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30 juin 2012

Hommage à Olivier Ferrand

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J’apprends à l’instant la mort d’Olivier Ferrand, jeune député socialiste de la huitième circonscription des Bouches-du-Rhône et fondateur du centre de réflexion social-démocrate Terra Nova, emporté ce matin par une crise cardiaque. Il avait à peine 42 ans. C’est un vrai choc. Je suis même écœuré par cette disparition.

Comme beaucoup de monde, je l’ai découvert via la fondation Terra Nova qu’il a crée en 2008 et qu’il n’a cessé d’animer (par ses contributions d’idées et la construction d’un véritable réseau) et de porter depuis, notamment dans les média (tribunes, émissions télévisuelles ou radiophoniques).

Il ne ménageait pas sa peine, comme le prouve ses nombreux déplacements en 2008-2009, dans les fédérations socialistes, dans les réunions de courants (plutôt « soc-dem ») etc… pour y promouvoir les primaires, dont il est un des principaux instigateurs en France. Le succès de Terra Nova aujourd’hui lui revient largement.

Lorsque ce think tank a vu le jour en 2008, j’étais satisfait de voir émerger un lieu de pensée, un temps déconnecté des stratégies individuelles, capable de renouveler la matrice intellectuelle du PS. J’avais toutefois exprimé quelques réserves sur sa pérennité et sa capacité à diffuser les idées. L'action d'Olivier Ferrand m’aura donné tort.

09 mars 2012

Sarko ou le complexe de Zorro

Il s’agit d’un livre d’entretien entre l’ancien Ministre de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche du gouvernement Jospin, et le journaliste Dominique de Montvalon. Pour Claude Allègre, dans un contexte de crise internationale historique, l’élection présidentielle à venir se résume à la question suivante : « à qui confier le navire France par si gros temps ? ».

Et pour lui, c’est Sarkozy. Pour expliquer ce choix, il va faire le bilan du quinquennat. Il le félicite entre autre pour sa gestion de la crise en Ossétie, de la crise des subprimes, pour sa présidence de l’UE, pour les nombreuses réformes entreprises en politique intérieur (RSA, l’université, les retraites, les collectivités, la Constitution, la carte judiciaire…).

Il se montre plus critique sur l’ouverture (Kouchner inadapté aux Affaires étrangère), sur le Grenelle de l’environnement (parasité par le courant écologique qu’il exècre), sur la dérive droitière de la majorité (discours sur les immigrés) ou sur la portée de certaines réformes (il souhaite aller plus loin sur l’université et les retraites).

Il relativise l’épisode du Fouquet’s, le voyage chez Bush, la candidature du fils à l’EPAD etc. en essayant d’expliquer les évènements. Il revient sur le bilan de Jospin dont il critique les 35h mais salue les emplois jeunes, la réforme de la recherche ou de la justice. Il explique sa récente mission des Assises européennes de la recherche.

Par rapport au PS, il regrette que DSK ne soit pas candidat, aime bien Martine Aubry qui a un vrai bilan ministériel et municipal, éprouve une sympathie pour Montebourg qui apporte au débat d’idées. Vis-à-vis d’Hollande, il balaye les critiques faites par la droite, mais le juge incapable de présider au vue de son bilan à la tête du PS.

Je suis assez réservé sur l’ensemble de l’entretien. Alors qu’il n’a été ni acteur, ni témoin de certains évènements, sauf à avoir fait partie du premier cercle sarkozyste, il revient sur ceux-ci pour en expliquer le déroulement et exonérer Sarkozy. C’est une posture bien moins crédible que son témoignage de l’époque Jospin.

On ne pourra pas nier que Sarkozy a entrepris un nombre important de réformes. Mais que ce soit sur la Constitution, la carte territoriale ou les retraites, Allègre manque d’« objectivité » et de recul. Saluer les réformes sur le seul principe qu’elles ont eu lieux, c’est quand même très court. Ca ne fait pas un projet de société.

12 février 2012

Rocky is back

Non, non, je ne parle pas de Rocky Balboa le mythique boxeur incarné à six reprises par Sylvester Stallone. « Rocky » c’est le petit surnom donné à Michel Rocard au sein du PS, en général par les militants soc-dem qui l’apprécient et pour qui la parole compte toujours un peu.

Or depuis qu’il a été nommé « Ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles Arctique et Antarctique », Rocard s’est fait bien silencieux : peu d’interviews, quelques réunions ou conférences ici ou là, une ou deux tribunes dans la presse écrite.

Dans un entretien accordé à Nice Matin où il était interrogé sur la (pré-)campagne présidentielle, il a dit ne pas vouloir s’impliquer parce qu’il fallait notamment laisser la place aux jeunes. Contrairement à Lionel Jospin, il n’était pas présent au meeting du Bourget où François Hollande a (brillamment) lancé sa campagne.

Il a récemment participé à une réunion d’Inventer à gauche, un nième courant du PS organisé autour de Michel Destot (le maire de Grenoble), autour du thème des 100 premiers jours d’un futur gouvernement de gauche. Si j’en crois les comptes-rendus de l’association, de LCP et de Rue89, il nous a encore fait du « grand Rocard ».

Ses principales idées phares :

-      Nouvelle phase de la décentralisation

-      Participation des salariés au conseil de surveillance et aux comités de rémunération des grands groupes

-      Renforcement de la présence et de l’importance syndicale par une forte incitation à y adhérer

-      La suppression des stock-options

-      Casser l’intérêt bancaire (« ça va être la lutte des classes » dixit)

-      Face à la crise du logement, une caution mutuelle solidaire

-      Faire la toilette des textes scandaleux sur l’immigration et la nationalité

-      La taxe carbone

Moins consensuel cette fois, il a jugé très peu plausible les hypothèses de croissance retenu dans le programme présidentiel d’Hollande, a critiqué l’accord électoral PS-EELV sur le nucléaire et préconise de retarder la réforme fiscale, jugée plus facile à faire avec de la croissance, et de s'en tenir aux mesures symboliques à faible coût.

Mes remarques :

Concernant les hypothèses de croissance, celles prévues en 2012 et 2013 me semblent plutôt prudentes et réalisables, autant celles prévues de 2014 à 2017 apparaissent bien optimistes, tout au moins incertaines. Mais celles du gouvernement ou de Bayrou ne sont pas non plus très prudentes.

 

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(cliquer sur l'image pour agrandir)

Concernant la réforme fiscale, il me semble évident que si elle n’est pas lancée dès l’élection, c'est-à-dire au moment même où la nouvelle majorité a le soutien politique le plus large, alors elle ne se fera pas. Et elle est nécessaire autant pour des raisons de justice fiscale que pour des raisons budgétaires et économiques.

Concernant les mesures symboliques à faibles coûts, c’est assez surprenant de l’entendre de la bouche de Rocard (ça mériterait d’entendre le raisonnement en entier), lui qu’est pourtant moins attaché au symbolique qu’au pratique et structurel. Mais dans un contexte budgétaire difficile, on en comprend aussi la raison.

24 novembre 2011

Retour sur les primaires

Un peu plus d’un mois après les primaires citoyennes qui ont vu la désignation de François Hollande comme candidat socialiste et radical à l’élection présidentielle, Terra Nova publie sur son site un bilan plutôt positif de l’expérience. La fondation progressiste propose l’amélioration, la généralisation et la légifération du procédé.

Parmi les recommandations : l’allongement de la durée de campagne (commencer en juin avec un premier débat, le vote restant en octobre), un meilleur déploiement de la campagne à l’échelle locale (débats régionaux et départementaux, mise en place de caucus) et la réduction des barrières à la participation (plus de contribution d’un euros, utilisation des bureaux de vote des scrutins républicains).

Olivier Ferrand et son équipe jugent insuffisantes les trois semaines de campagne ayant précédé la primaire citoyenne, et rappellent qu’aux Etats-Unis la campagne des primaires dure plus de six mois, ce qui laisse aux outsiders le temps de se faire connaitre et de s’imposer s’ils s’avèrent être les meilleurs.

Terra Nova souhaite non seulement convaincre les autres partis d’adopter le processus, mais milite pour le généraliser à la désignation des têtes de liste aux élections municipales (villes de plus de 50 000 habitants) et régionales ainsi qu’au niveau européen pour la désignation du candidat de chaque parti à la Présidence de la Commission européenne.

Mes commentaires :

J'aime bien les analyses de Terra Nova en général mais j’ai toujours pensé qu’il y avait des non-dits et des angles morts dans leurs points de vue sur ce nouveau mode de désignation des candidats. Et je crois qu’ils devraient calmer leurs ardeurs sur le succès et l’intérêt des primaires.

Il est évident qu’une primaire avec des centaines de milliers voir des millions de participants donne une toute autre légitimité au candidat vainqueur que les seuls militants d’un parti. Mais la primaire n’a d’intérêt que si le parti n’a pas réglé la question du leadership.

Les primaires citoyennes, organisées par le PS et le PRG, ont été un succès parce qu’il y a une forme d’exaspération des français à l’égard de la majorité actuelle (en place depuis 10 ans), parce que les débats politiques se font rares, et parce que c’était nouveau.

Sur la durée de la campagne, je pense qu’un bon mois est suffisant. En organisant la votation courant octobre, allonger la campagne signifie la commencer durant l’été, ce qui n’est pas porteur. Par ailleurs, on prend le risque de saturer l’espace médiatique et l’intérêt des gens, d’autant plus si le procédé est repris par d’autres.

Terra Nova oublie peut être que les militants ne sont pas des professionnels de la politique. Après le boitage, le tractage sur les lieux publics, le porte à porte, les nombreuses réunions publiques, la gestion des bureaux de vote, on veut maintenant nous rajouter des "caucus" (les militants se mettent dans la peau des débatteurs)…

Si l’on donne un cadre législatif au système des primaires avec un système de financement public, je peux concevoir que l’on supprime la contribution symbolique. Mais si tel n’est pas le cas, il faut la garder, les gens ont donnés plus en général, et tant pis pour ceux qui font un blocage sur ça.

19:19 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : primaires, hollande, ps

23 octobre 2011

Ses idées forces seront peut être ses faiblesses

François Hollande a été choisi à l’issu du second tour des primaires citoyennes pour porter la candidature des socialistes et des radicaux au printemps prochain. Bien que je lui ai préféré Martine Aubry au cours des deux votations, j’avoue ne pas être mécontent au final de le voir investi candidat.

Même si je ne partage pas toutes ses positions, il a joué intelligemment en sachant prendre de la hauteur par rapport aux critiques de ses concurrents et de la majorité, mais aussi dans le choix de ses thèmes de campagne : une réforme fiscale juste, un contrat de génération pour la jeunesse, le redressement des comptes publics.

Face à l’agité du bocal qui squatte l’Elysée depuis mai 2007 sans jamais avoir su faire « président », Hollande apparait comme quelqu’un d’apaisant et de rassembleur. Une sorte de « force tranquille ». Ce qui apparaissait comme des faiblesses hier sont paradoxalement devenus aujourd’hui ses atouts.

Mais en ces temps d’incertitudes économiques, sociales et géopolitiques, François Hollande, comme tous les prétendants à la magistrature suprême, a tout à prouver. Et la tache n’est pas facile parce que la donne peut changer à tout instant, en pire hélas, rendant caduques toutes les propositions avancées, aussi fondées soient elles.

Et c’est là que ses idées forces, pour la campagne comme pour la gestion future du pays, peuvent devenir ses faiblesses. Je ne reviendrai pas sur le redressement des comptes publics absolument nécessaire mais pas au prix d’une récession généralisée. Je veux surtout parler de la réforme fiscale et du contrat de génération.

La réforme fiscale telle que voulue par François Hollande a un triple objectif : relance économique, justice sociale et redressement des comptes publics. Mais au-delà des quelques arbitrages politico-techniques, que je n’aborderai pas ici, le problème sera dans le timing de sa mise en œuvre.

Si la gauche gagne en mai 2012, elle devra assumer la loi de finances (LF) votée par la majorité actuelle, quand bien même elle procèdera à une LF rectificative. Et je ne crois pas qu’entre juin et décembre, l’Administration et le futur gouvernement aient le temps de préparer les textes pour le vote de la LF 2013. Ca renvoi donc à 2014…

Le contrat de génération permet de relier la problématique de l’emploi des seniors à celle des jeunes, dans un contexte d’allongement progressif de la durée de cotisation pour les uns et de difficile insertion professionnelle pour les autres. C’est intéressant pour réduire la fracture générationnelle et assurer entre salariés la transmission des savoirs et compétences.

L’employeur aurait un double engagement pendant cinq ans : garder un senior déjà présent dans l’entreprise pour lui permettre de rester jusqu’au terme de sa carrière professionnelle, et accueillir un jeune entrant dans l’entreprise, qui pourrait s’y insérer plus tôt et sans le passage par la « case » chômage ou précarité.

En contrepartie l’employeur serait exonérer de toute cotisation sociale pendant cinq ans. Ce projet pourrait concerner 500 000 jeunes et seniors et coûterait 12 milliards d’euros, financé par la suppression du mécanisme de défiscalisation générale des heures supplémentaires et le redéploiement des exonérations déjà existantes.

Appelons un chat un chat, le contrat de génération n’est rien d’autre qu’une nouvelle niche sociale c’est à dire une dépense fiscale qui joue sur les cotisations sociales pour avoir un effet sur l’emploi. Qu’il permette de rationaliser tous ces dispositifs c’est très bien, mais je ne vois pas pour l’instant quels pourront être les effets sur l’emploi.

François Hollande a eu l’intuition géniale de choisir les bons thèmes de campagne,  capables de marquer le débat public et de cristalliser l’opinion. Mais il est impératif qu’avec son équipe il réfléchisse au rythme et au contenu des réformes que ces thèmes impliquent, au risque de briser le « rêve français » une fois au pouvoir.

PS: Pour mieux saisir mes propos sur le timing de la réforme fiscale, il est utile de rappeler qu'une loi de finances est préparée entre janvier et septembre de l'année qui précède à son exécution, les principaux arbitrages étant effectués entre mai et juillet. Le projet de loi est voté en conseil des ministres courant septembre et déposé au bureau de l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi du mois d'octobre. C'est ensuite au Parlement d'amender et voter le texte.