 2 : Le PRG participera à la primaire socialiste

28 juin 2011

Primaire socialiste 2012 (1)

Pierre Moscovici réflechie à une possible candidature.

J’inaugure par ce billet, une nouvelle série de notes consacrée cette fois à la primaire socialiste. Celle-ci, ouverte à tous les sympathisants de gauche, est prévue le 9 et 16 octobre prochain. D’ici le vote, je vous ferais part, plus ou moins régulièrement, de mes observations et réflexions sur la campagne des candidats, et in fine, de celui ou celle que je choisirai de soutenir.

Précisons, pour ceux qui débarqueraient, que j’ai été un adversaire des primaires comme mode de désignation, pour un parti donné, de son candidat à l’élection présidentielle. Je m’en suis expliqué dans cette note. Je redoute toujours autant les conséquences de ce mode de désignation sur la vie interne des partis comme sur la politique en général. Mais les militants ont tranché.

Jusqu’au mois de mai dernier, j’avais un candidat de cœur et de raison : Dominique Strauss-Kahn. J’ai rejoint le PS par sympathie pour ses idées, que j’ai découvert via son blog, au contact de militants et sympathisants socialistes très proches de ces dernières. Au-delà de la pensée social-démocrate qu’il incarnait au PS, c’était l’homme que j’appréciais, ses analyses, son intelligence, son libéralisme politique et culturel.

Son éviction, dans les circonstances que l’on sait, me peine beaucoup. Il était en train de composer son équipe pour la primaire et la présidentielle et plancher avec celle-ci un projet complémentaire à celui du PS, inspiré d’expériences à l’étranger. Lié avec Aubry, Fabius et bien d’autres, sa candidature semblait ouvrir la voie à un rassemblement large (certes pas unanime) des socialistes. Ce n’est pas en soi un objectif mais dans une campagne présidentielle, la cohésion est primordiale.

DSK empêché, la donne politique au PS s’en trouve changé, plus ouverte aussi. Aujourd’hui, 28 juin, marque l’ouverture officielle des candidatures à la primaire. Martine Aubry a fait acte de candidature, précédée plus ou moins récemment par François Hollande, Arnaud Montebourg, Manuel Valls et Ségolène Royal. On aura mi juillet la liste définitive des candidats, après vérification faite du nombre de parrainage requis.

Pierre Moscovici pourrait être le sixième candidat. Il devrait décider, avec son équipe Besoin de Gauche, de sa (non)-candidature jeudi ou vendredi. Il laisse planer le doute sur ses intentions, regrettant l’absence d’une candidature authentiquement « réformiste, social-démocrate et européenne », qualités qu’il trouve ni chez François Hollande, ni chez Martine Aubry, les « deux favoris » de la primaire.

A mon sens le PS est aujourd'hui très majoritairement de tendance réformiste et social-démocrate, sur le plan de la pratique gouvernementale et sur le plan des idées. Si l'on regarde les motions de Reims, sur le plan des idées, les motions A (Delanoé, Hollande, Moscovici), D (Aubry, Fabius, Cambadélis), E (Royal, Peillon, Collomb) s'inscrivent grosso modo dans cette mouvance.

Ceci ne signifie pas dire qu'il n'y a pas de différences entre ces motions et les personnes qui les portaient alors. La trajectoire politique (constance ou pas), la pratique gouvernementales (plus ou moins dirigiste ou pas) et certaines propositions, parfois insolites, suffisent à distinguer ces personnalités et à les juger à l’aune du référentiel soc-dem.

A la différence d'autres courants, le courant Socialisme et Démocratie puis Besoin de Gauche (mais en bien moins performant) revendique cette culture social-démocrate (d’inspiration anglo-saxonne ET scandinave) et a su structuré la pensée soc-dem au sein du PS. Aujourd’hui, la spécificité de Besoin de Gauche (les amis de Moscovici) me semble être l’Europe, et franchement au PS où le sujet a du mal à passer, ce n’est pas rien.

L'aile-gauche, l'autre tendance que j'appelle social-républicaine et qu'incarnait à merveille Jean-Luc Mélenchon, pèse à peine 20%. Et malgré quelques postes à forte visibilité, cette tendance est divisée (Hamon, Emmanuelli, Montebourg, Filoche) et sans « doctrine » structurée, incapable de s’imposer ou de peser durablement sur la ligne majoritaire du PS.

Alors en dépit de toute la sympathie que j’ai pour Pierre Moscovici - j’aime son sérieux, son ton posé, sa nuance - je ne le vois pas aujourd’hui porter autre chose qu’une candidature de témoignage. Sur le fond, hormis peut être la question européenne, je ne vois pas comment il pourra se distinguer de François Hollande et de Martine Aubry, aux yeux des sympathisants de gauche susceptibles de voter à la primaire citoyenne.

Sur la forme, Moscovici n’est pas actuellement organisé pour mener une campagne de primaire. Son réseau d’élus est plutôt réduit (aurait-il les parrainages nécessaires) et son courant semble peu structuré et mal animé. Ses partisans sont peut être concentrés sur quelques zones géographiques, affaiblissant par là les moyens de relayer ses idées et sa candidature.

Par rapport à d’autres candidats - Aubry et Hollande pour le soutien des élus, Montebourg et Royal pour le soutien des « volontaires de terrain » - les lacunes de Pierre Moscovici sont importantes. Et si une campagne électorale, fut-elle « interne », est affaire de rythme et d’interactions, je vois mal comment il pourrait rattraper son retard. Je crois en réalité que les tergiversations de Pierre masquent son prochain ralliement à François Hollande.