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21 août 2008

Notes de vacances

Déjà la fin de mes congés ! Je n’ai pas vu les jours passés. En attendant la reprise du travail ce lundi, je profite de mes derniers jours dans les Pyrénées. Au total quinze jours tranquilles comme d’habitudes.

*

Ayant achetés une dizaine de livres en début de l’été, deux d’entre eux ayant fait l’objet de notes sur le blog et , j’ai donc essayé d’avancer dans mes lectures en retard. Je viens de finir La guerra civil española de Pierre Vilar, intéressant résumé de cette tragédie qui a marqué le XXème siècle et l’histoire espagnole. J’aurai l’occasion d’en reparler prochainement.

Et quand je ne lis pas un livre, je lis le journal. Un ami, abonné au Monde, m’a donné quelques numéros récents. Et puis je ne cache pas mon plaisir chaque fois que je le peux, d’acheter El Pais, le principal quotidien espagnol, dont chaque numéro m’occupe bien 2,3 jours. Si on peut lire gratuitement ces deux quotidiens sur l’internet, il faut savoir de temps à autre, quand on en a les moyens bien sûr, contribuer à la survie financière de la presse écrite. C’est à cette fin que j’ai décidé de faire un don de 20 euros à L’Humanité qui connaît à nouveau des difficultés financières. Bien que ce ne soit pas un journal que je lis souvent, son approche des faits d’actualités reste originale dans le paysage médiatique français. Cette originalité mérite d’être sauvée*. 

*

Prenant mon courage à deux mains, j’ai décidé de faire un peu d’exercice. Comme j’ai pris quelques kilos ces deux dernières années et que j’ai arrêté le sport depuis le lycée, je me suis dit qu’il fallait bien se prendre en main à un moment donné. Je m’en vais donc courir une bonne demi-heure chaque matin en parcourant à peu près 3 kilomètres. C’est peut être pas beaucoup mais mieux vaut commencer doucement et repousser ses limites petit à petit. Et avec ça je marche près de 2h, 5 à 7 kilomètres.

En parlant de sport, je ne peux m’empêcher d’écrire quelques lignes sur les Jeux Olympiques de Pékin. Je dois avouer que j’aime assez peu regarder le sport à la télé. Malheureusement la passion de mon oncle monopolise le petit écran. Je regarde bien quelques épreuves tantôt côté français, tantôt côté espagnol, mais je ne peux m’empêcher de penser à la dimension politique de ces J.O. La cérémonie d’ouverture en est la caricature même : images travaillées à l’ordinateur (feux d’artifices, pollution masquée), imposture sur la jeune chinoise qui chantait. Les employés de relations clientèles recrutées pour l’occasion l’ont été sur des critères discriminants (taille, beauté), amenant des chinoises à subir des opérations pour gagner quelques centimètres ou être plus photogéniques. Les sportifs, dont l’âge et le nombre d’heure d’entrainement laisse planer le doute, sommés de s’excuser publiquement si d’aventure ils ne pourraient participer à une épreuve.

Tout est fait pour donner une belle image de la Chine au monde entier. Sans parler du problème du Tibet, je pense que ces J.O. ne doivent pas faire oublier l’entreprise politico-mercantile qu’est le C.I.O et la nature politique du régime chinois (qui combine le pire du communisme et du capitalisme).

*

En allant faire quelques courses en Espagne, on m’a expliqué que je pouvais demander la nationalité espagnole. Le sujet m’avait déjà interpellé lors des débats en Espagne sur la loi sur la mémoire historique. J’avais appris, et l’avait dit à Den, que les fils et petits-fils d’exilés républicains espagnols pouvaient demander, dans un délai de deux ans, la nationalité espagnole.

Mon histoire de famille m’écarte du dispositif car la venue de mes grands parents paternels en France n’était pas motivée par des raisons politiques mais économiques. Bref. Il s’avère que le fait que mes grands parents soient espagnols et que mes parents soient nés là bas me permettrait de revendiquer la nationalité espagnole.

Il faudrait que j’aille demander quelques renseignements au consulat espagnol. Mais pour l’instant je réfléchis à l’opportunité et au sens d’une telle démarche. Au fond la question qui importe c’est de savoir si je me sens suffisamment espagnol pour demander à appartenir à la communauté hispanique.

* voir les réactions sur l'article du Monde

13 août 2008

Sale temps pour les Travaillistes anglais.

Depuis leur lourde défaite aux dernières municipales il y a quelques mois de cela, les travaillistes anglais s’interrogent. A en croire la presse britannique qui relaye (et amplifie) les débats internes, officiels et officieux, nos camarades outre-manche semblent douter de l’autorité de Gordon Brown comme leader et chef de gouvernement, comme en ses capacités à porter le Labour vers une 4ème victoire, lors des législatives prévues en 2010.

Un an après son arrivée au 10 Downing Street, le Matignon britannique, Gordon Brown est perçu par les travaillistes comme une charge et le responsable de leur mauvaise situation. Aussi, suite aux élections de mai, et sur fond de sondages défavorables, des voix s’élèvent pour demander un changement de leader le plus tôt possible. L’idée semble prendre du chemin. La « disponibilité » de David Miliband, jeune ministre des affaires étrangères, et la publication d’une note de Tony Blair sur la stratégie de son successeur, apportent du grain à moudre à la machine médiatique et autres détracteurs du Premier Ministre.

Il est surprenant de voir comment en France, des journaux comme Le Monde, rendent compte de la situation politique outre-manche. Le manque de charisme, un problème de communication ou des hésitations dans la prise de décisions seraient les tares d’un Gordon Brown, usé par 10 ans de pouvoir au côté du si « incroyable et charismatique » Tony Blair, face au « jeune » et communiquant David Cameron, chef de file d’un Parti Conservateur supposé « recentré ».

Sans doute ces arguments ont une part de vérité.

Sur le plan de la communication publique, c’est vrai que Gordon Brown offre souvent un regard fermé et peu souriant, ce qui est peut être dû à la cécité de son œil gauche. Pour avoir écouté une petite partie d'un de ses discours, son ton semble monotone et sa gestuelle limitée et répétitive. Mais s’il y a bien quelques électeurs qui font un choix politique sur la « forme » du candidat, on peut espérer qu’ils ne constituent pas encore la majorité.

Sur le plan des hésitations ou des erreurs politique du gouvernement Brown, on peut en citer quatre. D'abord les revirements en septembre-octobre dernier sur la convocation d’élection générale anticipée. Ensuite, à peu près au même moment, la reprise par le gouvernement d’une proposition fiscale des Tories, donnant le sentiment de gouverner au hasard. En troisième lieu, la décision bien tardive de nationaliser la Northern Bank alors même que les problèmes de financement de la banque semblaient connus depuis 5-6 mois. Enfin une réforme fiscale touchant les plus modeste, votée lorsqu’il était ministre de l’économie et reniée lorsqu’il se retrouve Premier Ministre.

Mais la personnalisation du débat politique tend par essence à nier la dimension collective du processus de décision comme le contexte économique et social dans lequel ces individus et la société se développe. Aussi les errements politiques du gouvernement travailliste au cours des derniers mois, ne doivent pas faire oublier le contexte économique de cette dernière année : la crise de l’immobilier et le fort ralentissement de l’économie britannique qu’elle implique.

Alors même que les (néo)-travaillistes ont bâti leur réputation de bon gestionnaire de l’économie sur fond d’une croissance économique forte et constante au cours des 10-15 dernières années, l’intensité de la crise économique récente met à mal bien des croyances. Pour le dire autrement, nos amis britanniques sont peut être en train de comprendre que leur modèle de croissance ces 10-15 dernières années - fondé sur la spéculation immobilière, la forte financiarisation de l’économie et le surendettement des ménages - avait une dimension artificielle. Et maintenant que la crise est là, les victimes – fort nombreuses – se rendent compte des faibles marges de manœuvres et d’actions de leur gouvernent sur une économie qui se purge.

Pour autant, le manque de charisme, les divers errements politiques du gouvernement Brown ou la crise économique ne suffisent pas à expliquer les récents résultats électoraux et l’impopularité du Labour dans les sondages d’opinion. Ils ne font qu’occulter la fragilisation progressive des bases de soutient du New Labour ces 11 dernières années. Lorsqu’on parle de la « Troisième voie » (ou Blairisme), on entend souvent ce type de phrase : « le social-libéralisme non seulement ça marche économiquement mais ça paye politiquement ».

Je ne veux pas entrer ici dans le procès du blairisme sur le plan économique et social. Rappelons simplement que les travaillistes ont eu le mérite d’avoir 1) restauré et régulièrement augmenté le SMIC, 2) augmenté les dépenses sociales (en proportion du PIB) notamment en matière de santé et de d’éducation, 3) augmenté la quantité d’emplois publics.

Ce qui reste intéressant dans la phrase, c’est la deuxième partie : « ça paye politiquement ». Combien de fois ne l’avons-nous pas entendu pour condamner « l’archaisme » de la politique du gouvernement Jospin ? En somme le jospinisme ne pouvait être un modèle : il était économiquement et politiquement inefficace. Les socialistes français se complairaient à critiquer les travaillistes anglais alors qu’ils ne seraient même pas foutus de gagner 2 fois une élection. Certes, le New Labour a remporté 3 élections mais la victoire est moins éclatante qu'on a aimé le dire.

La victoire du Labour dépend en partie du mode de scrutin britannique : un scrutin majoritaire à un tour avec un bonus pour le parti qui arrive en tête. Ce système conduit à un puissant et imperturbable bipartisme. Malgré la présence d’une multitudes de partis (dont nationalistes régionaux), seuls comptent les 3 premiers : Labour, Tories et les Liberals Democrats.

Si maintenant on regarde le nombre de voix recueillis par le Labour depuis 1974, on voit que le Labour a perdu près de 3 millions de voix entre 1997 et 2001, donc avant la Guerre en Irak argument souvent cité pour expliquer l’impopularité de Blair, et un peu plus d’un million de voix entre 2001 et 2005. Soit 4 millions de voix de perdu en 10 ans.
 

 

Labour

Tories

1974 :

11,457,079

39.2 %

10,462,565

35.8 %

1979 :

11,532,218

36.9

13,697,923

43.9

1983 :

8,456,934

27.6

13,012,316

42.4

1987 :

10,029,270

30.8

13,760,935

42.2

1992 :

11,560,484

34.4

14,093,007

41.9

1997 :

13,518,167

43,21

9,600,943

30.7

2001 :

10,737 967

40,99

8,357,615

31.7

2005 :

9,562,122

35.3

8,772,598

32.3

Bien que je manque de sources et de données, il semble que les travaillistes aient perdu du terrain au sein des classes moyennes et des classes populaires, et des régions traditionnellement travaillistes sont passés aux mains des nationalistes écossais (de réputation plus progressiste) ou gallois. D’autre part, on sait que Tony Blair en réformant le Labour a grandement fragilisé les liens qu’entretenaient les travaillistes avec les syndicalistes. Ceci pourrait expliquer le retour de grèves dans le monde éducatif. Enfin, le nombre de militants travaillistes s'est éffondré au cours des dernières années, affaiblissant du coup les bases de soutient du parti.

Dans cette note j'ai voulu montrer que la crise que traverse actuellement le Parti Travailliste Anglais trouve ses sources non dans les faiblesses personnelles du leader, mais l’affaiblissement progressif, au cours des 10 dernières années, des bases sociales et électorales du parti. Cela résultant de l’action politique du parti au pouvoir, qui a pu décevoir une partie de l’électorat, comme de la longévité du parti au pouvoir (10 ans). En l’état, facteurs conjoncturels comme structurels annoncent une défaite aux élections générales de 2010.

14 janvier 2008

La fin des organisations politiques ? (2)

Je reviens sur les remarques qui m’ont été faites à ma note « la fin des organisations politiques ? », auxquelles je n’ai pas répondu par manque de temps.

Après plusieurs relectures, je suis toujours intrigué par la façon dont mes propos ont été perçus et interprétés. J’ai peut être fait trop long ou bien abordant plusieurs points à la fois, le fil conducteur de ma réflexion ne semble pas aller de soit. Le titre n’est sans doute pas non plus adéquat.

J’ai abordé la question des média en faisant le lien avec la politique. Pour moi, l’arrivée des média de masse (presse écrite, radio, cinéma puis télévision) a entraîné un changement conséquent dans les stratégies de communications des partis politiques. La communication politique c’est ce qui permet à une organisation donnée de diffuser ses idées, ses analyses, son programme, ses actions à des citoyens- électeurs.

Dans les années 1900, Jean Jaurès utilisait L’Humanité pour défendre la cause du socialisme humaniste et républicain. Des années 30 jusqu’au années 50, c’est au tour de la radio de prendre le relais, et le programme radio d’alors n’avait sûrement rien à voir avec les émissions d’aujourd’hui. Je passe sur la sinistre utilisation nazi et soviétique des moyens de communication au service d’idéologies totalitaires. De 1950 au années 1980, l’arrivée de télé et sa lente autonomie, puis ses évolutions programmatiques, change encore plus la donne. Parler deux heures à la télévision permet d’atteindre une cible politique plus large et à moindre frais, que de longues heures de coûteux meeting (avec une dimension de proximité différente que celle de la télévision).

La relation du politique au média a changé en parallèle à l’apparition et l’évolution de la classe médiatique et/ou journalistique. J’hésite presque à dire que les choses sont encore plus « compliqués » depuis que cette classe médiatique s’est autonomisée (i.e qu’elle a acquis une certaine légitimité cathodique). Mais en même temps, la relation des citoyens à l’objet politique s’est trouvé transformée. Et je dis que les média n’y sont pas pour rien, même si j’admets qu’il y a d’autres facteurs explicatifs.

La présence régulière et toujours croissante des média (qui traitent de moins en moins de la chose politique au profit d’activités dit de « loisirs », soit de distractions...ce qui en dit long) tout au long de nos vies, change complètement notre façon de voir tout en marquant nos vies. On ne voit pas les choses de la même façon selon que le cinéma correspond à une sortie exceptionnelle en famille ou selon qu’il soit notre sortie hebdomadaire entre copains. Il y a 40 ans, la télévision restait un produit de luxe et la programmation était limitée en nombre d’heures comme en types d’émissions. Aujourd’hui la télévision est en général une chose qui fait partie de notre quotidien. C’est peut être encore plus vraie pour ma génération. Les valeurs transmissent par la télévision (et ses divers programmes) ont évolués avec le temps, du coup, le référentiel n’est pas le même selon les générations. Il suffit de voir avec la clope, l’idéal de la famille ou encore la figure du mâle. Bien sûr, chaque individu intériorise différemment les valeurs et les normes.

L’arrivée d’Internet va changé encore plus, au travers de ce qu’en font les utilisateurs bien entendu (la machine en soit ne véhicule rien), les valeurs et normes de nos sociétés contemporaines. Je ne dis pas forcément en bien ou en mal, même si selon mes valeurs, il y a beaucoup de risques. J’ai entendu dire qu’il y a de plus en plus de cas de divorce parce qu'on passe trop de temps sur le net. Autre exemple, l’immigrant qui a accès au net peut rester en contact quasi sans interruption avec sa famille resté au pays. Vous vous doutez que ça n’a rien à voir avec les fameuses lettres qui mettaient des mois à arriver. Ca crées des conditions d'expériences différents d'une génération à une autre.

Ce changement pratique dans le vie quotidienne et des valeurs transmisses et admises en société fait que le rapport à la politique est différent. C’est différent d’être socialisé politiquement au travers de meeting que vos parents-militants contribuaient à préparer (un exemple absolument pas personnel) que d’être initié à la politique via une émission télé-politique. La socialisation politique dépend beaucoup des parents (la famille). Mais elle dépend aussi des événements qui animent votre époque et vous touche de près, physiquement comme votre conscience. Le Front Populaire, l’Occupation, les guerres de décolonisation, le Gaullisme, Mai 68, Mai 81, la Marche des Beurs, les manifs anti-CIP ou CPE, la présence de Le Pen au 2nd tour en 2002, la guerre en Irak… tous ces événements touchent différemment les individus selon sa position sociale et les normes et codes de son milieux, et forgeront en lui une conscience et des convictions politiques types. Mais je me garde bien de tomber dans un déterminisme social.

Concernant la dépolitisation que vous avez abordés sur le forum des Pots Aux Roses, elle peut être comprise comme un refus de s’identifier aux représentations (mentales, par exemple, la clivage gauche/droite) et pratiques des acteurs politiques traditionnels (soit les acteurs institutionnalisés comme les partis politiques ou syndicats). En somme, on ne se reconnaît plus/pas dans les idées, les pratiques et actions défendues par telle organisation politique. Par contre la dépolitisation comme refus de donner un caractère politique (en dehors du clivage gauche/droite) à une action sociale/sociétale (comme un mouvement social, lobbying de telle association), est en lui-même, un acte/ choix politique.

Sur la comparaison entre organisme humain et organisme social, il faut en effet éviter 2 écueils : d’abord celui de voir le tout comme la somme des partis qui la composent ; ensuite de voir le tout supplanter voir écraser l’individu. Une différence importance que je n’ai pas mentionné mais qui rejoins ces pièges à éviter, c’est que l’être humain est doté d’une conscience autonome là où une organisation en est dépourvu, sauf comme on l’a dit, à travers de ses membres. Oui, une institution ne vit qu’au travers des membres qui la composent. Pour autant, une institution est subjectivé autant qu’elle est le produit d’objectivation (c'est à dire qui s'impose à l'individu sur la plan des représentations).

23:05 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : média, gauche

22 décembre 2007

La fin des organisations politiques ?

Le mois dernier j’ai regardé sur Arte un reportage sur Georges Marchais et ses rapports à la télévision, intitulé « Georges le cathodique, parts de Marchais ». A quelques semaines près, cela correspondait aux 10 ans de la mort de l’ancien secrétaire général du Parti Communiste Français (PCF).

 

Le documentaire était d’un grand intérêt. Premièrement il m’a permit de découvrir un personnage haut en couleur avec une forte personnalité et des expressions faciales et verbales très directes et très marquantes. Ensuite et d'un point de vue politique, ce documentaire montre comment Georges Marchais représentait la réponse stratégique (on pourrait dire marketing politique) du PCF à l'arrivée et la diffusion de la télévision comme mass-média. Autrement dit, le PCF avait alors compris que la communication se ferait moins dans les meetings qu'au travers du petit écran, et qu'il fallait alors trouver une "bête de télé". Par ailleurs c'est aussi une histoire des média et notamment des émissions politiques. On retrouve alors les indécrottables Elkabbach et (Alain) Duhamel comme journalistes politiques, dans des émissions au style très sobre, où l'audimat était une variable déjà importante mais où celle du temps n'avait pas encore amené à concentrer les émissions. Enfin, le documentaire trace l'histoire du PCF depuis les années 70 en parallèle à celle d'un ses plus importants leaders et pourtant aujourd'hui oublié. Se distinguent 2 phases : l'apogée et le déclin.

 

Le déclin. Depuis les années 80, on ne cesse de parler de déclin du PCF et d'annoncer sa disparition tambour battant. Il est vrai qu'au regard des votes obtenus élections après élections, du nombre d'élus communistes partout en France, et surtout de militants enregistrés années après années, le bilan du PCF n'est pas lumineux. Et pourtant il subsiste. Les autres partis de gauche, avec leur configuration et caractéristiques propres, ne sont pas nécessairement dans une meilleure situation. Et que dire aujourd'hui où les dernières présidentielles ont montrés que la Gauche est minoritaire !

 

Cette notion de déclin m'interpelle. L'être humain est un organisme qui croit et dépérit jusqu'à s'éteindre et disparaitre, tel un cycle, le cycle de la vie.  Mais toute organisation sociale (les partis, les associations, les syndicats, les entreprises etc) n'est-elle pas finalement un organisme collectif vivant et donc soumis à un certain cycle de vie (i.e une certaine entropie) ? Toute la différence réside dans le fait que l'individu se sait condamner (avec comme question: quand, comment et avec qui ?) alors qu'un organisme collectif possède en lui une tendance à l'entropie (le déclin) et une à la neg-entropie (la survie par un redynamisme). L'eros et le tanatos organisationnel.

 

Je suis membre d'un parti politique centenaire, le Parti Socialiste, le plus vieux parti politique de France après le Parti Radical (1901) si l'on considère qu'existe encore un tel parti. A l'heure du sarkozysme triomphant et de sa politique d'ouverture, le PS est dans la confusion la plus totale. La classe médiatique, qui se plait à mettre de l'huile sur le feu, joue sur les divisions et rivalités à l'intérieur de chaque camp politique et va jusqu'à appeler le PS, un "astre mort".

 

Entre fantasme médiatique et confusion politique généralisée en cette sombre période, il est difficile de s'avoir ce qu'il en en est réellement. Le Parti Socialiste est le principal parti d'opposition légal de ce pays. Appartenant au système de partis légal et institutionnalisé, du fait des suffrages reçus, il bénéficie d'atouts majeurs qui écartent toute idée de disparition subite. Je veux parler du système de financement des partis politiques et du système de temps de parole. L'argent et le temps de parole sont le nerf de survie de tout parti. Ajoutons à cela un réseau d'élus (justifiant le financement public du parti) et un nombre important de militants, ces quatre piliers imbriqués les uns aux autres, maintiennent un PS en état de marche. Aussi, à ceux qui pensaient que le MoDem allait bouffer le PS, je les renvois à ces observations socio-politiques de base, à quoi j'ajouterai le mode de scrutin à deux tours, qui favorise un certain bipartisme et favorise in fine le PS.

 

J’admets volontiers que ces quelques critères soulignés en gras, ces systèmes finalement, garantissent l'actuel système partisan. Pour faire l'analogie à une étude de marché en situation de concurrence, ces systèmes émettent un prix d'entrée très élevé sur le marché de la représentation en même temps qu'il subventionne les acteurs en place. C'est un cadre conceptuel, un cadre d'étude que j'utilise là mais je n'oublie pas que l'enjeu reste la démocratie. Le système de représentation, et par là le système politique, est tiraillé entre deux logiques: le besoin de représenter les gens dans leur diversité (sociale, âge, sexuelle, professionnelle, ethnique) et représenter leurs idées ET un besoin d'efficacité. Un parti politique, pour reprendre Schumpeter, est une "entreprise politique" visant à conquérir et exercer le pouvoir. Le conquérir par le suffrage universel en cherchant à représenter une majorité des divers (et contradictoires) intérêts du monde social; l'exercer par l'appareil étatique pour changer et/ou conserver l'ordre social établie.

 

Mais un parti politique, comme tout organisme collectif vivant, est une institution avec ses logiques dynamiques, extérieures et intérieures propres, parfois contre-productives sur un échelle de valeur, en somme notre idéal démocratique. En bref, il y a des logiques de pouvoirs à l'intérieur de toute structure dynamique. Cela ne se résume pas au désir de chef qui anime certains, mais au positionnement des uns et des autres dans la structure collective complexe. Au PS c'est la logique des courants et notabilière fondées sur des frictions personnelles (tempérament différents) comme de schéma de représentations. Du côté des logiques extérieures, la compétition avec d'autres partis pour le monopole de la représentation politique du monde social, amène à une lutte sur le champ médiatique comme sur le champ électoral ou social. La dimension temporelle et la concentration de celle-ci, c'est à dire le laps de temps toujours plus court entre chaque élections, ne facilite pas les logiques dynamiques internes positives et au contraire encourage celles qui sont entropiques.

 

Le système partisan actuel est sur le champ de représentations, le produit d'une dynamique socio-historique faite de clivages en série et d'événements communs (mais différemment vécus) tel que la Révolution industrielle. J'en avais parlé, reprenant les propos de Rokkan et Lipset, il s'agit des clivages religieux (laïcité ou pas), politique (monarchie parlementaire/absolue, république), social (bourgeoisie VS prolétariat), écologique etc. Du fait de cette histoire sociale, la forme des partis politiques depuis l'introduction de la démocratie représentative, n'a cessé d'évolué: partis de cadres/partis de masses, partis de gouvernement/partis de protestation, parti sectoriel/parti-attrape-tout etc. La massification des partis fin XIXème/début XXème siècle notamment chez les partis socialistes ou sociaux-démocrates, est une réponse sociale à un enjeu donné: l'organisation du mouvement salarié et des revendications politiques. C'est pour répondre à cette double d'exigence de dignité sociale et politique (l'extension de la représentation et des droits citoyens), que les partis socialistes sont nés en général du syndicalisme.

 

Or le monde a changé. Le libéralisme est né de 3 révolutions politiques (Anglaise, Américaine, Française), le socialisme de la révolution industrielle du XIXème siècle. Les conditions de vies et de travail ont changés. L'expérience gouvernementale des partis de gauche a changé pour partie le monde de représentation du monde social. Les attitudes comportementales ont changés, rien qu'en l'espace des 3 dernières générations (au sens de filiation, non au sens culturel). (1) Le progrès technique, la technologie n'y est pas étranger. Je suis d'une génération dépolitisé, largement exposé à la télé post-ORTF, privatisée, américanisée et pré-numérique et à la société de consommation différenciée. Du coup les repères, les représentations et les modes d'actions et de comportement sont différents. L'investissement social et politique s'en trouve changé. Que dire de la génération qui n'aura connu qu'Internet plus toutes les autres technologies que nous réserve le futur ?

 

Le PS est-il un astre mort ? Peut être qu'en réalité la question c'est de savoir si les organisations politiques et sociales (ici syndicales, voir associatives déjà) et leurs formes actuelles, ne sont pas dépassées. A une structure basée sur la hiérarchie et les procédures plus ou moins formalisées (forme de bureaucratie), se substituerai alors une structure en réseau encore en construction, en élaboration. Nous avons conscience que cela change mais nous ne savons comment ni vers quoi on va, et le malaise vient de là.

 

Sur cette longue réflexion, je vous souhaite de passer de bonnes fêtes.

(1) La population actuelle du PS est plutôt âgée et le recrutement se fait rare sauf dans certaines zones, que va-t-il se passer une fois que se retirera l'actuelle génération?