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24 janvier 2012

Le PSOE prépare l’après-Zapatero

Après leur défaite aux élections législatives du 20 novembre dernier où ils ont fait leur plus mauvais résultat depuis le retour de la démocratie, les socialistes espagnols préparent actuellement leur 38ème congrès, prévu les 3, 4 et 5 février prochain.

L’évènement est important puisqu’il marque le début de l’ère de l’après-Zapatero. Ce dernier, secrétaire général du parti depuis 2000, va quitter la vie politique. Et c’est le premier congrès organisé dans l’opposition, après sept ans aux responsabilités.

Valable pour chaque parti politique, le congrès a trois fonctions : renouveler les instances locales et nationales, déterminer l’orientation et la stratégie politique pour les années à venir et choisir un leader ou lui renouveler sa confiance.

Le déroulement d’un congrès du PSOE

Il est intéressant de constater que le PSOE et le PS s’organisent et fonctionnent un peu différemment. Le PS est un parti centralisé, le PSOE un parti fédéral. Le PS fonctionne sur le principe des courants alors que le PSOE n’en compte officiellement qu’un (Izquierda socialista, qui représente la gauche du parti).

Le congrès du PS se déroule schématiquement en trois temps : les contributions (individuelles, collectives, thématiques), le vote des motions qui déterminent la répartition des sièges au sein du Conseil et Bureau National, puis l’élection du Premier secrétaire par les militants.

Celui du PSOE s’organise autour d’un seul texte programmatique, amendable via une commission de travail, et en deux temps : les congrès provinciaux pour choisir les délégués qui vont participer au congrès fédéral. Le secrétaire général est choisi par les délégués, et non par les militants.

Cela dit, je ne crois pas que les fédérations espagnoles aient beaucoup plus de pouvoirs et de libertés que les fédérations françaises. Et si les courants n’ont pas au sein du PSOE le poids qu’ils ont au PS, ils s’organisent également autour de certaines personnalités (Gonzales/ Guerra, Borrell/ Almunia, Zapatero/ Bono, Rubalcaba/ Chacon).

Le retour des débats internes

Généralement lorsqu’un parti est au pouvoir, les débats internes sont très limités quand ils ne sont pas encadrés voir éclipsés par l’action du gouvernement. Et depuis 2008 au moins, et avec l’approfondissement de la crise, la direction de Zapatero m’a l’air d’avoir pas mal verrouillé les débats.

Avec le temps, non seulement Zapatero s’est passé de l’avis des instances du parti mais en plus il en exigeait un soutient total à l’action du gouvernement. Sans exclure un biais journalistique (je lis essentiellement El Pais pour m’informer de l’actualité espagnole et le journal est proche des socialistes), j’ai rarement entendu des voix discordantes au discours officiel du PSOE.

Lorsqu’en mai 2011 Zapatero a annoncé qu’il ne se représenterait pas, espérant sauver les élections municipales, la question de sa succession immédiate a été très vite réglée : on a parlé un temps d’une primaire pour départager Rubalcaba et Chacon, les deux favoris, avant que cette dernière ne soit priée de renoncer au profit du premier.

Depuis la défaite électorale du 20 novembre dernier et la décision d’organiser un congrès dès février 2012 (quand on pense que le PS a mis plus d’un an à organiser son congrès après sa défaite en 2007), il n’y a pas un jour sans qu’un responsable socialiste ne publie ses analyses de la défaite et explique la stratégie à adopter pour l’avenir.

Le duel Chacon/Rubalcaba

Deux candidats briguent la succession de Zapatero à la tête du PSOE. D’une part Alfredo Perez Rubalcaba, 60 ans, ancien ministre de l’Intérieur (2006-2011) et vice-président du gouvernement (2010-2011), chef de liste aux dernières élections. D’autre part Carme Chacon, 40 ans, ex-ministre du Logement (2007-2008) et de la Défense (2008-2011).

Carme Chacon et ses partisans ont publié un manifeste intitulé « Mucho PSOE por hacer ». Tout en revendiquant les avancées de l’ère Zapatero, ils proposent de faire un inventaire de ces années de gouvernement et en particulier de la gestion de la crise. Ils souhaitent une réforme fiscale d’avantage progressiste et un gouvernement économique et démocratique en Europe. Enfin ils militent pour un parti ouvert et travaillant avec la société civile, puis pour l’organisation de primaires citoyennes.

Alfredo Rubalcaba et ses soutiens ont publié un manifeste intitulé « 38 proposiciones y mas ». Ils plaident pour un parti plus à l’image de l’Espagne, de masse (vise les 2 millions d’adhérents), pluriel et intergénérationnel, respectant les identités régionales mais en parlant d’une seule voix. Ils souhaitent un parti plus participatif (via les NTIC) avec notamment l’élection du candidat à la présidence par la voie de primaires citoyennes. Enfin, un parti ancré en Europe et dans l’Internationale Socialiste.

Le premier texte privilégie une démarche politique globale quand le second est centré sur le parti, présenté comme un outil de reconquête. Pour l’instant, à l’issu des premiers congrès provinciaux organisés le weekend dernier, Rubalcaba partirait avec un léger avantage sur Chacon, mais un bon tiers des délégués n’ont pas encore pris position.

Difficile pour ma part de départager les deux candidats. Je connais bien mal Chacon mais je trouve intéressant le principe d’inventaire des années ZP. Elle apparait encore trop sans consistance mais risque surtout de payer sa « catalanité » suite aux bisbilles PSC/PSOE. Rubalcaba est d’avantage expérimenté et c’est un bon contradicteur, ce qui serait utile au Parlement. Verdict dans deux semaines.

09 juillet 2011

Le nouveau candidat des socialistes espagnols.

Alfredo_Pérez_Rubalcaba_2010.pngCet après midi, le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) a officiellement investi Alfredo Perez Rubalcaba, actuel Ministre de l’Intérieur et Premier Vice-Président du Gouvernement Zapatero, comme le candidat tête de liste des socialistes pour les élections législatives de l’an prochain.

En avril dernier, José Luis Rodrigues Zapatero avait annoncé qu’il ne souhaitait pas briguer un troisième mandat. Ce faisant il espérait pouvoir empêcher, ou tout au moins limiter, une lourde défaite aux élections municipales et dans quelques régions. Il n’en fut rien.

Le prochain candidat tête de liste des socialistes espagnols devait être désigné par la voie d’une primaire interne, comme cela avait été le cas en 1998 pour les législatives de 2000. Rubalcaba et Carme Chacon, la jeune ministre de la Défense, étaient vu comme les favoris.

Mais au nom de l’unité du parti, Chacon a renoncé à se présenter à la primaire. Et le seuil de parrainages, excessivement élevé, n’a pas permis à d’autres candidats de se confronter à Rubalcaba, seul candidat déclaré. La primaire a donc été annulée, et Rubalcaba officiellement investi.

Son discours d’investiture est l’occasion d’en savoir plus sur les grandes lignes du projet politique de cet ancien coureur de fond, débateur craint et réputé, homme sobre mais respecté, déjà ministre dans les gouvernements de Felipe Gonzalez et pilier de ceux de Zapatero.

Ses grandes priorités sont donc l’emploi, la santé et la compétitivité de l’économie, l’égalité des chances et l’approfondissement de la démocratie. Il réaffirme le droit au volontarisme politique face aux marchés. Il prévient toutefois qu’il ne s’engagera pas sur des promesses qu’il sait ne pas pouvoir tenir.

Il souhaite une contribution sur les bénéfices des banques au profit d’un fond pour l’emploi et la reconversion de l’économie (formation, développement durable, services à la personne). Il s’engage à rétablir l’impôt sur le patrimoine, supprimé en 2007, en le ciblant sur les très hauts revenus. Il promet une réforme de la loi électorale en s’inspirant du modèle allemand. Il veut défendre la santé publique.

En réhabilitant l’impôt (sur le patrimoine, sur le bénéfice des banques ou les transactions financières) et la redistribution (éducation, formation, santé, famille), Rubalcaba revient aux fondamentaux sociaux-démocrates. Et ses engagements sur la loi électorale ou les comportements politiques sont une manière de répondre aux revendications des Indignés.

Il reste que la position de Rubalcaba n’est pas des plus aisées. Les socialistes sont largement devancés par la droite, dans les intentions de vote à moins d’un an des élections. Il est politiquement lié au bilan du gouvernement Zapatero, y compris les mesures liées au tournant de la rigueur adoptées en mai 2010, et le revendique.

Toute la difficulté va être pour lui de marquer ses distances avec Zapatero tout en le soutenant jusqu’au bout, et de dessiner une sorte d’alternative tout en gardant à l’esprit l’étroitesse des marges de manœuvres et la présence de menaces financières réelles.

20 octobre 2010

La politique économique de Zapatero 2004-2010

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Suite aux élections générales de mars 2004, et après huit ans d’opposition, les socialistes espagnols reviennent aux responsabilités. Leur jeune leader, José-Luis Rodriguez Zapatero, encore inconnu en 2000 lorsqu’il accède au Secrétariat Général du PSOE, devient le nouveau Président du Gouvernement.

Depuis la reprise mondiale initiée en 1994, l’Espagne est en plein boom économique. En quelques années, le chômage enregistre une décrue exceptionnelle en passant de 24% - un des plus forts taux de chômage de l’UE-15 - à 12%. Sous l’effet conjugué d’une politique budgétaire restrictive, d’une forte activité et d’un abaissement des taux d’intérêt à long terme, les comptes publics se redressent.

Respectant les critères de Maastricht, l’Espagne rejoint les pays en situation d’adopter l’euro. Le dynamisme de son économie en fait un exemple d’intégration européenne réussie et confirme l’utilité des fonds structurels européens. Pendant près d’une décennie, on cite l’Espagne parmi les « bons élèves » de la classe européenne.

En promettant « le changement tranquille », Zapatero donne le ton de sa politique générale et la méthode de son gouvernement. Sur le plan économique, le gouvernement entend allier dynamisme économique et redistribution sociale. Sur le plan de la méthode, le gouvernement veut impliquer les partenaires sociaux sur tout projet de réformes économiques et sociales d’une part, et négocier avec l’ensemble des partis politiques d’autre part (il n’a qu’une majorité relative).

Le socialisme de Zapatero s’inscrit dans la lignée de la social-démocratie rénovée des années quatre-vingt-dix. Dans un discours prononcé en septembre 2005 à l’occasion d’un colloque sur les politiques progressistes à Londres, il assigne trois objectifs à celles-ci : une plus grande flexibilité des marchés (des biens et services, du travail), un Etat (social) plus dynamique et une meilleure coopération dans la mondialisation.

Mais l’activité économique étant par nature cyclique – les phases de croissance et de ralentissement, d’inégales intensités, se succèdent à intervalles irréguliers – elle commande aux pouvoirs publics d’intervenir à court terme (politique conjoncturelle) et moyen/long terme (politique structurelle). La politique économique d’un Etat n’est jamais seulement déterminée par l’orientation politique des gouvernements en place. Ces derniers doivent nécessairement faire preuve de pragmatisme.

Le pragmatisme étant ici entendu comme le fait de conditionner un type d’actions à une observation et analyse préalable des faits et réalités économiques du moment, on peut distinguer trois périodes dans la politique économique menée par Zapatero depuis 2004, correspondant chacune à une phase économique donnée. Nous allons maintenant analyser plus en détail ces trois phases.

*

2004-2008 : L’expansion. Une politique de redistribution.

Pendant plus d’une décennie, le « miracle » économique espagnol va reposer de fait sur le dynamisme (cumulatif) de quelques secteurs clés : le secteur bancaire et l’accès facile au crédit d’abord, les secteurs de l’immobilier et de la construction ensuite, le secteur du tourisme enfin.

En conséquence de l’adoption de l’Acte unique européen par lequel elle adhère aux Communautés européennes, puis du Traité de Maastricht qui ouvre la voie à l’union économique et monétaire, l’Espagne a entrepris au début des années 90 une restructuration de son secteur bancaire. L’accès au crédit (à la consommation puis immobilier) s’en est trouvé grandement facilité, au profit de l’activité économique.

Le secteur immobilier espagnol (1), et indirectement le secteur de la construction, a bénéficié de l’accès facile au crédit (prêt à taux variable, très attractifs lorsque le taux d’intérêt directeur de la BCE diminue), de la culture patrimoniale des espagnols (l’accès à la propriété constitue le premier pas de l’indépendance des jeunes) et de la spéculation immobilière (le bétonnage des côtes espagnoles en a montré les limites).

Depuis l’accueil des Jeux Olympiques à Barcelone et de l’Exposition Universelle à Séville en 1992, l’image internationale de l’Espagne a profondément changée. Elle a longuement capitalisée sur le slogan « España es diferente » (L’Espagne est différente), sur sa monnaie assez bon marché et ses liens avec l’Amérique latine d’une part, et le pays du Maghreb d’autre part, sources majeures d’immigration.

Dans ce contexte d’économie qui tourne à plein régime – on parle presque alors de surchauffe – la politique économique des socialistes espagnols s’est centrée sur la logique de redistribution :

La redistribution salariale : hausse du SMIC et rôle des négociations collectives.

Laissé à un niveau pratiquement inchangé depuis l’an 2000, le salaire minimum interprofessionnel est passé, sous le premier gouvernement Zapatero, de 460, 50 euros par mois en 2004 à 600 euros en 2008 (il est de 633,30 euros en 2010). Mais en pratique le salaire minimum concerne seulement 3% des salariés espagnols.

A travers les accords nationaux interprofessionnels, la négociation collective a contribué entre 2002 et 2006 (données non trouvées pour la suite) à une amélioration du pouvoir d’achat des salaires de 2,5% par rapport à l’inflation moyenne sur la même période. Toutefois la modération salariale reste de mise.

La redistribution sociale : une protection sociale plus étendue.

Pour soulager les personnes âgées dépendantes et leurs familles, le gouvernement a mis en place un « Plan Dépendance », en partie financé par l’Etat et géré par les Communautés autonomes. Il concernerait 1,2 millions de personnes.

Chaque année pendant quatre ans, le gouvernement socialiste a augmenté le minimum retraite plus que le niveau d’inflation en vigueur, ce qui a amélioré le pouvoir d’achat de plus de 3 millions de retraités.

Une réforme du marché du travail a permis la réduction de 2,5 points du nombre de salariés occupant un emploi à durée déterminée, par l’extension réglementaire des contrats à durée indéterminée. Les indépendants obtiennent les mêmes droits et protections que les salariés.

Pour tout nouveau né, le gouvernement a crée une aide ponctuelle de 2500 euros. Mais le service de la petite enfance est resté sous développé.

La redistribution budgétaire : désendettement et investissement public.

Grâce au retour de la croissance à un rythme élevé et à l’abaissement de la contrainte financière pesant sur l’émission de dette publique avec l’arrivée de l’euro (2), l’Espagne a su réduire sa dette publique (elle représentait en 2008 un peu plus de 30% du PIB) et dégager quelques surplus budgétaires (de 0,5 à 2%).

Conscient des limites du modèle productif espagnol en termes de productivité et de compétitivité, le gouvernement Zapatero s’est employé à augmenter la part des dépenses publiques consacrée à l’éducation, à la recherche et développement (R&D) et aux économies d’énergie, trois secteurs clés pour l’économie de la connaissance.

La gratuité de l’éducation a été votée pour les enfants âgés de 3 à 6 ans et l’accès aux bourses, élargi. L’effort en matière de R&D, regroupé autour d’un Plan Ingénieur 2010, est passé de 2,9 à 7,7 milliards d’euros en quatre ans. Enfin, en matière d’énergie éolienne (qui représenterait 9% de l’énergie consommée), l’Espagne est devenue le leader mondial.

La redistribution fiscale : une baisse des impôts pour les ménages et les entreprises

En conséquence d’une amélioration de l’état des finances publiques, les socialistes espagnols ont pu entreprendre de vastes baisses d’impôts au bénéficie des ménages et des entreprises.

Ainsi, les ménages qui gagnaient moins de 18 000 euros par an ont bénéficié d’une réduction de 17% sur l’impôt sur le revenu. Environ 1,3 millions de personnes à faibles revenus ont cessés de s’acquitter de l’impôt sur le revenu.

Pour les plus aisés, le gouvernement Zapatero a supprimé en fin de législature,  l’impôt sur la fortune. Et pour les entreprises, le taux de l’impôt sur les sociétés a été ramené de 35 à 30% et celui des PME de 25 à 20%.

Mais en dépit des baisses d’impôts, la pression fiscale a augmenté de 34,5 à 35,5% du seul fait de la hausse de la population activité occupée et les répercutions qu’elle implique en matière d’impôts directs (IRPP et cotisations) et indirects (TVA).

*

2008-2009 : La crise. Une politique de relance.

Durant l’été 2007, la crise des subprimes éclate aux Etats-Unis. Elle se propage petit à petit à l’ensemble du système financier international et sonne la fin du boom immobilier d’abord et du crédit facile ensuite. Les actifs toxiques se révèlent progressivement parmi le bilan des banques, les exposants à des risques de liquidité.

En Espagne, la croissance commence à s’essouffler et le chômage repart à la hausse. La situation économique anime une partie des débats à l’occasion des élections législatives en mars 2008. Mais l’exécutif socialiste récuse pendant plusieurs mois le terme de crise, qualifiant le ralentissement économie de simple décélération. De fait la réponse politique à la crise économique alors naissante a été très tardive.

Dans la mesure où l’économie repose sur une composante psychologique, un gouvernement se doit d’user avec modération de sa communication. Il ne doit apparaitre ni trop optimiste, au risque de perdre en crédibilité si l’écart entre l’affichage et la réalité devient trop important, ni trop critique, au risque d’augmenter le doute et l’anxiété. Ceci peut expliquer le refus de dramatiser la situation.

Le manque de réactivité politique peut aussi s’expliquer par la mauvaise appréciation de la crise d’origine américaine. En la cantonnant à une stricte dimension financière, le gouvernement espagnol s’est reposé sur la solidité de son système bancaire pour écarter toute hypothèse de récession. En effet, les règles prudentielles du système espagnol le mettent à l’abri d’une crise de liquidité.

Après la faillite de Lehman-Brothers en septembre et le G20 de Washington auquel a participé l’Espagne, le gouvernement socialiste présente le « Plan Espagnol pour la stimulation de l’économie et de l’emploi » (dit Plan E), censé couvrir les années 2009 et 2010. L’effort budgétaire déployé s’élève à 10,8 points de PIB, soit  le plus important réalisé dans la zone euro, et s’organise en trois axes.

Aides aux ménages et entreprises : soutenir la consommation et l’investissement.

Le développement en Espagne du crédit immobilier à taux variable rend vulnérable les ménages à toute remontée des taux d’intérêts (4). Celle-ci contraint les ménages à consacrer une plus grosse part de leur revenu à rembourser leur prêt immobilier, ce qui pénalise au final la consommation. Afin d’aider les familles à faibles revenus ou ayant perdu leur emploi, le gouvernement a mis sur pied un moratoire partiel des hypothèques (jusqu’à 50% de celles-ci pendant deux ans).

En complément de certaines baisses d’impôts (400 euros pour l’IRPP) intervenues en 2008, le gouvernement a prévu des déductions fiscales pour les familles à faibles revenus. Celles-ci commenceront à recevoir le montant à déduire dans l’IRPP de 2009 par l’intermédiaire d’une baisse mensuelle des rétentions. Trois millions de contribuables sont concernés par cette mesure.

Les PME se voient obtenir un meilleur accès aux financements. L’Institut de Crédit Officiel à destination des PME (ICO-PYME) voit ses capacités augmenter de 3000 millions en 2008 et de 10000 millions en 2009. Les PME pourront bénéficier de ces financement à condition d’y consacrer 60% pour de nouveaux investissements. Les PME amortissant un crédit ICO pourront bénéficier d’un moratoire d’un an pour le paiement du crédit.

Aides à l’emploi : encourager l’embauche, soutenir certains secteurs.

Afin d’encourager l’embauche, le gouvernement a promis une ristourne de 1500 euros annuels sur les cotisations sociales pour toute entreprise qui signerait un contrat stable avec des chômeurs avec d’importantes charges familiales. Les chômeurs souhaitant monter leur entreprise pourront quant à eux recevoir d’un trait 60% de leurs allocations chômage.

Un Fond d’investissement public local doté de 8 000 millions d’euros a été crée afin de financer des ouvrages publics des collectivités locales en matière de construction et aménagement d’espaces publics urbains, de bâtiments publics ou de promotion industrielle, de bâtiments sanitaires, éducatifs ou sportifs, ou d’ouvrages publics.

Enfin, des mesures spécifiques ont été arrêtées dans les secteurs automobiles, de la formation des salariés et l’environnement. Ainsi, comme en France, le secteur automobile reçoit des aides en vue de maintenir l’emploi à court terme, et d’améliorer la compétitivité et l’innovation du secteur (voiture électrique) à long terme.

Aides au système financier : éviter la crise systémique.

Les actions de cette partie du « Plan E » correspondent grosso modo aux mesures retenues et concertées au niveau européen. Les gouvernements doivent garantir le passif des banques en cas de risque de solvabilité.

Les principales mesures de soutien au système financier sont les suivantes :

-      La création d’un Fond pour l’acquisition d’actifs financiers auprès des banques et des caisses d’épargnes (très nombreuses en Espagne)

-      Les nouvelles émissions de dettes des institutions financières sont garanties

-      Les dépôts bancaires sont davantage garantis.

En dépit d’un effort budgétaire conséquent, le plan de relance ne permet pas à l’Espagne de sortir de la récession. Le taux de chômage, qui avait déjà augmenté de 7,6 points entre mai 2008 et avril 2009 (contre 1,9 point pour la zone euro), atteint les 20% fin 2009.

Les destructions d’emplois continuent dans les secteurs de la construction et des industries. La demande interne est complètement déprimée : baisse de la consommation du fait du chômage et du resserrement du crédit, report des investissements privés du fait de la conjoncture, faiblesse des exportations du fait d’un manque de compétitivité et de la hausse de l’euro.

*

2010 : Le tournant de la rigueur. Une politique d’austérité.

Après un changement de gouvernement intervenu en avril 2009, Zapatero présente en décembre au Parlement un projet de loi intitulé « loi pour l’économie durable ». Il s’agit moins d’un second plan de relance que de réformes d’ordres structurelles. Celles-ci concernent la Justice, l’Administration, le système bancaire, la lutte contre la fraude fiscale, l’innovation, l’environnement, la politique industrielle, l’éducation, la santé et la protection sociale.

Le projet s’apparente à une forme de révision générale des politiques publiques dont l’objectif final est de réorienter l’écosystème de croissance espagnol sur les secteurs à haute valeur ajoutée (NTIC, bio et nanotechnologies) et la croissance verte (4). Cela passe par une réforme de l’environnement juridique, social et fiscal d’une part, et un effort en termes d’investissements (d’innovation, de production, de formation du personnel) d’autre part.

Mais l’irruption de la crise grecque au premier semestre 2010 a conduit l’Europe à adopter dans l’urgence des politiques de réductions des déficits publics, au risque de pénaliser la timide reprise de l’activité. Les principales Agences de notation ayant baissé la note de solidité financière de l’Espagne (elle est passée d’AAA à AA), renchérissant ses nouvelles émissions obligataires et donc le coût de l’endettement, le gouvernement Zapatero a annoncé le 12 mai dernier, l’adoption d’un vaste plan de rigueur.

Il convient de préciser que l’appréciation des Agences des notations sur la solvabilité d’un pays ne porte pas exclusivement sur l’état de ses finances publiques. Sur ce seul sujet, en dépit d’une augmentation rapide de sa quantité de dette publique (+ 20 points en trois ans), l’Espagne reste en meilleure posture que la France, l’Italie ou le Royaume-Uni. En réalité, les doutes sur la solvabilité de l’économie espagnole porte sur le montant de la dette privée (ménages et entreprises).

Afin de rassurer les Agences de notation et les institutions communautaires (Commission, Ecofin), le gouvernement Zapatero s’est donc engagé à ramener le déficit public de à 11,2% à 9,8% du PIB dès cette année, soit un effort budgétaire de 15 milliards d’euros sur deux ans. Le plan de rigueur s’accompagne d’une réforme du marché du travail visant à plus de flexibilité.

Réduction drastique des dépenses publiques.

Traditionnellement, on définit les dépenses publiques comme la somme des dépenses d’investissements, des dépenses de fonctionnement, des dépenses en personnel et des dépenses sociales. Le gouvernement socialiste a souhaité agir sur chaque levier de dépenses.

Le traitement des agents publics est réduit en moyenne de 5% (l’effort demandé étant proportionnel aux revenus.), en contradiction de l’accord signé l’année d’avant avec les partenaires sociaux. Le gouvernement entend montrer l’exemple en diminuant de 15% le traitement de chaque ministre.

Les dépenses d’investissements publics sont réduites de 6 milliards d’euros entre 2010 et 2011. Les collectivités locales n’échappent pas à l’effort collectif puisqu’il leur est demandé d’économiser 1,2 milliards d’euros. Enfin, l’aide au développement, fortement augmenté sous la précédente législature, est amputé de 600 millions d’euros.

En matière de dépenses sociales, le remboursement des médicaments sera moins bien assuré et l’aide dont bénéficiaient les personnes dépendantes sera moins généreuse (fin de la rétroactivité des droits). Enfin, à l’exception des retraites non contributives et des retraites minima, les pensions ne seront pas revalorisées.

Relèvement des prélèvements obligatoires.

Le gouvernement revient sur une partie des baisses d’impôts qu’il a réalisé les années précédentes. Ainsi, le « chèque-bébé » de 2500 euros par nouveau né est supprimé. Il en va de même de la réduction de 400 euros sur l’IRPP mis en place durant l’année 2008, à l’exception des plus bas revenus.

Le taux de l’IRPP pour les plus gros revenus sera augmenté dans le budget 2011 quand la fiscalité sur l’épargne est sensiblement modifiée, et la déduction fiscale pour l’achat d’un logement, supprimé.

La fiscalité indirecte ayant la vertu d’être politiquement indolore et financièrement intéressante pour l’Etat, les taux normal et réduit de TVA ont été relevés au 1er juillet 2010.

Petite exception dans cette tendance à la hausse des prélèvements obligatoires, le taux de l’impôt sur les sociétés est à nouveau réduit pour les PME qui maintiennent ou créent des emplois.

Réforme du marché du travail et du système de retraite.

Le marché du travail espagnol se caractérise par une forte dualité entre des emplois stables (CDI) et des emplois temporaires (CDD). Les réformes de 1988 avec Felipe Gonzalez et de 2002 avec Aznar ont semble-t-il largement facilité le recours aux CDD et autres contrats dérogatoires (manque d’informations à ce sujet).

Mais le marché du travail semble également marqué par une flexibilité asymétrique : le marché apparait plus réactif à la baisse de l’activité économique qu’à la reprise. Autrement dit, lorsque l’activité diminue cela se traduit rapidement par du chômage supplémentaire, mais lorsque la croissance reprend, la création d’emploi tarde à venir.

Ce sont ces deux caractéristiques que le gouvernement Zapatero a souhaité réviser en soumettant le sujet à la négociation des partenaires sociaux :

Pour limiter le recours aux licenciements, le gouvernement souhaite importer le modèle allemand de réduction du temps de travail : au lieu de licencier lorsque l’activité diminue, l’entreprise a la possibilité de réduire le temps de travail de ses salariés, dont le différentiel de salaire est pris en charge par les pouvoirs publics.

Mais le vrai sujet de discorde à l’origine de la rupture entre le gouvernement et les syndicats (5) est l’adoption par la loi de la réduction de l’indemnité de licenciement auquel à droit tout salarié, au prorata de sa durée d’activité dans l’entreprise. C’était une revendication du patronat espagnol depuis le début de la crise. La réforme est entrée en vigueur récemment.

La réforme du système de retraite n’est qu’un projet à l’heure actuelle. L’âge légal de départ à la retraite à taux plein est de 65 ans. La durée de cotisation est de 15 ans minimum et de 35 ans pour une retraite à taux plein. Le gouvernement souhaite relever l’âge minimum à 67 ans et augmenter le nombre d’années minimum de cotisation à 25 ans.

Il est à noter que l’Espagne a un des plus faibles taux de fécondité de l’Union européenne, ce qui laisse supposer à moyen/long terme un plus lourd déséquilibre démographique qu’ailleurs. Toutefois l’Espagne, à l’image d’autres pays, dispose d’un Fond de réserve des retraites bien mieux doté qu’en France.

Dernièrement, parce que moins exposé à la pression des marchés, le gouvernement a souhaité assouplir – très marginalement ceci dit – le plan de rigueur présenté en mai dernier. Ainsi les investissements publics (grands travaux essentiellement) seront un peu moins touchés par les coupes budgétaires que ce qui était prévu jusqu’ici.

Notes :

(1) En 2005, on comptabilisait plus de lancements de constructions de logements (souvent des maisons secondaires) en Espagne qu’en France, Allemagne et Grande-Bretagne réunies.

(2) Depuis la création de l’euro et jusqu’à cette année, et par ailleurs sous l’effet du Pacte de Solidarité et de Croissance qui garantie une relative convergence dans la trajectoire des finances publiques des Etats membres, de nombreux Etats ont bénéficiés de la faible prime de risque de l’Allemagne pour s’endetter à un taux d’intérêt très intéressant.

(3) Entre 2005 et juillet 2008, le taux directeur de la BCE a été relevé de 2 points. Avec la crise, la BCE a assouplie sa politique monétaire. Le taux est redescendu à 1%.

(4) Sur ce dernier point, un Fond d’économie durable a été crée. Doté de 20 milliards d’euros pour la période 2010 -2011, il doit financer les dépenses R&D, l’innovation, et le fond public pour achat de crédit carbone.

(5) Marqué par le divorce survenu en 1988 entre les syndicats (UGT en tête, proche des socialistes) et Felipe Gonzalez (alors Président du Gouvernement), Zapatero (jeune député à l’époque) a toujours cherché l’appui des syndicats dans les réformes qu’il a mené depuis son arrivé au pouvoir.

Sources: 

-      A more dynamic welfare state for a more dynamic Europe, JL.R. Zapatero

-      Examen a Zapatero, Philip Pettit

-      Spanish Steps : Zapatero and the Second Transition in Spain, David Mathieson

-      Pourquoi il faut partager les revenus, Patrick Artus, Marie-Paule Virard

-      Plan Español para el estimulo de la economia y del empleo

 

18 septembre 2010

Petite révolution cubaine

Ces dernières semaines, quelques dépêches concernant Cuba laissent apparaitre les changements qui touchent le régime et l’économie castriste, en place depuis 1959, initiés par Raul Castro depuis son arrivé en 2008.

Face aux difficultés économiques et financières que traverse l’île depuis 1991 (au moins) et aux pressions politiques autant internes (contestations) qu’internationales (blocus américaine, pression européenne), Raul Castro a lancé quelques timides réformes.

Citons parmi celles-ci, la distribution de certaines terres agricoles aux paysans, l’abandon de l’égalitarisme salarial, l’assouplissement des règles de circulation des cubains vers l’étranger, la possibilité d’accéder à internet et autres produits de consommation (ordinateurs, scooters), et la libération de prisonniers politiques.

Et là, après avoir lu Fidel Castro admettre dans un entretien que le modèle cubain ne marchait même pas pour ses habitants (avant toutefois de se rétracter), on apprend que le régime entend licencier 500 000 fonctionnaires (sur 5 millions) et développer le secteur privé (occupant actuellement 590 000 personnes).

Si on peut supposer que la réforme sera progressive et limitée, cela reste tout de même un symbole : un des derniers bastions communistes au monde prépare sa conversion à l’économie de marché. J’entends déjà quelques néolibéraux bien suffisants clamer la victoire définitive du capitalisme, amalgamant au passage « économie administrée » et « gestion socialiste de l’économie de marché ».

La survie du régime castriste presque 20 ans après la fin de l’URSS, qui lui apportait une aide financière et matérielle conséquente, malgré un embargo économique des Etats-Unis qui lui prive l’accès à biens des ressources, relève pourtant de l’exploit. Je me demande d’ailleurs si des économistes et des sociologues ont déjà pensé à étudier cette « économie de la débrouille », ces stratégies d’adaptations et de survie.

Reste aujourd’hui à savoir si ces réformes économiques traduisent un début, même embryonnaire, de transition politique ou une simple fuite en avant de la part des responsables cubains.

En sciences politiques, on admet au moins trois modèles de transition politique :

-      Une transition de rupture, regroupant les opposants radicaux et modérés d’un régime donné. C’est le cas du Portugal en 1975 ou de Cuba en 1959.

-      Une transition négociée, menée par l’opposition modérée et les réformateurs du vieux régime. C’est le cas de la Transition espagnole, pactée par l'ex franquiste Adolf Suarez et les socialistes alors mené par Felipe Gonzalez.

-      Une transition contrôlée, aux seules mains de réformateurs du régime qui doivent ménager les « durs » du régime. C’est le cas du Chili vers la fin de l'ère Pinochet.

Pour l’instant, Raul Castro semble plus s’inspirer de Deng Xiaoping, le dirigeant chinois qui a ouvert la Chine à l’économie de marché, que de Gorbatchev, qui lui avait tenté de réformer économiquement et politiquement l’URSS. On peut tout à fait imaginer, à moyen et long terme, un régime cubain économiquement libéral et politiquement autoritaire. Et je suis persuadé qu’une telle situation recevrait l’appui des autorités américaines. L’inconnu resterait alors le rôle de la communauté cubaine en Amérique.

ERRATUM: un site intéressant sur la situation cubaine vu par les opposants du régime (dont les socialistes démocratiques), par contre c'est qu'en espagnol. http://partidoarcoprogresista.org/fr/

06 juin 2009

Pour l'Europe

 

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Tribune de Felipe González,

ancien Président du Gouvernement espagnol,

en vue des élections européennes.


(version originale ici)


J’ai toujours pensé que le destin de l’Espagne était de s’intégrer à ce qu’aujourd’hui, suite au Traité que nous avons négociés il y a 20 ans de cela, nous appelons l’Union Européenne. J’étais et je suis un européen européiste, une chose qui transcende certaines positions idéologiques déterminées, mais qui imprègne l’immense majorité du courant social-démocrate européen. Européens nous le sommes tous, mais européistes nous le sommes moins, il semble même qu’on le soit chaque fois moins.


Nous autres espagnols, sommes européens avec les mêmes droits et devoirs que les autres composants de l’Union depuis le 1er janvier 1986, lorsque nous avons intégrés la Communauté européenne. A l’intérieur de notre pays, l’élan intégrateur fut très grand, même s’il semble qu’il nous quitte lorsque nous en avons le plus besoin.


Les européistes sont les européens qui croient en l’Union européenne comme espace public partagé par les pays membres. Quelque chose de plus, encore que c’est déjà important, qu’un espace de marché unique ou qu’une monnaie commune. C’est ce qui nous permet d’avancer vers une forme de citoyenneté partagée, compatible avec celle de chaque Etat-nation.


Si cela fut, lorsque nous luttions pour cesser d’être les sujets d’une dictature qui nous éloignait du destin commun de l’Europe des libertés et de la justice sociale, cela devrait l’être encore plus aujourd’hui, contre les courants des nationalismes conservateurs et anti-européens qui paraissent dominer la scène, en freinant la constructions d’une Europe capable d’affronter, unie, les grands défis de la mondialisation.


C’est pour cela que le compromis d’alors, qui m’amena à lutter pour briser les barrières qui nous séparaient et à être l’un des plus actifs dans la construction d’une Europe plus intégrée, plus solidaire, plus politique, plus significative pour ses citoyens et pour le monde, s’est renforcé aujourd’hui face à la crise et à la récession mondiale que nous sommes en train de vivre. Il s’est renforcé depuis la connaissance rationnelle des défis globaux auxquels nous nous confrontons. Avec l’Europe nous pouvons faire des choses très importantes, sans elle, nous serions insignifiants dans le contexte mondial. Cela vaut pour nous mais aussi pour les autres pays de l’Union, qu’ils soient grands, moyens ou petits.


C’est pour cela que je participe à la campagne électorale pour le Parlement Européen, en expliquant son importance, biaisée par (un griterio) vide de sens, chargée de lieux communs et de démagogies locales.


On continue de voir l’Europe comme quelques chose d’étranger et d’éloigné, et non comme une chose nous appartenant, et qui conditionne notre destin, pour le meilleur lorsque se font les choses qui doivent se faire, ou pour le pire, lorsqu’on renonce à utiliser l’unique grand instrument que nous disposons pour faire face à la crise financière globale, à la récession mondiale, ou aux défis comme l’énergie et le changement climatique, comme le passage d’une société industrielle à une société basé sur la connaissance à laquelle il faudra adapter notre cohésion sociale. Ou encore pour affronter des problèmes et des besoins comme la régulation des flux migratoires. Ou enfin pour affronter le défi de la criminalité organisée et du terrorisme international.


Domine aujourd’hui la nouvelle de la faillite de General Motors, icône nord-américain et mondial de l’industrie la plus représentative de l’ère industrielle. Nous voyons sa répercussion européenne et nous assistons à ce phénomène comme à quelque chose qui nous affecte, mais sans le mettre en relation aux élections du 7 juin, avec les possibilités et les difficultés de l’Europe. Comment peut on garder cette cécité localo-locale dans le débat ? Des milliers d’emplois sont en jeu, le futur d’une industrie, qui avec d’autres, ont été l’essence du modèle européen de développement et de bien être social comme puissance industrielle. Ici nous discutons des mesures d’aide du Gouvernement et nous dispersons, dans certaines Communautés autonomes, l’effort nécessaire. Il devrait être européen, mais nous ne le concevons même pas comme un effort national. Quelle absurde conception des problèmes !


A l’exemple de sa voisine américaine, l’industrie automobile européenne devra s’interroger sur sa capacité à faire face à la concurrence sur la scène mondiale, sinon les aides resteront du pain pour aujourd’hui en attendant la faim du lendemain, à la charge du contribuable. Ce n’est pas un défi auquel l’Espagne peut faire face en tant que pays. Ni la France, ni l’Allemagne, ni l’Italie. Il faut que l’Europe s’en occupe, comme tentent de le faire les Etats-Unis. De la même manière, il lui revient d’appréhender la crise financière et les normes de contrôle du système et des entités. Il doit y avoir un cadre régulateur européen, pour des entités qui travaillent dans toute l’Europe, et dans le monde. Par ailleurs, il faut négocier ce cadre de régulation avec les autres : les Etats-Unis, le Japon, la Chine, le Brésil, le Mexique etc. Dans le cas contraire, à peine sortie de cette crise, nous serons en trains de préparer la suivante.


L’Europe dépend des énergies fossiles dans un pourcentage voisin à celui des Etats-Unis et a contribué au changement climatique en raison de l’usage et de la consommation de ces dernières. Est-il possible de rester chaque pays de son coté, au moment d’élaborer une stratégie énergétique qui soit respectée, qui induise un nouveau modèle de production et de consommation, qui nous donne un avantage dans la lutte contre le changement climatique ?


Nous pourrions continuer avec tout type de problème, de défis que nous avons à affronter mais nous nous croiserions toujours l’espace européen comme une nécessité pour articuler les stratégies à succès : migrations, sécurité, politique extérieure…


Le Parlement européen co-légifère pour nous tous dans les 70% des normes qui nous affectent. Son pouvoir budgétaire et législatif va augmenter. Nous devons décider si les majorités qui les intègrent seront en faveur de l’Union européenne avec des objectifs qui conditionne notre future, ou en seront opposés, avec des politiques moins européennes et plus nationalistes.


Le vote pèse pour orienter la sortie de crise, pour atteindre un Parlement capable de faire des propositions de dialogue social, économique et politique qui nous rapprochent des accords dont nous avons besoins dans les domaines que j’ai déjà mentionné. Quel domage que nous ne soyons pas capable de créer une conscience citoyenne pour que tout le monde ait envie de voter. Et décider du destin de l’Europe qui est le notre !