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03 août 2011

L'incident Jésus

L'incident Jésus.jpegIl s’agit du deuxième tome du cycle « Le Programme conscience », écrit par Frank Herbert et Bill Ransom. L’histoire se déroule quelques siècles après les événements racontés dans Destination Vide. Nef, l’intelligence artificielle créée par l’équipage du vaisseau spatial Terra, a télé-transporté le vaisseau vers la planète Tau Ceti, désormais rebaptisée Pandore.

La nouvelle colonie humaine, issue du clonage et de la reproduction des milliers d’hommes et de femmes mis en hibernation, se développe entre le vaisseau Terra et  quelques campements retranchés sur Pandore. On y vénère Nef comme un Dieu. Maitrisant une autre dimension de l’espace-temps, gardien du savoir et de l’histoire humaine, Nef a le pouvoir de s’immiscer dans la conscience de tout être humain.

Constituée essentiellement de vastes océans, Pandore abrite de nombreuses espèces vivantes qui viennent menacer (au moins en apparence) et limiter le développement des colonies humaines. Mais toutes ces espèces semblent animées par une force supranaturelle, unique et supérieure, l’Avata.

Morgan Oakes, le psychiatre-aumônier, entend bien s’affranchir de la tutelle de Nef. A l’aide d’une armée composite de clones humains, crées par Louis Jésus l’ingénieur génétique, il se lance dans la conquête de Pandore, pour y construire une forteresse à partir de laquelle il pourra détruire Nef.

Nef sort Flatterie, le psychiatre-aumônier qui a contribué à sa création, de sa capsule d’hibernation et le charge de trouver avec les humains une manière de le vénéfrer, sous peine de quoi l’humanité sera détruite. Il sera pour cela accompagné du poète Panille, le seul humain capable de communiquer avec l’Avata, et partant de percer le mystère de Pandore.

Le contraste avec Destination Vide est aussi saisissant que désappointant : espace clos contre planète vaste, un équipage de quatre personnes contre une douzaine de personnages principaux, un jargon technique et scientifique contre une ambiance religieuse ou mystique. Le contraste se retrouve également dans le projet des personnages : des humains veulent créer une intelligence artificielle dans l’un, une conscience artificielle veut faire accéder des clones et mutants au rang d’humanité dans l’autre.

Sérieuses ressemblances ou simples projections de ma part, j’ai trouvé qu’il y avait comme des similitudes entre l’univers d’Avatar (le film) et celui de L’incident Jésus, sans pour autant réellement correspondre. Du reste, j’avais eu un peu la même impression à la lecture de quelques passages de Et l’homme créa un Dieu.

On retrouve la aussi les thèmes chers à Frank Herbert : la psychologie, la religion, le clonage, la mémoire, la préscience, le pouvoir. Mais ce qui est fascinant c’est que la façon dont ils sont traités ici, complète ou explicite, sans le vouloir, quelques aspects de Dune (le voyage spatial, la mémoire des clones, l’avenir de l’humanité pressentie par une intelligence supérieure etc).

20 juillet 2011

Destination Vide

science-fiction, frank herbertL’œuvre littéraire de Frank Herbert ne se résume pas à l’incroyable saga de Dune, dont j’ai plusieurs fois fait mention sur ce blog. Il est en effet l’auteur d’une autre saga, intitulée « Le Programme conscience », qu’il a initiée seul avec Destination Vide et qu’il a continuée et finalisée, dans trois autres ouvrages, avec Bill Ransom.

Transportant des milliers d’humains mis sous cryogène, le vaisseau spatial Terra est en route pour Tau Ceti, une planète située dans une autre galaxie. Mais les cerveaux humains incorporés à l’ordinateur de bord et chargés d’assurer le voyage, lâchent les uns après les autres.

Livrés à eux-mêmes, quatre astronautes – Bickel le capitaine, Timberlake l’ingénieur, Flatterie le psychiatre-aumônier, Prudence la médecin – n’ont pas d’autre choix que de construire une intelligence artificielle, une conscience, pour assurer le voyage censé durer 400 ans.

En réalité toutes les anomalies de l’astronef ont été prévues par Hempstead et ses hommes qui supervisent depuis la Lune, le Programme conscience. Aucun retour sur Terre n’est possible. Et sans l’intelligence artificielle, le voyage sera de courte durée (problèmes de vivres et d’espérance de vie).

Voilà les quatre astronautes dérivant dans le vide, « la substance brute à partir de laquelle on peut tout créer ». Entre discussions scientifiques et techniques pour créer l’intelligence artificielle et débats métaphysiques sur la notion et les risques d’une conscience artificielle indépendante, ils doivent œuvrer pour leur survie.

Destination vide est une sorte de huis clos spatial. La lecture du roman est rendu difficile par la surabondance des raisonnements, termes et concepts scientifiques et techniques. C’est typiquement de la « hard science fiction ». L’intérêt du livre réside dans le débat métaphysique et moral qui entoure le projet d’une I.A consciente et indépendante à laquelle on délaisse sa liberté, et qu’anime le psychiatre-aumônier entre les personnages.

30 mai 2011

Et l’homme créa un dieu

science-fictionPour tous ceux qui ont découvert le talent et le génie de Frank Herbert par la saga Dune, et qui sont tombés amoureux de cet univers, il convient de dissiper d’entrée tout malentendu lié à la première page de couverture. Bien que sous-titré Prélude à Dune, Et l’homme créa un dieu n’a pas de liens directs avec cet univers. On retrouve cependant les thèmes chers à Frank Herbert.

Marqué par une lointaine et mystérieuse Guerre des Marches, la galaxie s’assure l’unité et la paix entre civilisations par les services Redécouverte et Rééducation (le R.R), chargé de redécouvrir les planètes autrefois affiliés à l’Empire et d’y enseigner la paix civile, et Investigation et Normalisation (l’I.N), chargé d’employer la manière forte en cas de menaces guerrières avérées.

L’histoire se centre sur le personnage de Lewis Orne, agent R.R tout juste diplômé de l’Ecole de la Paix, et envoyé sur une planète récemment redécouverte et où l’on enregistre de nombreuses disparitions. L’homme semble des plus banals mais abrite en lui une sorte de pouvoir de préscience, faisant preuve d’un sens aigue de l’observation et d’immenses capacités d’intuition.

Plus ou moins supervisé par Stetson, un agent de l’I.N convaincu de son potentiel, Lewis Orne va mener plusieurs missions suicides pour assurer la paix, et déjouer le contre-pouvoir des Nathians. Ses grandes capacités et son expérience de quasi mort imminente l’assimilent à un « faiseur de miracles », un « dieu en puissance », aux yeux des Prêtres du Surdieu. Seules les épreuves finales permettront de déterminer qui il est réellement.

Plutôt court, le roman se lit assez rapidement d’autant plus que le style est ici accessible. Rien à voir avec Destination Vide, un autre roman de Frank Herbert dont j’aurai l’occasion de reparler, où le jargon scientifique égare le lecteur. Le livre ouvre la réflexion sur la relation entre religion et pouvoir, entre créateur et créature, entre paix et guerre, et sur les potentialités de la conscience humaine. On en revient à la notion de post-humanité dont j’avais parlé l’été dernier.

L’intrigue est moins complexe que celle de Dune. Les défis rencontrés par Lewis Orne apparaissent comme des étapes dans la trajectoire personnelle du héros, montrant une progression du personnage du statut d’homme banal à celui de surhomme. Ici c’est moins l’environnement que le personnage qui compte, à la différence de Dune. Mais cela n’enlève rien à la qualité de l’histoire et de la narration. Et c’est avec plaisir que j’ai relu Frank Herbert.

19 avril 2011

La genèse de Dune

A la fin des années quatre-vingt-dix, Brian Herbert et Kevin J. Anderson décident de se lancer dans l’écriture d’une suite de la mythique saga Dune, laissée inachevée par le décès de Frank Herbert en 1986. Mais au lieu d’attaquer directement l’écriture du septième tome, soit la suite de La Maison des Mères, les deux auteurs ont choisi de revenir sur les prémices de la saga.

Dans La Genèse de Dune, leur deuxième trilogie après Avant-Dune, le binôme explique les événements du Jihad Bultérien, la guerre des hommes contre les machines, à l’origine de l’univers politique et économique de Dune. Dans le livre fondateur de la saga, Frank Herbert avait laissé quelques indices sur ces événements déjà millénaires.

Dans ce temps là, les voyages interstellaires sont encore technologiquement limités, l’Epice n’est pas la ressource centrale de l’univers, et les principales institutions connues de la série ne sont pas encore formées. Une partie de l’univers – les mondes synchronisés – est sous la domination des machines d’Omnius, une super intelligence artificielle présente par copies sur toutes les planètes dominée.

Les hommes y sont réduis en esclavage, surveillés par des automates mais aussi les Cymeks, des cyborgs géants abritant un cerveau humain dans des corps mécaniques, alliés d’Omnius. Agamemnon Atréides en est le chef. Vorian, son fils, un humain, assure la remise à jour des copies d’Omnius d’un monde à l’autre. De l’autre côté, les mondes de la Ligue des hommes regroupent les planètes encore libre de la tyrannie des machines. Entre les deux, des planètes dissociées, ni acquis aux robots, ni ralliés aux humains, parmi lesquelles on retrouve Arrakis, la planète des sables.

L’histoire racontera alors cette guerre séculaire entre les humains et les machines, le Jihad Bultérien, du nom de celle qui l’initiera malgré elle. On en apprend plus sur la voyage des Zensunnis, le futur peuple Fremen, la découverte des propriétés de l’Epice, les origines de la Guilde, du Bene Gesserit, des Mentats et de l’Empire des Corino. On découvre pourquoi les Atréides et les Harkonnen finissent par se vouer une haine sans limite.

J’avais lu les deux premiers livres en 2005 et 2006. J’ai terminé le dernier tome il y a quelques semaines. Je ne renouvellerai pas mes remarques sur le style et le schéma narratif des auteurs, rien de nouveau à ce sujet. J’ai trouvé qu’il y a beaucoup de personnages, avec des noms peu mémorisables, qui ont un rôle trop secondaire dans l’intrigue. Du coup beaucoup d’autres personnages manquent de personnalité et de profondeur.

Enfin, alors qu’on connaissait dans les six premiers tomes, les Atréides comme des Justes et les Harkonnens comme des Montres, j’ai trouvé original de faire comme une inversion de situation. L’acte de couardise attribué aux Harkonnens, et à l’origine de leur haine pour les Atréides, en dit beaucoup sur la « raison d’Etat » et la justice du vainqueur. Le héros n'est pas toujours celui qu'on croit.

29 mars 2011

Le triomphe de Dune

Gusanos de arena de Dune.jpgLe triomphe de Dune est la suite de Chasseurs de Dune, dont je vous avais fait une note de lecture en janvier dernier. Il s’agit surtout du dernier tome de la saga Dune, initiée par Frank Herbert en 1965 et reprise par Brian Herbert et Kevin J. Anderson au début des années 2000. La disparition de Frank Herbert en 1986, peu après la publication de La Maison des Mères, avait laissé l’histoire inachevée, au grand dam de ses très nombreux fans.

L’histoire de Dune se déroulant sur plusieurs millénaires, en faire un résumé n’est pas chose aisée. La trame principale de l’œuvre se concentre autour de l’Epice gériatrique, une puissante substance sécrétée par des vers de sables géants, que l’on ne trouve que sur la planète Arrakis (Dune). Sa rareté et ses propriétés (permet le voyage dans l’espace, la préscience, la stimulation intellectuelle et la longévité) la place au centre de toutes les convoitises.

Tout au long des épisodes, plusieurs institutions apparaissent et interagissent sous forme d’alliances et de confrontation : la Guilde spatiale (voyage spatial), le Bene Gesserit (pouvoir de préscience), le Bene Tleilax (travaux génétiques), les Atréides (une famille noble puis ses descendants), les Mentats (ordinateurs-humains), les fremens (peuple de guerriers), les Honorées Matriarches, les Machines pensantes etc.

Dans La maison des Mères, Arrakis a été atomisée par les Honorées Matriarches, en guerre contre les sœurs du Bene Gesserit dont elles sont le pendant agressif et barbare, annihilant ainsi les vers de sable et donc l’Epice. Au bord d’un non-vaisseau, véritable Arche de Noé, Duncan Idaho a pu sauver des vers de sables, un maitre Tleilaxu, quelques sœurs du Bene Gesserit et un groupe de Juifs, tous cherchant à fuir l’Ennemi, les Machines pensantes, qui menace toute l’humanité.

Murbella a fondé la Nouvelle Sororité, qui rassemble Bene Gesserit et Honorées Matriarches pour surpasser les différences respectives et préparer la lutte contre l’Ennemi, Omnius, la Machine Pensante, que l’humanité pensait avoir détruit il y a des millénaires. Murbella devra négocier avec la Guilde et Ix, la planète-industrie, la construction de vaisseaux de guerre et déjouer les pièges des Danseurs-Visages, des espions infiltrés capables de prendre n’importe quelle identité.

De leurs côté, Duncan Idaho et Sheeana ont ramenés à la vie par le clonage, Paul Atréides, sa mère, son fils et quelques autres personnages du début de la saga. En leur faisant retrouver leur mémoire et identité passée, ils espèrent trouver le moyen d’arrêter l’Ennemi. Outre des conflits internes, ils devront faire face à des actes de sabotages, aux attaques des Danseurs Visages, à l’Ennemi qui les poursuit depuis le début de leur fuite.

Ainsi ces deux tomes conclusifs voient se rassembler les principaux protagonistes des quatre grandes périodes du récit de Dune, dont la rencontre viendra sceller le sort de toute l’humanité. Le dénouement final montre l’émergence d’un étrange et inattendue syncrétisme, sous la direction du kwisatz haderach ultime, le sûr-être de l’univers. Il assurera la paix et l’équilibre entre toutes les puissances de la galaxie, nécessaire au développement de l’(la post-)humanité.

En refermant le livre aujourd’hui, j’ai mis un peu temps à réaliser que l’histoire de Dune était désormais close. La fin choisie par les deux auteurs a le mérite de faire le lien entre les différentes trilogies (Genèse de Dune, Avant-Dune, Dune, Après-Dune) et de ne pas laisser de doutes quant à une possible suite. Reste LA question: est-ce la fin qu’avait entrevue/prévue Frank Herbert ? Nous ne le saurons jamais.

J’ai aimé retrouvé l’ambiance des premiers tomes, sans doute les plus clairs et les plus enivrants, en tout cas les meilleurs à mes yeux. On s’habitue au style de Brian et Kevin, tendant à se rapprocher du style de Frank mais sensiblement différent quand même. Le dernier tome m’a semblé riche en rebondissements et en fausses pistes, même si du coup, on peut s’interroger sur l’apport de certains personnages et quelques passages, plutôt secondaires par rapport à l’intrigue.

Dune est pour moi l’œuvre majeure de science-fiction. Lorsque j’ai passé mon bac de français en 2002, on nous avait demandé d’écrire la préface d’un livre qui nous avait marqué. J’ai donc logiquement écrit sur Dune (et ça a été payant !). Les thèmes abordés par l’œuvre sont nombreux : l’influence des mythes et des prophéties, les relations de pouvoirs, la dépendance économique et organique à une seule substance, l’écosystème planétaire et l’impact de l’homme sur celui-ci, le clonage et la reproduction d’une conscience, le rapport de l’homme à la machine.

Bien que Frank Herbert ait fait référence aux machines pensantes dans les premiers tomes, l’exploitation de cette idée par Brian Herbert et Kevin J. Anderson, en dit d’avantage sur les problématiques actuelles des générations présentes. Frank Herbert insistait plus sur l’écosystème et les guerres atomiques, plus conforme aux préoccupations de son époque. La conscience artificielle ou retrouvée (accéder à nos mémoires antérieures), thème récurrent dans les écrits de Frank Herbert, en font un auteur plutôt avant-gardiste.