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27 mai 2012

Une nouvelle présidence

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Le 6 Mai.

Quelques jours avant le vote du second tour, je disais à des amis que le score des deux finalistes serait plus serré qu’on ne le pense. Puis, à la vue des derniers sondages et des premières estimations publiés à l’étranger le jour J en fin d’après midi, je m’étais mis à espérer une victoire plus nette de François Hollande. Le résultat est net mais on voit bien que la France reste un pays ancré à droite.

J’ai passé une partie de la journée au bureau de vote. Une fois le résultat annoncé au 20h, mon secrétaire de section a invité quelques camarades à venir boire le champagne chez lui. J’ai lu beaucoup de joie et de soulagement sur les visages ce soir là. Beaucoup de mes camarades avaient en mémoire le soir du 10 Mai 1981 et désespéraient de ne pas revivre cela.

L’investiture.

Grand rituel républicain que la passation des pouvoirs entre le président sortant et le nouvel élu. Ce dernier est décoré Grand Maitre de la Légion d’Honneur, puis « adoubé » par le Président du Conseil Constitutionnel, garant du bon déroulement de l’élection présidentielle, qui rappelle les résultats définitifs du scrutin et les obligations constitutionnelles du nouveau président.

Le nouveau président fait son premier discours devant un parterre de parlementaires, de droite et de gauche, accompagné par les présidents des deux chambres du Parlement. Vingt et un coups de canon, jadis annonçant la mort du Roi, symbolise l’entrée en fonction du nouvel élu, 7ème président sous la Vème République et 24ème président toute République confondue.

Le choix du Premier Ministre.

Le choix du Premier Ministre dépend souvent du contexte politique dans lequel s’inscrit l’élection présidentielle, parfois de la nature des relations entre le Président et celui qu’il veut nommer à Matignon. Giscard avait nommé Chirac pour le remercier de son soutien en 1974, Mitterrand avait nommé Rocard en 1988 parce qu’il représentait le mieux l’ouverture etc.

Jean-Marc Ayrault, Martine Aubry, Manuel Valls ou Pierre Moscovici étaient pressentis pour occuper le poste de Premier Ministre. Au regard du message de rassemblement porté par Hollande durant la campagne et du score plutôt resserré du second tour, le choix d’Ayrault était sans doute le meilleur. Aubry est trop clivante, Moscovici trop techno et Valls trop « bleu ».

Le gouvernement Ayrault 1.

Le lendemain de sa nomination, Jean-Marc Ayrault a présenté la composition de son premier gouvernement qui sera en fonction jusqu’aux élections législatives au moins, puisqu’il est de coutume que le Premier Ministre présente sa démission au Président après le renouvellement de la chambre basse du Parlement.

Conformément aux engagements du candidat Hollande, le gouvernement Ayrault est paritaire (une première en France), représentatif de la diversité (« les minorités visibles »), avec des jeunes et des moins jeunes, et un équilibre subtil entre des gens « expérimentés » (Moscovici, Sapin, Fabius etc.) et le nécessaire renouvellement des têtes.

Comme promis la rémunération des ministres et du Président a été réduite de 30% et chaque ministre doit signer et s’engager à respecter une Charte de déontologie, visant à écarter les conflits d’intérêts. On pourra regretter un gouvernement un peu « pléthorique » avec des Ministres délégués qui auraient pu être de simples Secrétaires d’Etat et des répartitions de compétences et dénominations ministérielles un peu surprenante (redressement productif, la réussite éducative etc.)

L’Europe.

Habituellement, les commentateurs politiques (éditorialistes, journalistes, experts) regrettent de voir les questions européennes et internationales si peu présentes dans la campagne présidentielle. Sans être au cœur du débat présidentiel, l’Europe a cette fois ci été citée par les principaux candidats et en particulier par le nouveau Chef de l’Etat.

Le soir même de son investiture, François Hollande a fait son premier déplacement officiel à l’étranger en Allemagne, afin d’y rencontrer Angela Merkel qui avait refusé de le recevoir durant la campagne. Les deux s’opposant sur le nouveau pacte de stabilité et sur la politique de croissance à mener en Europe, le bras de fer européen ne fait que commencer.

Quand Hollande demandait en janvier une renégociation du pacte de stabilité afin de le compléter par des mesures de croissance (euro-obligations, projets-obligation, fonds structurels, augmenter la capacité de la Banque Européenne d’Investissement), Sarkozy et quelques chefs de gouvernement s’étaient foutu de sa gueule.

Quatre mois après, l’Angleterre et l’Italie s’enfoncent dans la récession malgré (ou en raison) des politiques d’austérité, l’Espagne voit ses taux d’intérêts augmenter et son système bancaire fragilisé menace de la faire tomber, et la Grèce est dans l’impasse politique depuis les dernières élections.

Chacun comprends que sans retour de la croissance, et malgré des plans de rigueur, la réduction de la dette et des déficits publics n’est pas possible. Même si tous ne sont pas sur la même ligne quant à la politique de croissance à mener, les positions des gouvernements européens tendent à converger.

De manière un peu paradoxale, François Hollande est aujourd’hui en situation de faire bouger les lignes européennes, jusqu’ici dominées par les positions allemandes. On peut d’ors et déjà écarter le scénario d’une « Europe à la française », institutions européennes obligent, mais de cette bataille dépendra la mise en œuvre et le succès du projet de François Hollande en France.

09 mars 2012

Sarko ou le complexe de Zorro

Il s’agit d’un livre d’entretien entre l’ancien Ministre de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche du gouvernement Jospin, et le journaliste Dominique de Montvalon. Pour Claude Allègre, dans un contexte de crise internationale historique, l’élection présidentielle à venir se résume à la question suivante : « à qui confier le navire France par si gros temps ? ».

Et pour lui, c’est Sarkozy. Pour expliquer ce choix, il va faire le bilan du quinquennat. Il le félicite entre autre pour sa gestion de la crise en Ossétie, de la crise des subprimes, pour sa présidence de l’UE, pour les nombreuses réformes entreprises en politique intérieur (RSA, l’université, les retraites, les collectivités, la Constitution, la carte judiciaire…).

Il se montre plus critique sur l’ouverture (Kouchner inadapté aux Affaires étrangère), sur le Grenelle de l’environnement (parasité par le courant écologique qu’il exècre), sur la dérive droitière de la majorité (discours sur les immigrés) ou sur la portée de certaines réformes (il souhaite aller plus loin sur l’université et les retraites).

Il relativise l’épisode du Fouquet’s, le voyage chez Bush, la candidature du fils à l’EPAD etc. en essayant d’expliquer les évènements. Il revient sur le bilan de Jospin dont il critique les 35h mais salue les emplois jeunes, la réforme de la recherche ou de la justice. Il explique sa récente mission des Assises européennes de la recherche.

Par rapport au PS, il regrette que DSK ne soit pas candidat, aime bien Martine Aubry qui a un vrai bilan ministériel et municipal, éprouve une sympathie pour Montebourg qui apporte au débat d’idées. Vis-à-vis d’Hollande, il balaye les critiques faites par la droite, mais le juge incapable de présider au vue de son bilan à la tête du PS.

Je suis assez réservé sur l’ensemble de l’entretien. Alors qu’il n’a été ni acteur, ni témoin de certains évènements, sauf à avoir fait partie du premier cercle sarkozyste, il revient sur ceux-ci pour en expliquer le déroulement et exonérer Sarkozy. C’est une posture bien moins crédible que son témoignage de l’époque Jospin.

On ne pourra pas nier que Sarkozy a entrepris un nombre important de réformes. Mais que ce soit sur la Constitution, la carte territoriale ou les retraites, Allègre manque d’« objectivité » et de recul. Saluer les réformes sur le seul principe qu’elles ont eu lieux, c’est quand même très court. Ca ne fait pas un projet de société.

23 octobre 2011

Ses idées forces seront peut être ses faiblesses

François Hollande a été choisi à l’issu du second tour des primaires citoyennes pour porter la candidature des socialistes et des radicaux au printemps prochain. Bien que je lui ai préféré Martine Aubry au cours des deux votations, j’avoue ne pas être mécontent au final de le voir investi candidat.

Même si je ne partage pas toutes ses positions, il a joué intelligemment en sachant prendre de la hauteur par rapport aux critiques de ses concurrents et de la majorité, mais aussi dans le choix de ses thèmes de campagne : une réforme fiscale juste, un contrat de génération pour la jeunesse, le redressement des comptes publics.

Face à l’agité du bocal qui squatte l’Elysée depuis mai 2007 sans jamais avoir su faire « président », Hollande apparait comme quelqu’un d’apaisant et de rassembleur. Une sorte de « force tranquille ». Ce qui apparaissait comme des faiblesses hier sont paradoxalement devenus aujourd’hui ses atouts.

Mais en ces temps d’incertitudes économiques, sociales et géopolitiques, François Hollande, comme tous les prétendants à la magistrature suprême, a tout à prouver. Et la tache n’est pas facile parce que la donne peut changer à tout instant, en pire hélas, rendant caduques toutes les propositions avancées, aussi fondées soient elles.

Et c’est là que ses idées forces, pour la campagne comme pour la gestion future du pays, peuvent devenir ses faiblesses. Je ne reviendrai pas sur le redressement des comptes publics absolument nécessaire mais pas au prix d’une récession généralisée. Je veux surtout parler de la réforme fiscale et du contrat de génération.

La réforme fiscale telle que voulue par François Hollande a un triple objectif : relance économique, justice sociale et redressement des comptes publics. Mais au-delà des quelques arbitrages politico-techniques, que je n’aborderai pas ici, le problème sera dans le timing de sa mise en œuvre.

Si la gauche gagne en mai 2012, elle devra assumer la loi de finances (LF) votée par la majorité actuelle, quand bien même elle procèdera à une LF rectificative. Et je ne crois pas qu’entre juin et décembre, l’Administration et le futur gouvernement aient le temps de préparer les textes pour le vote de la LF 2013. Ca renvoi donc à 2014…

Le contrat de génération permet de relier la problématique de l’emploi des seniors à celle des jeunes, dans un contexte d’allongement progressif de la durée de cotisation pour les uns et de difficile insertion professionnelle pour les autres. C’est intéressant pour réduire la fracture générationnelle et assurer entre salariés la transmission des savoirs et compétences.

L’employeur aurait un double engagement pendant cinq ans : garder un senior déjà présent dans l’entreprise pour lui permettre de rester jusqu’au terme de sa carrière professionnelle, et accueillir un jeune entrant dans l’entreprise, qui pourrait s’y insérer plus tôt et sans le passage par la « case » chômage ou précarité.

En contrepartie l’employeur serait exonérer de toute cotisation sociale pendant cinq ans. Ce projet pourrait concerner 500 000 jeunes et seniors et coûterait 12 milliards d’euros, financé par la suppression du mécanisme de défiscalisation générale des heures supplémentaires et le redéploiement des exonérations déjà existantes.

Appelons un chat un chat, le contrat de génération n’est rien d’autre qu’une nouvelle niche sociale c’est à dire une dépense fiscale qui joue sur les cotisations sociales pour avoir un effet sur l’emploi. Qu’il permette de rationaliser tous ces dispositifs c’est très bien, mais je ne vois pas pour l’instant quels pourront être les effets sur l’emploi.

François Hollande a eu l’intuition géniale de choisir les bons thèmes de campagne,  capables de marquer le débat public et de cristalliser l’opinion. Mais il est impératif qu’avec son équipe il réfléchisse au rythme et au contenu des réformes que ces thèmes impliquent, au risque de briser le « rêve français » une fois au pouvoir.

PS: Pour mieux saisir mes propos sur le timing de la réforme fiscale, il est utile de rappeler qu'une loi de finances est préparée entre janvier et septembre de l'année qui précède à son exécution, les principaux arbitrages étant effectués entre mai et juillet. Le projet de loi est voté en conseil des ministres courant septembre et déposé au bureau de l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi du mois d'octobre. C'est ensuite au Parlement d'amender et voter le texte.

08 octobre 2011

Primaire socialiste 2012 (7)

Six candidats, trois débats, un choix.

Demain a lieu le premier tour des primaires citoyennes. La campagne « interne » est finalement passée si vite que je n’ai pas eu le temps d’écrire d’autres notes, et ce malgré la tenue des trois débats télévisés et le projet d’une note sur les propositions des six candidats en matière d’éducation. Du coup je vais exposer un peu à la vite mes impressions sur cette campagne de premier tour.

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Le PS et le PRG ont donc organisés trois débats télévisés, le premier sur une grande chaine nationale (France 2), les deux autres sur des chaines « périphériques » (LCP/I-Télé puis Public Sénat/BFM). J’étais franchement sceptique sur la qualité possible d’un débat entre six candidats (risque de cacophonie etc). Au final, chacun a pu exprimer ses idées, ses priorités, sa ligne de conduite. Et le ton était courtois. 

Le succès en termes d’audimat des trois débats a montré l’intérêt grandissant des français pour les primaires citoyennes, et partant de là l’espoir, l’attente, le besoin d’alternance après 10 ans de droite et 5 ans de sarkozysme. En tout cas, on ne peut que se féliciter de ce regain d’intérêt pour la politique. On verra bien ce dimanche et le prochain le taux de participation.

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A la différence de 2006, où je soutenais la candidature de DSK tout en n’étant pas membre du PS, j’ai tranquillement abordé cette primaire sans partie pris, ouvert et attentif aux propositions de chaque candidat. Je n’ai rejoint aucun comité ou groupe de soutien aussi informel soit-il. Mais à un moment donné, faut bien faire un choix. Voici donc quelques réflexions sur les six candidats :

Manuel Valls. Très franchement, je n’ai pas été convaincu par sa campagne et ses prises de position. L’homme a surtout adopté une posture, celle du « discours de vérité », du « socialisme réaliste », du « réformisme modéré ». Mais derrière ces slogans, très peu de propositions concrètes (la TVA sociale, un statut de l’artiste, le vote obligatoire). Ses trois priorités sont le redressement des comptes publics, la compétitivité des entreprises et la sécurité.

Jean-Michel Baylet. Par sa présence, le candidat radical a renforcé la primaire en la sortant du cadre socialo-socialistes. Dommage que Chevènement n’ait pas fait le même choix. Bien qu’il ait peu de chances de l’emporter, sa participation aura été l’occasion de promouvoir les idées radicales. C’est tout bénéfique pour le PRG. Il s’est clairement démarqué des autres candidats par ses positions sur l’Europe fédérale et des sujets sociétaux (cannabis, euthanasie).

Ségolène Royal. Elle se prépare à cette échéance depuis 2007, mais contrairement à 2006 elle n’aborde pas ce scrutin en position de favori. Du coup elle a beaucoup plus de mérite à mes yeux. Ceci dit j’ai toujours du mal avec ses prises de position, parfois populistes ou manquant de cohérence. Elle a délaissée la question de la démocratie participative pour s’entourer (et elle le fait savoir) d’experts. Ses priorités : la transformation écologique de l’économie, les PME et les jeunes.

Arnaud Montebourg. Je crois que c’est la révélation de ces primaires. Avec Manuel Valls mais dans un tout autre registre, il tient un discours qui détonne assez. C’est celui qui va le plus loin dans la critique de la mondialisation, de l’Europe et des institutions républicaines, même si on a du mal à voir comment il pourrait mettre en pratique certaines de ses propositions. Je suis quand même agacé par ses attitudes de tribun (on sent l’avocat) et ses propos sur DSK.

François Hollande. Avant l’affaire du Sofitel, on se moquait gentiment de sa candidature, de son régime etc. Depuis, il est donné grand favori de cette primaire. Il a marqué le débat par ses idées de réformes fiscales et de contrats de générations. Il a pris beaucoup de hauteur au cours des derniers mois, lui donnant une vraie stature présidentielle. On est loin de son image effacée, brouillonne, de Premier secrétaire. Son discours alliant sérieux et engagements en fait le candidat d’un rassemblement large, utile pour un 2nd tour de présidentielle, peut être moins pour une primaire et un premier tour…

Martine Aubry. Un début de campagne plutôt chaotique avec sa déclaration de candidature au pied levé, puis une montée progressive avec la constitution d’une équipe de campagne sans doute la plus équilibrée de toutes. Son action a la tête du PS la conforte à mes yeux comme candidate naturelle et légitime du PS. C’est dommage qu’elle soit tant accrochée au programme socialiste au point d’en citer presque toutes les mesures. On perd de vue un peu ses priorités. J’ai été convaincu par ses propos fermes et nuancés sur la crise économique européenne, et rassuré par les partenariats qu’elle a noués avec le SPD, le Parti démocrate italien ou le PSE en général. Elle est sans doute la plus européenne de tous les candidats.

Je voterai donc demain pour Martine Aubry.

Note 1 : Moscovici, candidat ?

Note 2 : Le PRG participera à la primaire socialiste

Note 3 : A propos des listes de soutiens

Note 4 : De la légitimité d’une candidature

Note 5 : L’emploi

Note 6: La dette, le déficit et la règle d'or

11 septembre 2011

Primaire socialiste 2012 (6)

La dette, les déficits et la « règle d’or ».

Avec la crise grecque des finances publiques au premier semestre 2010, la question de la soutenabilité de la dette et des déficits publics est désormais au centre des débats économiques européens. Pour faire face à la menace, parfois bien réelle, d’un renchérissement soudain du coût de la dette, l’Europe a mis en œuvre des politiques d’austérité. Le pacte de compétitivité Sarkozy-Meckel encourage l’adoption d’une règle constitutionnelle de maitrise des déficits.

Pour ramener le déficit public à 5,7% du PIB en 2011, le gouvernement Fillon a procédé à un premier tour de vis, via le rabotage de plusieurs niches fiscales. Pour tenir notre engagement de redresser les comptes publics, c’est 12 milliards d’euros qu’il entend économiser en 2012. Avec une dette publique de 1800 milliards d’euros, en constante augmentation depuis 1974 dont 20% de plus ces 5 dernières années, la France n’échappera pas à une cure d’austérité.

L’enjeu de la présidentielle, et ce n’est pas rien, sera d’en déterminer l’intensité, la durée et les modalités de mises en œuvre. La droite semble vouloir faire l’essentiel de l’ajustement budgétaire par les dépenses, l’adoption de la règle d’or déterminant le délai impartie et l’effort à réaliser. La gauche entend plutôt jouer sur le levier des recettes (et plus précisément des impôts). Mais les candidats à la primaire socialiste livrent déjà des approches et des propositions différentes. Examinons-les.

Arnaud Montebourg ne souhaite pas s’engager sur un retour du déficit sous la barre des 3% du PIB en 2013 ou 2014. Il propose plutôt un impôt provisoire pendant trois ans afin de rétablir les finances publiques. Ce délai donnera le temps nécessaire pour un débat approfondi sur les contributions de chacun à l’effort national. Il suggère en outre, au niveau européen, une dose raisonnable d’inflation pour éroder l’endettement, et une monétisation de la dette par la BCE.

Pour Manuel Valls la gauche doit adapter son programme à la crise économique. Il plaide pour un redressement rapide des comptes et pose deux principes : consacrer la totalité des nouvelles marges de manœuvre financière à la réduction des déficits ; financer toute nouvelle politique publique par la suppression d’une autre. Il ne rejette pas le principe d’une règle d’or mais pose comme condition au dialogue, l’adoption d’une loi de Finances rectificative d’urgence à la rentrée.

Jean-Michel Baylet s’engage à revenir dès 2013 à un déficit public de 3 % du PIB. Pour réduire les déficits en 2012 et 2013, il propose des majorations exceptionnelles d’impôt sur le revenu et de CSG pour les contribuables les plus fortunés, de l’ordre de 10 % du montant de l’impôt. Il lance l’idée d’une conférence nationale sur les finances publiques rassemblant des représentants des partis politiques républicains, des collectivités locales, des partenaires sociaux et du monde associatif. Elle se réunira pendant six mois et devra définir un plan d’assainissement des comptes.

Ségolène Royal s’engage à ne pas augmenter les prélèvements obligatoires. Elle souhaite une lutte accrue de la fraude fiscale et veut inscrire dans la Constitution l’égale contribution du capital et du travail à la fiscalité et la garantie des ressources de la sécurité sociale. Elle veut également définir des règles fiscales dès 2012 et assurer leur stabilité pendant 5 ans.

Alors que le projet socialiste prévoyait un retour du déficit public sous la barre des 3% en 2014, François Hollande est le premier à s’être engagé sur cet objectif dès 2013. Il promet pour cela une grande réforme fiscale qui consistera à taxer tous les revenus sans distinction d’origine et de rétablir la progressivité de l’impôt et la contribution selon son revenu et ses patrimoines. A propos de la règle d’or, il estime qu’elle devait être votée après l’élection présidentielle.

Martine Aubry relie la crise de la dette à la crise de l’emploi et de la compétitivité. Elle propose une « règle d’or » conforme au projet du PS, qui consiste à consacrer la moitié des nouveaux moyens dégagés à l’assainissement des comptes publics, et l’autre moitié aux investissements d’avenirs (l’emploi, la croissance, le pouvoir d’achat, l’éducation). Pour rétablir les comptes publics, elle entend bien supprimer 10 milliards de niches fiscales sur les 70 milliards créés depuis 2002.

*

A propos de la règle d’or, j’ai expliqué dans une note précédente à la fois sa logique économique, mais aussi son inutilité et sa dangerosité.

Le pacte de stabilité européen et la réforme constitutionnelle de 2008, introduisant la notion de lois pluriannuelles de finances publiques, sont deux instruments juridiques encadrant les déficits et les dépenses publiques. Des mécanismes de sanctions étaient prévus, ils n’ont pas été appliqués.

On nous parle de la rigueur allemande mais faut-il rappeler que le pacte de stabilité avait été exigé en grande partie par l’Allemagne, afin d’encadrer « les pays du club med », et qu’elle a été une des premiers pays (avec la France) à ne pas l’appliquer ? (période 2003-2007).

Pour nous convaincre de voter la règle d’or, la droite nous dit qu’elle ne sera pas contraignante (par l’introduction d’exceptions genre catastrophes naturelles, guerres, récession profonde). Mais pourquoi alors rajouter une n-ième règle si on prévoit déjà qu’elle ne sera pas plus contraignante ?

La nouvelle règle ne changera rien à la trajectoire des finances publiques et ne peut « rassurer » les marchés, élément qu’aucun (programme de) gouvernement ne peut ignorer mais qui ne doit pas constituer une fin en soi. Et ne sommes nous pas déjà dans une récession économique ? (techniquement nous ne sommes pas en récession mais avec une croissance inférieure à un, c’est pas le pied !)

La dynamique de la dette publique dépend beaucoup de variables telles que le taux d’intérêt (le coût de la dette présente et future) et le taux de croissance. Les pays qui ont réussi à se désendetter avaient un taux de croissance supérieure au taux de refinancement de la dette ET/OU un secteur privé (consommation, investissement ou exportation) suffisamment dynamique pour contrebalancer la réduction de dépenses publiques, qui alimentent d’une manière ou d’une autre, la machine économique.

De tous les candidats, Martine Aubry offre une analyse et formule des propositions sur lesquelles je me retrouve le plus. Le ralliement de François Hollande à la règle d’or, même après la présidentielle, m’a déçu. Une telle règle peut avoir du sens si seulement on part sur une obligation de moyens, tel qu’expliqué par Terra Nova, et non de résultats, économiquement inatteignable en l’état.

Note 1 : Moscovici, candidat ?

Note 2 : Le PRG participera à la primaire socialiste

Note 3 : A propos des listes de soutiens

Note 4 : De la légitimité d’une candidature

Note 5 : L’emploi