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12 octobre 2009

Séquence parisienne (2)

Deuxième visite sur Paris pour une semaine de concours. Du même niveau de réputation et de difficulté que le précédent examen, l’examen se compose de cinq épreuves : quatre dissertations et une note de synthèse. J’en suis sorti globalement satisfait.

Les sujets m’ont paru abordables mais diversement stimulants. Alors que le sujet de culture générale (liberté et espace public) me paraissait trop nous enfermer dans sa dimension juridique, je me suis éclaté, voir même épaté, en économie, dont le sujet était consacré à la crise mondiale.

Plus alerte face aux sujets et plus à l’aise dans la rédaction qu’il y a un mois, j’ai également mieux géré mon temps, qui reste un de mes principaux problèmes. Les correcteurs pourront ainsi juger un devoir complet, et moi voir dans les notes qu’ils me donneront, un moyen de mieux m’évaluer.

Malheureusement je me suis bien planté pour l’épreuve sur dossier. C’est un type d’épreuve que j’ai découvert cette année, sans aucun cours de méthode et avec peu de pratiques (cinq à six sujets d’entrainement en comptant les deux derniers concours), et que je maitrise encore bien mal. J’ai tendance à me perdre dans les détails quand il faut aller à l’essentiel.

*

Lors du concours, j’ai croisé trois filles de ma promo. C’est toujours un plaisir de voir des têtes familières dans une masse de visages. Ca l’est beaucoup moins quand on se rend compte qu’on ne connait pas ton nom et/ou qu’on tarde à te reconnaitre.

Je trouve hallucinant de passer un an ensemble en classe, dans des cours en petit comité entre 15 et 30 personnes avec des exposés réguliers et des échanges d’informations par mails, sans apprendre au minimum les noms de tes collègues.

Certes nous n’avons pas fait de soirées pour mieux nous connaitre, certes nous n’avions pas d’affinités particulières dans les discussions à la pause, certes je dois arrêter d’être égocentrique, mais je trouve cela significatif de l’ambiance bien peu collective qui animait ma promo de l’an dernier.

Bien sur, ce que je dis là ne concerne pas L. qui m’a reconnu parce qu’on se connait depuis la deuxième année et qu’on a travaillé sur plusieurs exposés au dernier semestre.

*

A l’occasion de mon séjour, j’ai enfin renoué contact avec mon amie d’enfance. On ne s’était pas vu et parlé depuis quatre, cinq ans. Nous nous étions furtivement parlé un mois avant mais n’avions pu nous rencontrer. Elle a eu la gentillesse de m’héberger la semaine dans son appartement qu’elle partage avec un sympathique breton.

J’appréhendais quand même un peu ces retrouvailles. Mais mes craintes se sont rapidement dissipées. J’ai découvert un peu son univers, son école, ses amies, sa vie sur Paris. Elle m’a parlé de son travail et de ses projets. Je lui ai expliqué mes concours. On a parlé de nos familles respectives, ce qu’elles devenaient etc.

Etrangement, nous n’avons parlé de notre enfance commune que tardivement, la veille de mon départ, à trois heures du matin, après quelques verres de ponch pour elle et quelques bières pour moi. Un moment empreint de nostalgie légère et de gaieté, au rythme des souvenirs et des fous rires qui se succèdent. Un moment d’intimité et d’émotion aussi lorsque nous avons parlé de son frère, disparu depuis huit ans déjà.

Cette fille est simplement magnifique et resplendissante de beauté. Beauté physique bien sur, ses quelques kilos lui vont très bien, elle a de belles formes. Mais beauté intérieure surtout. « Notre rayon de soleil » l’appelle très justement sa mère. Constamment souriante et plein d’humour, elle respire la joie de vivre. C’est ce que j’ai toujours aimé chez elle…

*

Dernier point, j'ai été voir un spectacle d'improvisation. C'était dans un bar, j'y suis allé avec l'amie en question, son colloc et des amis à eux. Deux binomes de garçons s'opposaient donc sur des thèmes annoncés par une arbitre. Les deux équipes jouaient tantôt en suivant, tantôt ensemble. Le public arbitrait par un vote à main levé. Les équipes pouvaient recevoir de l'arbitre, en fonction du vote du public et du non respect des règles du jeu, des cartes bonus ou malus. Ces cartes servaient pour la seconde partie du jeu  qui leur permettait  de rajouter un élément incongru au thème du jeu.

C'était très sympa. J'ai trouvé les acteurs très bons, une équipe plus que l'autre, mais il s'avère que les deux gars de cette équipe se connaissait mieux que les gars de l'autre équipe. Plus facile dans ce cas là de rentrer dans le délire de l'autre en rajoutant des choses sans le choquer. Ils étaient tellement bon que je me suis demandé si cela n'était pas organisé.

29 septembre 2009

Suis-je cynique et désabusé ?

Je ne peux m’empêcher de me poser ce genre de questions. On ne se refait pas, je fonctionne comme ça, je crois. A un moment donné dans mon quotidien, je ressens toujours le besoin de sortir le nez du guidon et de m’interroger sur le sens des choses, celui des propos et des actes des autres à mon égard ou en en général, celui que j’assigne à ma propre parole et à mes propres actions au regard de certains principes ou des objectifs fixés ou latents, sur la façon dont ils peuvent perçus par les autres etc.

Signe d’hypersensibilité ? D’un manque de confiance en soi ? D’un manque de confiance envers les autres ? Sans doute il y a de tout cela dans ma démarche cognitive. Je crois surtout que c’est parce que je me sais par moments complètement indifférent aux évolutions du monde et aux situations des gens, prétentieux et pleins de certitudes, trop confiant dans les autres au point de trop m’exposer et de leur donner plus que ce qu’ils ne semblent prêt à donner (approche très individualiste je reconnais), que j’éprouve ce besoin d’avoir du recul. C’est une sorte de réflexe, de besoin d’équilibre entre deux attitudes « extrêmes ».

La question du cynisme et de la désillusion concerne en fait mon engagement politique.

En effet, je me suis rendu compte, au fil de quelques discussions entre amis, que je n’étais pas très clair sur le pourquoi de mon adhésion et de ma présence au PS. Envie de matérialiser des idéaux ? Je pense que j’ai plus de principes que d’idéaux (j’en revendique quand même !), ma formation en sciences politiques m’ayant ôté mes grandes illusions. Je sais en outre que les politiques menées par mon parti sont parfois bien loin des idéaux affichés. Envie d’être élu ? Je suis trop introverti et trop frileux pour cela. Plan de carrière ? Bof, avoir sa carte aide marginalement à décrocher un job dans les ministères ou dans les collectivités, sauf à constituer et entretenir un réseau et revendiquer une compétence, ce que je ne fais pas.

Par ailleurs, j’ai pris conscience que j’avais coutume de parler du PS à des gens extérieurs (amis ou parents) dans des termes peu positifs*. Loin de rejoindre la position de certains « camarades » (royalistes notamment), ou d’observateurs (un peu) politisé, qui consiste à taper sur telle personne, tel courant, voir la direction pour mieux mettre en valeur mon candidat, mon courant (je n’en ais pas), je dessine en fait, dans les grandes lignes, le fonctionnement interne du PS. J’adopte le principe du « parler vrai » non pas pour décourager les gens de voter ou venir au PS, mais pour leur présenter la « société des socialistes » telle que je la vois. Mais sans nécessairement juger sur le plan moral ou de l’éthique. Les personnes importent moins que leurs contributions au fonctionnement structurel du système. Or ce faisant, je peux donner l’impression d’être amoral, cynique, « pourrie », ceci d’autant plus que je n’ai pas émis d’avis sur le livre récent sur le congrès de Reims (que je n’ai pas lu mais dont l’hypothèse centrale interroge).

Je pense que ma philosophie, mon approche, est résumé dans le commentaire suivant que j’ai posté sur le blog de Moscovici à l’adresse d’un (ex-)militant :

« Le PS, comme toutes les organisations sociales, est un champ de luttes. Oui, il y a une tendance oligarchique (démontrée par Robert Mitchels) et bureaucratique (le propre d'une institution qui prend de la bouteille et qui s'installe durablement). Oui, on s'y bat pour des places. Oui, il y a des rapports de forces. Oui, il y a un système de réseau. Oui c'est décourageant, quand on est non-initié et un peu idéaliste... Les partis comme machines à produire de la déception. Mais c'est la vie, on retrouve ça partout ! Soit on accepte cet état de fait et on se bat à sa manière et à son niveau pour le changer. Soit on tire sa révérence parce qu'on ne veut pas se compromettre mais en sachant qu'on retrouvera cela à peu près partout. »

Partir d’un constant lucide pour tenter d’arranger cela, lorsque c’est possible, à son humble niveau, en gardant à l’esprit ses principes et ses idéaux. Telle est en tout cas ma ligne de conduite, auprès de mon secrétaire de section, dans mon « militantisme » local. Après, c’est une question de temps et de courage… Alors cynique et désabusé ? Non, mais optimiste raisonné oui J.

* Néanmoins, je n’écarte pas non plus ce que je crois être les bons aspects du PS.

20:25 Publié dans Réflexion du jour | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ps

13 septembre 2009

Découverte musicale

 

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C’est en écoutant régulièrement le titre « Fuck You » sur les radios que j’ai découvert Lily Allen. Ce n’est certes pas son premier album. Mais n’ayant pas aimé le tube qui l'a révélée, « Smile », je n’avais pas su m’intéresser à cette jeune anglaise, pas désagréable à regarder au passage.

J’ai donc écouté plusieurs fois « It’s not me, it’s you », et j’ai bien aimé l'ensemble de l'album, les rythmes, les paroles aussi. Par moment, ce n’est pas sans me rappeler Keane, groupe pop anglais que j’aime beaucoup aussi.

Les chansons que je préfère ? « The fear », « I could say », « Fuck you » et Never gonna happen ». On y passe un agréable moment.

22:20 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (1)

08 septembre 2009

Séquence parisienne

J’étais à Paris la semaine dernière pour passer les épreuves écrites du fameux concours de l’ANE. Ne m’étant pas suffisamment bien préparé durant l’année universitaire écoulée, ma motivation étant trop fluctuante pour un effort continu dans la durée, j’ai appréhendé l’exercice sur 5 après midi, comme un entrainement.

Si les sujets ne m’ont pas paru « infaisables », j’avais de quoi dire sur chaque sujet,  ils étaient suffisamment larges pour s’y perdre. En fait, il m’a manqué de l’automatisme dans le traitement des sujets et l’élaboration des plans. Il faut savoir à la fois explorer plusieurs pistes de réflexion et les sélectionner ou les articuler dans un plan cohérent et construit.

J’ai aussi perdu beaucoup de temps pour rédiger des introductions au final laborieuses et trop mal ficelées. Et alors que les autres candidats, visiblement plus préparés, alignaient pages sur pages, je rendais péniblement une copie double.

Bref, je ne suis pas content de mes performances mais conscient de mes limites. Je prévoie de le repasser l’an prochain avec plus de sérieux et plus de continuité dans ma préparation. J’ai la prétention de croire que j’ai mes chances.

*

Ce séjour sur Paris m’a donné l’occasion, en dehors des heures du concours, de retrouver certains amis socialistes rencontrés sur la blogosphère. Bangor, que j’avais précédemment rencontré lors de sa venue à Toulouse, et son épouse, que je ne connaissais pas, m’ont invité à diner chez eux. Par ce biais, j’ai enfin pu mettre un visage sur Raph, jeune socialiste comme moi. Nous avons ainsi parlé de nos études et quotidiens respectifs avant de parler plus de l’actualité politique : La Rochelle, les primaires, Terra Nova, Besoin de gauche.

Trois jours plus tard, sur l’initiative de Tonio, un des plus anciens intervenants sur le blog de DSK (lorsque ce dernier était actif), nous nous sommes tous retrouvés boire un coup – et finalement manger – dans un bar-resto appelé « Le coup d’Etat ». Une bonne soirée avec des gens de bonne compagnie. Tonio était un peu la vedette en sortant blagues sur blagues. J’avais déjà perçu dans nos échanges sur internet son trait d’humour mais c’est encore plus grand en vraie. En sortant, il a eu la gentillesse avec Raph de me faire visiter un peu le coin.

Au fil de nos conversations, j’ai toutefois réalisé l’écart entre Paris et la province en matière de militantisme, puisque beaucoup de choses se passent et se jouent dans la capitale. J’ai surtout mesuré mon « isolement politique » puisque je ne milite pas en dehors de ma petite section, et qu’après l’éclatement de S&D (courant soc-dem) à l’occasion du congrès, je n’ai pas rejoins Besoin de gauche où se sont retrouvés l’essentiel de mes contacts socialistes (je ne suis dans aucun courant à proprement parlé).

*

Avant mon arrivée, parfois deux mois à l’avance, parfois quelques jours avant, j’ai tenté de contacter un certain nombre d’amis (non politiques) afin de les voir autour d’un verre lors de mon bref passage à Paris. Hélas, je n’ai pas eu beaucoup de retour. Je dois dire que dans ces situations là, l’égo en prend un coup. C’est moins l’impossibilité d’une rencontre qui me peine que l’absence de réponses.

La vie m’a appris que le temps et la distance n’aident pas vraiment à conserver des amitiés ou des contacts solides dans la durée. C’était toujours avec difficulté que je redécouvre ce principe. Les efforts des uns et des autres parfois ne suffisent pas. Mais la vie réserve bien des surprises et donne l’occasion de retrouvailles improbables.

C’est ainsi que j’ai renoué contact avec ma principale amie d’enfance – pour qui j’avais le béguin, ce dont j’ai déjà parlé – après un silence de quatre, cinq ans. Nous devions nous voir le samedi avant mon départ. Un empêchement de dernière minute a fait que ça n’a pas été possible. Mais j’ai senti dans notre rapide échange téléphonique qu’elle était contente de m’avoir au téléphone. Ce sera pour le mois d’octobre.

En pensant à elle, à notre histoire, je me suis dit que j’avais changé ma façon de voir les choses sur la vie. J’ai longtemps eu du mal à tourner la page de certains moments de mon enfance et adolescence. Aujourd’hui, je vie cela comme une série de séquences. Dans chaque séquence, on vie tel ou tel évènement, on rencontre telle ou telle personne, on a telle ou telle expérience. Puis quand des bouleversements/ changements surviennent, c’est un nouveau chemin qui se dessine et qu’on emprunte. Rien ne garantie que les gens de la séquence précédente soient encore présents dans la nouvelle. Mais rien n’interdit qu’ils ne réapparaissent pas plus tard.

*

Grace à mon cousin, j'ai pu visiter samedi le Musée d'Orsay le samedi après midi. Mon séjour parisien m'a fait penser à mes six mois à Barcelone, à prendre le métro pour se déplacer, à voir des gens d'origines diverses etc. Sympa.

29 août 2009

Réflexion sur les primaires ouvertes à gauche

Depuis la défaite de la gauche à l’élection présidentielle de 2007, et dans un contexte de crise de leadership prolongé au sein du premier parti de gauche face à l’hyper présidence Sarkozy, on a vu émergé et s’imposer dans le débat public le projet de primaires à la française afin de faire émerger le futur challenger au Président en 2012.

C’est d’abord la Fondation Terra Nova qui en 2008, a lancé le débat par la publication d’un essai, intitulé Pour une primaire à la française, et co-écrit par Olivier Duhamel et Olivier Ferrand. Reprise par certaines personnalités socialistes (Moscovici, Royal, Valls, Hamon) à l’occasion du congrès de Reims, inscrite dans certaines motions (C, D, E au moins), l’idée sera, au travers du débat parti de militants contre parti de supporters, un des enjeux du congrès. Enfin, en juin dernier, après la défaite des socialistes aux élections européennes, Arnaud Montebourg, secrétaire national à rénovation, a publié une note sur le sujet et appelle les socialistes à adopter ce système de désignation en vue de la prochaine présidentielle.

Depuis, les principaux responsables du PS se sont succédés dans les média pour s’exprimer en faveur des primaires et demander à la direction de s’engager sur ce point: Pierre Moscovici a lancé une pétition après les européennes ; Arnaud Montebourg appelle la direction à adopter le projet de primaires pour faire tomber les murs ; Vincent Peillon et ses amis, réunis à Merseille, "veulent aller vite" ; Manuel Valls parle de question de vie ou de mort ; Bertrand Delanoë et Laurent Fabius – jusqu’ici connus pour leur peu d’enthousiasme sur le sujet – ont finit par s’incliner. Et voilà que Martine Aubry s’engage clairement sur le sujet, tout en évitant de trancher la question du périmètre des primaires : le seul PS ou toute la gauche.

A titre personnel, malgré une lecture sérieuse des rapports susmentionnés et de nombreuses discussions avec des camarades plutôt favorables au projet, je ne suis pas convaincu de l’intérêt des primaires. Tout en reconnaissant la qualité des travaux de réflexion (A), je pense que ce système apporte plus de problèmes qu’il n’en résout (B).

 

- A -

L’intérêt de l’essai de Terra Nova est triple.

D’abord, il s’intéresse à la manière dont un parti politique se désigne un leader. Pour cela, les auteurs retracent l’histoire des primaires à gauche en revenant sur les désignations des candidats socialistes à la présidentielle depuis 1981. Bien que la première primaire socialiste date de 1995 – elle opposait alors Henri Emmanuelli à Lionel Jospin – il s’avère que les statuts du PS, en soumettant le choix du candidat socialiste aux militants, offrait dès le départ la possibilité d’organiser les primaires. C’est le retrait de la candidature de Michel Rocard face à celle de François Mitterrand qui a empêché le recours aux primaires en 1981.

Ensuite il fait état des expériences de primaires à l’étranger (américaines, italiennes, anglaises et dans une moindre importance espagnoles, grecques et allemandes) pour déterminer les bien faits et leurs limites, et inspirer le modèle des primaires françaises. Il en ressort ce tableau :

Enfin, l’essai propose aux socialistes de choisir en deux types de primaires : d’une part une « primaire présidentialiste », ouverte aux sympathisants socialistes et organisée peu avant la prochaine présidentielle sur le modèle du Parti Démocrate américain, et d’autre part une « primaire parlementariste », ouverte aux seuls militants et organisée juste après la dernière présidentielle sur le modèle du Parti conservateur anglais. La première doit désigner le candidat socialiste à la présidentielle quand la deuxième doit désigner le principal leader de l’opposition pour toute la législature. Les auteurs font part de leur préférence pour la première solution.

ps,gauche,aubry,rocard,mitterrand,jospin,royal

 

Le rapport Montebourg retient l’hypothèse de « primaires présidentialistes » ouvertes à tous les partis de gauche qui souhaitent y participer, et qui dans ce cas, les co-organiseraient du début (élaboration de la charte et des règles communes) jusqu’à la fin (désignation et campagne commune). Le principal intérêt du rapport réside dans l’exposition des principes qui doivent guider le choix et l’organisation des primaires ; et dans l’édiction de règles, claires et précises, encadrant le processus électoral des primaires.

Souhaitant éviter la répétition des erreurs de la dernière primaire socialiste, les auteurs du rapport Montebourg prévoient une campagne des primaires de six mois. En préalable, le PS organiserait une campagne de mobilisation pour constituer un premier fichier de sympathisants, base du réseau social de la primaire. La campagne se ferait en deux temps : la phase des éliminatoires, et le scrutin nominal à deux tours pour les deux derniers candidats.

Participerait aux éliminatoires, tout candidat revendiquant un certain nombre de parrainages de grands élus (la liste devant être définie bien avant la campagne et plus large que celle de 2006 qui limitait drastiquement le nombre théorique de candidats) ou de signatures d’un certain % de militants/sympathisants (à définir également).

Les éliminatoires se dérouleraient sur trois/quatre tours :

- au premier, on retiendrait les candidats ayants obtenu au moins 5% des suffrages exprimés,

- au second, ceux ayant obtenu au moins 10% des suffrages,

- au troisième, ceux revendiquant plus de 15% des suffrages,

- au quatrième tour, on ne garderait que les deux principaux.

 

Les éliminatoires doivent assurer « le rassemblement des candidats et de leur projet en équipe autour du vainqueur » par l’appel et l’engagement des candidats éliminés dans le soutien actif aux candidats restants. Le scrutin nominal à deux tours pour les deux derniers candidats durerait un à deux mois et devra déterminer le candidat unique des partis participants à la primaire.

Voilà en résumé, le projet des primaires du rapport Montebourg-Ferrand. Je ne peux que saluer la qualité du travail de  réflexions et propositions, très détaillées, de ces deux textes. Je partage en outre l'idée qu'il convient, si on adopte le principe de primaires, de poser le cadre et les règles du jeu bien avant le début de la primaire. Cela ne peut que faciliter la participation de tous les possibles candidats et déminer à l'avance tout procés de "jeu de dés pipés".

 

- B -

Cela étant dit, je reste sceptique devant ce gros et beau projet. Mais dire cela ne signifie pas, comme me rétorquent certains mauvais esprits, que je sois pour le statut quo, que ce soit sur le fonctionnement actuel du PS ou sur e processus de désignation du candidat. Ne soutenant a priori personne dans les candidats déclarés ou probables – je ne renie en rien ma sympathie et ma proximité politique et intellectuelle avec DSK – ma position n’est pas guidée par le calcul politique.

Je pense que le principal défaut de ce projet de primaires reste d’avoir pris la présidentielle de 2012 (ou l’élection présidentielle en général) comme point de départ de la réflexion. La présidentielle reste dans le cadre de la Vème République, qu’on le veuille ou non, l’élection centrale du jeu politique et institutionnel. Pour autant, si on observe bien, cette élection n’occupe le temps politique qu’entre deux et huit mois sur une législature de cinq ans ; les deux mois correspondent à la durée légale de la campagne officielle, le reste étant la période où apparaissent, s’affirment et se déclarent les principaux futurs candidats.

Que des hommes et des femmes y songent bien avant et s’y préparent au sein de partis politiques ne doit pas nous faire oublier qu’entre l’élection du président et la prochaine présidentielle, c’est le temps de l’action gouvernementale. L’objet de la présidentielle, suivie des législatives, reste la désignation par le peuple français d’une équipe et d’une majorité politique en vue d’appliquer un programme. On se présente aujourd’hui pour agir demain.

A trop vouloir anticiper et préparer à l’avance la grande échéance, on court le risque de monopoliser le débat politique sur ce seul thème, et de le saturer, a fortiori lorsque l’enjeu est réduit à une question de personnes. Ce n’est pas sans conséquences sur le jeu démocratique. L’action gouvernementale peut s’en trouver paralysée (bataille de succession entre plusieurs possibles candidats de la majorité ; bataille de réélection qui impose de lever le pied dans le rythme des réformes). Et une exposition médiatique et politique trop hâtive et prolongée des aspirants peut leur etre nuisible, que ceux-ci sortent du bois deux, trois, quatre ans avant.

En ce sens, le projet des primaires n’est pas sans risques. Une campagne interne de six mois, utile pour que chaque candidat développe ses idées et son projet et qu’une personnalité s’en dégage avec une certaine étoffe de présidentiable, a l’inconvénient d’exposer trop longtemps le candidat qui après sa désignation doit encore passer l’épreuve de la campagne officielle. Ses forces et faiblesses, mis en évidence durant cette pré-campagne, seront exploitées par ses futurs adversaires. Une campagne interne fondée sur la différenciation des candidats et de leurs projets pose la question de la réconciliation, une fois le candidat désigné.

Une campagne interne de six mois peut s’avérer trop nombriliste si les questions de personnes supplantent les questions de fond (risque de démotivation voir de rejet des français) ou si les valeurs et les problématiques privilégiées par les candidats sont trop marquées politiquement pour mobiliser un électorat peu politisé. Enfin, il ne faut pas oublier les risques de surenchères de la part des candidats, sous l’effet de logiques internes (se donner une posture) ou sous l’effet des sondages d’opinion (qu'ils portent sur les personnes ou sur des enjeux précis).

Par ailleurs je suis sceptique vis-à-vis du projet des primaires parce qu’il me semble que la réflexion sur ce sujet ne s’est pas accompagné d’une réflexion sur le rôle des partis politiques et des militants dans le processus électoral et le système politique. Et si cette réflexion a eu lieu, alors je crains que je n’en partage pas les conclusions.

Le système des primaires a pour objectif la désignation d'un candidat en lui donnant une meilleure légitimité que celle acquise par un vote de quelques 200 000 militants. Dans l'idéal, chaque candidat avance avec sa tendance et son projet, et les militants/sympathisants arbitrent. Mais alors que vont devenir nos congrès internes si la question du programme et du leadership est réglé à la fin ? A quoi sert le Parti Socialiste (ou tout autre parti) pendant le temps qui sépare la dernière présidentielle de la primaire pour la prochaine ?

Les partis politiques sont des machines électorales qui servent à désigner des candidats et à faire la campagne de ces derniers à partir des ressources (financières, médiatique, symboliques, logistiques, humaines) dont ils jouissent en tant qu’organisation. Mais ce sont aussi des lieux de vies, de socialisation politique en interne (formation des militants) et en externe (vecteur de sensibilisation et de politisation de l’électorat). On ne peut pas se contenter de la première partie de la définition.

Acter le principe de primaires en fin de législature pour régler les problèmes de leadership, c’est instaurer la crise permanente de leadership. Car si l’enjeu du programme et du leadership peut se régler par une primaire, quel intérêt auront les responsables politiques de ménager le parti et sa direction, voir d’y travailler en son sein, si tout est réglé/tranché à la fin ? On n’est pas prêt de sortir des luttes internes. On a bien vu en 2006, que dans l’attente de la désignation des candidats par le système des primaires, chaque présidentiable s’est bien gardé de (trop) participer à la rédaction du projet, pour se garder quelques cartouches au moment de la campagne interne.

Le rapport Montebourg explique que le projet de primaires revalorisera le rôle des militants qui vont assumer la logistique des primaires sur le terrain, accessoirement en défendant leurs idées et leur leader. Il me semble que cela privilégie une logique de supporters (tout est ramené à la personne qu’on soutien) à la logique de militants (syndical, associatif, mutualiste), même s’il convient de reconnaitre que cette dernière est de moins en moins exploitée et favorisée. Un camarade FFE avait écrit une fois: "le PS est un parti d'élu qui ne sait pas quoi faire de ses militants". J'ai tendance à croire, qu'avec le système des primaires, ils souhaitent s'en débarrasser.

Je ne suis pas certain que les penseurs du projet de primaires aient forcément réfléchit et évalué les effets des primaires sur le rôle et le fonctionnement des parti et des militants. Dans ce sens, le débat sur les primaires ressemble à mon avis à celui sur le quinquennat. On justifie les primaires pour régler la question du leadership comme on justifiait hier le quinquennat pour mettre fin aux situations de cohabitation. Seulement, on n’a pas pensé que le quinquennat changerait le rythme politique et renforcerait la figure du président sur le Parlement. Or, comme disait Mendes-France, "gouverner, c'est prévoir".

Il me semble qu’avec les primaires, on va encore accélérer le rythme polico-médiatique en le centrant toujours plus sur les présidentielles. La démocratie ce n'est pas que les élections, c'est aussi le débat d’idées, les mobilisations sociales, les batailles parlementaires etc.

 

Pour conclure ces long propos, ije n’exclue pas de me tromper dans mon diagnostic et dans ma position. J’avais écrit l’an dernier que la forme des partis politiques étaient peut être désuètes et qu’à une organisation de type bureaucratique, il fallait peut être rechercher une organisation en réseau. Il est possible que l’engagement politique, qui n’est pas une spécialité française que ce soit en politique, dans le monde syndical ou associatif, soit à géométrie variable. Comme me disait Belgo, un jeune va peut être s’engager auprès des écolos sur tel enjeu, auprès des socialistes sur telle question, et auprès de gens de droite sur tel autre question. Aux partis de s'adapter. Il est possible aussi qu’avec le système des primaires, les partis politiques connaissent une nouvelle jeunesse en renouant des liens avec des milieux sociaux qui se sont éloignés de la politique. Pour l’instant, j’en doute.

C’est pourquoi sur le sujet des primaires, je préférerai encore la seconde solution qu'avait préconisé Terra Nova dans son essai: une primaire en interne et en début de législature. Mais cela implique une réforme de nos statuts et du fonctionnement de nos congrès (ne plus découpler vote de motion et vote du Premier secrétaire, rehausser le taux de représentativité à 10% ou donner un bonus à la motion arrivée en tête).