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13 juin 2013

Débat sur la TVA sociale

Pour enrayer la perte de compétitivité des entreprises françaises, de nombreux responsables politiques (plutôt de droite, mais pas seulement) et économiques (PDG, journalistes, économistes) défendent avec force, la piste d’une TVA dite « sociale » (parfois encore appelée « anti-délocalisation »).

En faisant basculer une partie des cotisations sociales (part patronale et/ou part salariale), à la charge de l’entreprise, vers la TVA, impôt grevant la consommation, les biens et services produits en France regagneraient en compétitivité par rapport aux biens importés, non bénéficiaires des baisses de cotisations.

Ecartons la polémique sur le caractère « social » du dispositif. La TVA n’est pas un impôt redistributif car elle ne tient pas compte des capacités de revenus de chacun. Une étude du Conseil des Prélèvements Obligatoires a montré que les plus modestes supportaient, en proportion de leurs revenus, plus de TVA que les plus aisés.

La TVA est dite « sociale » parce qu’elle renvoie à la problématique du financement de la protection sociale. Assis à 70% sur les cotisations sociales - donc sur le travail - le financement de la protection sociale tend à se « fiscaliser » depuis la création de la CSG, de la CRDS et autres impôts et taxes.

Rappelons en outre que la TVA représente aujourd’hui près de 50% des recettes fiscales de l’Etat – c’est un impôt terriblement efficace car « indolore » et assis sur un base très large – et qu’un point de TVA en plus rapporte en moyenne entre 5 et 7 milliards d’euros supplémentaires.

Tout ceci étant posé, voici les trois raisons qui m’amènent à rejeter cette mesure :

Une mesure non coopérative au niveau européen.

Même si nous parlons beaucoup des pays émergents, l’essentiel de nos échanges commerciaux se font avec nos partenaires européens. L’adoption d’une monnaie unique prive les pays du taux de change comme outil de politique économique et de régulation interne (les fameuses dévaluations).

La TVA sociale apparait dès lors comme une forme de désinflation compétitive. On fait payer nos gains de compétitivité à nos voisins européens. C’est donc une forme de jeu à somme nulle et de concurrence fiscale, surtout si le dispositif est généralisé. Or le problème de compétitivité (hors coût) reste entier.

Une mesure mal calibrée à deux niveaux.

La TVA sociale entend jouer sur le coût du travail, jugé trop élevé en France, donc sur la compétitivité-prix. Mais face aux pays émergents qui disposent d’une main d’œuvre bon marché, le gain d’une telle mesure ne rendra jamais la main d’œuvre française suffisamment compétitive et attractive.

A l’heure de la mondialisation, le prix du travail est une donnée comme une autre pour la compétitivité des entreprises. Or la TVA sociale aidera autant les entreprises exposées à la concurrence que celles exerçant des activités peu délocalisables et peu soumises à la concurrence extérieure. Pourquoi aider ces dernières ?

La TVA sociale, le risque d’un « fusil à un coup ».

La TVA est un des rares impôts qui soit harmonisé au niveau européen. Différentes directives sont venues uniformiser les bases de la TVA et encadrer ses taux. Le taux normal peut ainsi varier en 15 et 25. Autant dire qu’avec un taux normal de 19,6% (relevé à 20% en 2014), la France ne dispose plus trop de marges de manœuvres.

Pour créer un choc de compétitivité, le taux de TVA devra suffisamment augmenter pour couvrir le transfert des charges des entreprises vers le consommateur, sans que la consommation s’en trouve trop pénalisée (et donc la croissance). L’augmentation espérée des marges des entreprises suffira-t-elle à améliorer leur compétitivité hors-prix ?

L’expérience allemande a justement montré que les effets de la TVA sociale s’estompaient avec le temps. Les hausses des prix finissent par être répercutés dans l’évolution des salaires. Le risque est donc grand que l’Etat brule en pure perte ses quelques cartouches.

23:34 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie, europe

31 décembre 2012

"Taxer" les CDD: l'exemple Monti

Dans le cadre des négociations actuelles entre les partenaires sociaux pour une  réforme du marché du travail (avec l'objectif d'introduire une flexi-sécurité à la française), le principe d’une « taxe » (i.e cotisations sociales accrues) sur les CDD, avancé par les syndicats et le gouvernement, est rejeté fermement par le patronat. Ce serait une des raisons pour lesquelles aucun accord n’a été trouvé.

Alors que le MEDEF et les média économiques (LesEchos) appellent Hollande à s’inspirer de Schroder en Allemagne ou de Monti en Italie, que ce soit pour réformer le marché du travail ou réduire les dépenses publiques, j’apprends par Natixis (note du 21 décembre 2012) que la réforme Monti prévoit des cotisations supplémentaires pour les CDD afin d’encourager l’emploi stable.

 

Extraits de la note de Natixis

« Le Parlement italien a approuvé le 27 juin 2012 une réforme du marché du travail afin de soutenir la productivité, la croissance et l'emploi. Le projet repose sur la réorganisation des contrats de travail et de la couverture sociale.

Le nombre de types de contrats est réduit de 46 à 8 ; le recours à l’apprentissage est encouragé par une exemption de charges sociales, tandis que les contrats à durée déterminée supporteront un taux de cotisation sociale auprès de l’Aspi (assurance sociale pour l’emploi) deux fois plus important que celui adossé aux CDI (2,7% contre 1,3%) afin de développer l’emploi stable.

Une fraction beaucoup plus importante de la main-d'oeuvre sera désormais couverte par l'assurance-chômage en cas de perte d'emploi. Bien que la durée des prestations sera allongée pour la plupart des travailleurs (12 mois pour les moins de 55 ans, 18 mois pour les travailleurs plus âgés) d'autres, qui avaient auparavant droit à des durées plus longues, souvent utilisées pour combler l'écart entre la perte d'emploi et la retraite, verront potentiellement leur couverture réduite.

La réforme introduit une procédure au niveau local pour gérer les licenciements contestés pour des raisons objectives, économiques ou autres. Si la conciliation échoue, le travailleur peut porter l'affaire devant un juge, comme en France, en Allemagne ou dans d'autres pays. Ce n'est que lorsque des raisons objectives, économiques ou autres pour licenciement auront été considérées comme «manifestement inexistantes», qu’un juge pourra décider de la réintégration de l’employé, assortie d’une compensation pouvant aller jusqu’à 24 mois de salaires ».

 

Je mets de côté la réforme des procédures de licenciement, ne connaissant pas le droit de travail italien. J’aurai tendance à dire que la position adoptée, telle que succinctement développée ci-dessus, ne semble pas si éloignée des procédures françaises.

La réduction du nombre de CDD s’apparente à ce projet d’aller vers un contrat de travail unique avec des droits progressifs. La multiplication de type de CDD montre la limite d’une trop grande flexibilité sectorielle, exigée depuis le milieu des années 80.

Le reste, pénalisation des CDD et meilleure couverture sociale des travailleurs employés dans ce type de contrat, ressemble beaucoup aux modalités souhaitées en France, et en cours de négociation. Alors, s’inspirer de Mario Monti ? Chiche.

15:29 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie

25 juin 2012

Brèves d'actualités

L’agenda politique.

Le président et gouvernement précédent multipliait les annonces de réformes à tout va, surtout en début de mandat. Il ouvrait souvent plusieurs dossiers lourds et épineux en même temps afin que, lorsque la contestation syndicale ou autre l’imposait, il puisse en retirer certains pour mieux en faire passer de l’autre.

Pour l’instant, si l’on excepte l’annonce officielle de certaines mesures symboliques, la nouvelle équipe communique peu. Elle prépare les grands dossiers à venir : le collectif budgétaire et la conférence sociale en juillet, la programmation budgétaire 2013-2015 et la loi de finances 2013 en octobre.

On assiste à la multiplication de rumeurs et autres informations informelles, que ce soit pour annoncer un plan d’austérité sévère, une hausse du SMIC moins important que prévue, ou que les plafonds du livret A ne seraient peut être pas doublé finalement.

Est-ce que cela relève d’une stratégie de communication du gouvernement ? Genre, on infuse l’info par petites touches pour voir les réactions puis confirmer ou recadrer ensuite. Ou alors c’est des gens du ministère ou du cabinet qui ont vendu la mèche, c’est alors plus problématique et il convient de recadrer les choses.

SMIC Jeunes.

Dans Les Echos, Jean-Francis Pécresse plaide pour l’instauration d’un SMIC jeune, qui est d’après lui indirectement introduit dans la législation française par le biais de l’apprentissage, pour ne plus pénaliser l’embauche des jeunes et a fortiori ceux sans grandes qualifications.

Depuis les années 80, on multiplie les types de contrat de travail en particulier ceux à durée déterminée, au nom de la flexibilité, au nom de la lutte contre le chômage, au nom de la compétitivité etc. Jugeant cette réglementation trop complexe, certains prônent un contrat unique, fusionnant CDI et CDD.

Aussi, entendre de la part de ces promoteurs du contrat unique qu’il faille créer un salaire différentiel alors qu’ils sont les premiers à insister sur la réglementation trop complexe, me semble un peu contradictoire.

Coup de pouce : le SMIC ou le RSA ?

Le SMIC devrait être revalorisé de 2% au 1er juillet, avec un coup de pouce de 0,6%. Une hausse très modeste pour avoir un quelconque effet sur la consommation. Une mesure qui impacte les entreprises au moment où leurs marges sont dites exigües et les finances publiques avec la prise en charge des exonérations/ réductions de charge à haute de x% du SMIC.

C’est dans ce contexte que Martin Hirsch a proposé la revalorisation du RSA (activité), plus à même de soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs pauvres ou à faibles revenus, souvent les salariés à temps partiel et les femmes, et faciliter le retour à l’emploi. Le gouvernement ne semble pas avoir retenu cette option.

En fait la sortie de Hirsch m’a fait réaliser que le PS reste assez silencieux sur le thème du RSA. Hirsch souhaitait que cette allocation se substitue à de nombreuses autres allocations or elle s’est limitée à fusionner le RMI et l’API. J’ignore où ça a bloqué. Certains ont également suggérer de fusionner RSA et PPE. Quelles seront les positions du gouvernement sur ce sujet ?

23:25 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie

19 juin 2012

Place à l’action

Le temps des élections est passé. On va maintenant pouvoir revenir à un rythme de vie (politique) plus normal. Cela fait plus de six mois que nous sommes mobilisés/ accaparées par les élections : les primaires citoyennes en octobre, la présidentielle en avril et en mai, les législatives en juin. Et pour le militant que je suis, chaque scrutin suppose tractage, sortie au marché, participation au bureau de vote etc.

Plus important cette fois, François Hollande et Jean-Marc Ayrault disposent à présent d’une large majorité parlementaire. Ils vont pouvoir engager les réformes promises durant la présidentielle, et gouverner vraiment. En effet, ce laps de temps qui sépare l’entrée en fonction du président puis du gouvernement et la mise en place de la nouvelle assemblée, cantonne l’exécutif aux mesures règlementaires et symboliques.

Les choses sérieuses vont pouvoir commencer. Et déjà les difficultés et les urgences s’accumulent. La crise européenne crée beaucoup d’incertitude. Le ralentissement de l’activité économique fait grimper le chômage et complique l’exécution du budget 2012. Sans compter que l’audit de la Cour des comptes laisse entrevoir une situation des finances publiques plus dégradée qu’annoncée.

Le gouvernement n’est toutefois pas sans projet. Sa réforme fiscale (paramétrique ou globale) vise le redressement des comptes publics, plus de justice sociale et une réorientation de l’économie (économie verte, réinvestissement). La banque publique d’industrie est un autre moyen de stimuler l’économie en accompagnant le développement des PMI-PME. D’autres réformes de structures sont prévues.

Une bonne partie de la sortie de crise dépend des choix européens. Gageons que le sommet européen de la semaine prochaine introduise plus de croissance dans la politique économique de l’Union. En France, le collectif budgétaire du mois prochain et la loi de finance de l’an prochain (voté à l’automne) seront deux occasions de saisir plus en détail la gestion de crise de la nouvelle majorité.

27 mai 2012

Une nouvelle présidence

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Le 6 Mai.

Quelques jours avant le vote du second tour, je disais à des amis que le score des deux finalistes serait plus serré qu’on ne le pense. Puis, à la vue des derniers sondages et des premières estimations publiés à l’étranger le jour J en fin d’après midi, je m’étais mis à espérer une victoire plus nette de François Hollande. Le résultat est net mais on voit bien que la France reste un pays ancré à droite.

J’ai passé une partie de la journée au bureau de vote. Une fois le résultat annoncé au 20h, mon secrétaire de section a invité quelques camarades à venir boire le champagne chez lui. J’ai lu beaucoup de joie et de soulagement sur les visages ce soir là. Beaucoup de mes camarades avaient en mémoire le soir du 10 Mai 1981 et désespéraient de ne pas revivre cela.

L’investiture.

Grand rituel républicain que la passation des pouvoirs entre le président sortant et le nouvel élu. Ce dernier est décoré Grand Maitre de la Légion d’Honneur, puis « adoubé » par le Président du Conseil Constitutionnel, garant du bon déroulement de l’élection présidentielle, qui rappelle les résultats définitifs du scrutin et les obligations constitutionnelles du nouveau président.

Le nouveau président fait son premier discours devant un parterre de parlementaires, de droite et de gauche, accompagné par les présidents des deux chambres du Parlement. Vingt et un coups de canon, jadis annonçant la mort du Roi, symbolise l’entrée en fonction du nouvel élu, 7ème président sous la Vème République et 24ème président toute République confondue.

Le choix du Premier Ministre.

Le choix du Premier Ministre dépend souvent du contexte politique dans lequel s’inscrit l’élection présidentielle, parfois de la nature des relations entre le Président et celui qu’il veut nommer à Matignon. Giscard avait nommé Chirac pour le remercier de son soutien en 1974, Mitterrand avait nommé Rocard en 1988 parce qu’il représentait le mieux l’ouverture etc.

Jean-Marc Ayrault, Martine Aubry, Manuel Valls ou Pierre Moscovici étaient pressentis pour occuper le poste de Premier Ministre. Au regard du message de rassemblement porté par Hollande durant la campagne et du score plutôt resserré du second tour, le choix d’Ayrault était sans doute le meilleur. Aubry est trop clivante, Moscovici trop techno et Valls trop « bleu ».

Le gouvernement Ayrault 1.

Le lendemain de sa nomination, Jean-Marc Ayrault a présenté la composition de son premier gouvernement qui sera en fonction jusqu’aux élections législatives au moins, puisqu’il est de coutume que le Premier Ministre présente sa démission au Président après le renouvellement de la chambre basse du Parlement.

Conformément aux engagements du candidat Hollande, le gouvernement Ayrault est paritaire (une première en France), représentatif de la diversité (« les minorités visibles »), avec des jeunes et des moins jeunes, et un équilibre subtil entre des gens « expérimentés » (Moscovici, Sapin, Fabius etc.) et le nécessaire renouvellement des têtes.

Comme promis la rémunération des ministres et du Président a été réduite de 30% et chaque ministre doit signer et s’engager à respecter une Charte de déontologie, visant à écarter les conflits d’intérêts. On pourra regretter un gouvernement un peu « pléthorique » avec des Ministres délégués qui auraient pu être de simples Secrétaires d’Etat et des répartitions de compétences et dénominations ministérielles un peu surprenante (redressement productif, la réussite éducative etc.)

L’Europe.

Habituellement, les commentateurs politiques (éditorialistes, journalistes, experts) regrettent de voir les questions européennes et internationales si peu présentes dans la campagne présidentielle. Sans être au cœur du débat présidentiel, l’Europe a cette fois ci été citée par les principaux candidats et en particulier par le nouveau Chef de l’Etat.

Le soir même de son investiture, François Hollande a fait son premier déplacement officiel à l’étranger en Allemagne, afin d’y rencontrer Angela Merkel qui avait refusé de le recevoir durant la campagne. Les deux s’opposant sur le nouveau pacte de stabilité et sur la politique de croissance à mener en Europe, le bras de fer européen ne fait que commencer.

Quand Hollande demandait en janvier une renégociation du pacte de stabilité afin de le compléter par des mesures de croissance (euro-obligations, projets-obligation, fonds structurels, augmenter la capacité de la Banque Européenne d’Investissement), Sarkozy et quelques chefs de gouvernement s’étaient foutu de sa gueule.

Quatre mois après, l’Angleterre et l’Italie s’enfoncent dans la récession malgré (ou en raison) des politiques d’austérité, l’Espagne voit ses taux d’intérêts augmenter et son système bancaire fragilisé menace de la faire tomber, et la Grèce est dans l’impasse politique depuis les dernières élections.

Chacun comprends que sans retour de la croissance, et malgré des plans de rigueur, la réduction de la dette et des déficits publics n’est pas possible. Même si tous ne sont pas sur la même ligne quant à la politique de croissance à mener, les positions des gouvernements européens tendent à converger.

De manière un peu paradoxale, François Hollande est aujourd’hui en situation de faire bouger les lignes européennes, jusqu’ici dominées par les positions allemandes. On peut d’ors et déjà écarter le scénario d’une « Europe à la française », institutions européennes obligent, mais de cette bataille dépendra la mise en œuvre et le succès du projet de François Hollande en France.