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12 avril 2012

C'était François Mitterrand

9782253118695.jpgL’autre jour je lisais dans Le Monde, un article sur la supposée influence et l’évolution des débats télévisés de l’entre tour sur l’issu de l’élection présidentielle. Le soir même, je regardais via internet une bonne partie du débat de 1981 qui opposa Giscard d’Estaing et Mitterrand.

Et comme la presse et les staffs de campagne de certains candidats s’amusent à faire le parallèle entre 2012 et 1981 - Sarkozy copie Giscard, Hollande imite Mitterrand et Mélenchon joue Marchais – je trouvais intéressant de relire le livre de Jacques Attali, consacré à l’ancien président.

« C’était François Mitterrand » est sorti en 2006, au moment où l’on « célébrait » le dixième anniversaire du décès du dernier président socialiste de la République. Attali, qui a accompagné l’homme de 1970 à l’Elysée comme « conseiller spécial », raconte la personnalité et l’action politique de celui-ci.

L’homme frappe par son érudition – littéraire, artistique, historique, religieuse etc. – et sa parfaite maitrise du verbe. Sur de son destin, qu’il n’hésitait pas à provoquer, il s’inscrivait perpétuellement dans un rapport au temps et à l’Histoire. Narcissique, il se montrait faussement distant dans ses rapports aux autres.

Les années soixante-dix, le fin stratège. Il refonde le PS en 1971, s’entoure et fait travailler ensemble les différentes tendances, et fait l’Union de la gauche pour isoler le PC et gagner l’élection. Ses différends avec Rocard, la haine de la presse à son égard, la montée des jeunes énarques (Jospin, Fabius, Lang, Joxe etc.).

Son premier mandat, le grand réformateur. Il lance la décentralisation, il réforme la justice (abolition de la peine de mort, dépénalisation de l’homosexualité), il libéralise les média (fin de l’ORTF, libéralisation des ondes), il réforme l’économie (relance et nationalisation puis restructuration).

Son second mandat, le grand européen. Une fois réélu après la cohabitation, il se désintéresse de la politique nationale pour se consacrer à l’Europe et au monde. Il prépare l’élargissement (1986, 1995), fait adopter l’Acte unique puis Maastricht, il appuie Kohl dans la réunification et Gorbatchev dans la perestroïka.

Le livre s’achève sur la politique étrangère de l’époque (ses rapports avec les Etats-Unis, la guerre froide et la fin du rideau de fer, les pays africain et le tiers-monde, l’ex-Yougoslavie), sur la révélation du passé du président (Vichy, Bousquet) et de sa maladie (rapport à la mort, à la religion).

Homme complexe, aux multiples facettes et secrets, Mitterrand reste un mystère. Il faut lire « C’était François Mitterrand » comme le point de vue d’Attali, témoin privilégié des arcanes du pouvoir, sur l’homme qui présida la destinée de la France pendant 14 ans. Le temps et l’oublie se chargeront de juger sa place dans l’Histoire.

07 avril 2012

Renforcer l’économie sociale et solidaire

Dans le cadre de la campagne présidentielle, le Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l’économie sociale (CEGES) a invité début mars cinq candidats à la présidentielle à exprimer leurs idées et leurs projets pour l’économie sociale et solidaire (ESS). François Hollande a fait dix propositions.

L’ESS : définition, valeurs et limites.

L’économie sociale et solidaire, appelé aussi tiers-secteur en opposition au secteur privé et public, comprends les coopératives (de production, d’intérêt collectif, d’activités et d’emplois), les mutuelles, les associations et les fondations (auxquelles on peut adjoindre les fonds de dotation).

Selon différentes estimations, l’ESS emploierait 12% des salariés du privé (soit 2,2 millions de personnes) et pèserait entre 7 et 10% du PIB. Elle représente 210 000 entreprises (dont 21 000 coopératives, 43 mutuelles d'assurance, plus de 2 000 mutuelles de santé, 1500 fondations et un million d’associations vivantes).

De manière un peu synthétique, l’ESS repose sur plusieurs valeurs : la solidarité, la libre initiative collective, la gestion démocratique (le fameux principe « une personne = une voix »), la juste répartition des excédents et un système de propriété à la fois privé et collectif.

L’ESS s’inscrit dans une logique de développement solidaire et territorialisé. La rentabilité économique est au service de la réalisation d’objectifs sociaux. Les écarts salariaux y sont plus faibles que la moyenne nationale. Le rapport et la proximité au territoire est une donnée fondamentale.

Mais l’ESS présente aussi des limites. Malgré des valeurs différentes, des dérives sont observables (les mutuelles/ assurances/ banques coopératives se « normalisent »). Généralement fondées par des militants, ces entreprises sont finissent par être gérées par des managers non-militants. Enfin le modèle économique n’est pas encore viable (fondations et associations).

 

Les propositions de François Hollande.


1. « Faire voter une loi de programmation de l’Economie Sociale et Solidaire pour accompagner de manière durable le développement de l’ESS en réelle concertation avec les acteurs du secteur ».


2. « Réserver une part de l’accès aux marchés publics locaux aux entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire ».

 

3. « Rétablir une partie des financements associatifs supprimés sans concertation et établir avec les associations une véritable contractualisation en consolidant les financements (pluriannuels), en respectant leur capacité d’initiative ».

 

4. « Réserver à l’ESS une partie des fonds de la future Banque Publique d’Investissement à hauteur de 500 millions d’euros ».

 

5. « Aider au développement de l’entreprenariat social. Des structures collectives d’entrepreneuriat comme les Coopératives d’Activité et d’Emploi seront valorisées au détriment de l’auto-entrepreneuriat »

 

6. « Faciliter la transmission ou la reprise d’entreprises par les salariés, en instituant un droit de préférence de rachat, à égalité d’offre, au bénéfice des salariés ».

 

7. « Réhabiliter les contrats aidés et accompagner le développement de l’insertion par l’activité économique en révisant les conditions du financement des postes d’insertion ».

 

8. « Elargir le financement de l’innovation à linnovation sociale ».

 

9. « Ouvrir l’économie sociale et solidaire aux jeunes notamment par la voie des emplois d’avenir, avec une attention particulière aux quartiers défavorisés et à l’outre-mer,  par le soutien aux Coopérative d’Activité et d’Emploi et par une politique partenariale de formation avec les associations d’éducation populaire, impliquer l’ESS dans la mise en œuvre des contrats de génération »

 

10. « Assurer la représentation des employeurs de l’économie sociale dans le dialogue social, protéger les règles spécifiques des mutuelles ».

 

Mes remarques.

 

Faire une loi de programmation sur le développement de l’ESS a deux intérêts : d’abord celui de donner une plus grande visibilité à l’ESS en lieu et place de quelques lois isolées, ensuite d’inscrive le mouvement dans une stratégie à moyen/long terme.

 

Les SCOP, les SCIC et certaines associations peuvent déjà candidater aux marchés publics des collectivités territoriales. Mais leur réserver une part a le double avantage pour les collectivités de soutenir l'activité de ces structures et de faire du développement local.

 

En raison de leur finalité sociale, les entreprises de l’ESS sont souvent confrontées à un problème de financement initial et d’équilibre fragile (voir tardif) de leur modèle économique. Sécuriser et réserver des financements sera donc un vrai plus.

 

Faciliter la reprise d’une entreprise par les salariés en cas de transmission ou de rachat est une réponse faite aux entreprises qui ont fermés des sites/ des unités de production profitables mais jugées insuffisamment rentables (je simplifie beaucoup).

 

Les emplois jeunes du gouvernement Jospin avaient donnés un coup d’accélérateur au développement de l’ESS, en même temps qu’ils ont permis à de nombreux jeunes de trouver un premier emploi et d’acquérir de l’expérience.

Le renforcement de la décentralisation, telle que voulue par Hollande, se fera en faveur des Régions. L’extension de leurs compétences économiques bénéficiera à l’ESS. L’équipe Hollande a parlé de conventions Etat /Régions/EES.

30 mars 2012

Pour l’égalité du temps de parole

Le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) préconise de modifier la loi qui régit l'apparition des candidats à l'élection présidentielle à la télévision.

« Une trop longue période d'égalité est un risque d'appauvrissement du débat politique »

« La question principale porte sur la durée de la période d'égalité des temps de parole (…) la loi la fixe aux deux semaines précédant le scrutin », mais « en 2007, cette durée a été portée à cinq semaines ».

« Cette situation n'a pas été saine. Quatre candidats ont accaparé à eux seuls un tiers des temps de parole alors qu'ils n'ont obtenu que 4,1% des suffrages »


Petit rappel :

En période normale, le temps de parole est répartie entre la majorité (le Président, les membres gouvernement, les parlementaires), l’opposition (les partis représentés à l’Assemblée), les « partis intermédiaires » (Modem, Debout la République) et les partis qui n’ont pas de représentation au Parlement (FN, NPA, LO).

La majorité dispose d’un plus grand temps de parole. L’opposition doit faire au moins 50% du temps de parole de la majorité. Le temps de parole imparti dépend de la représentativité électorale (le critère étant je crois le score aux législatives). Les JT doivent respecter ce principe sur trois mois, les magazines sur six.

Voir cet article

Mes remarques :

La position du président du CSA fait écho à la demande d’un certain nombre de dirigeants de chaines télé et radio d’assouplir les règles de stricte égalité entre les candidats durant la campagne officielle, et de réduire le temps de celle-ci de cinq semaines actuellement à deux.

Je conçois qu’avec l’augmentation du nombre de candidats à la présidentielle, il devient difficile pour les chaines de télévision et de radio d’accorder une stricte égalité de temps de parole entre tous les candidats. Rappelons que cette année il y a 10 candidats, contre 12 en 2007 et 16 en 2002.

Mais l’engouement des média pour l’élection présidentielle fait que la campagne officieuse débute plus de six mois avant le temps officiel (quand ce n’est pas deux, trois ans avant même si c’est moins flagrant). Or durant cette période de campagne officieuse, l’inégalité de temps de parole est flagrante. Cf. le mois de janvier 2012.

Il est normal que l’égalité du temps de parole entre les candidats soit effective à compter de la publication, par le Conseil constitutionnel, de la liste officielle des candidatures, et non deux semaines avant le vote. Déjà que tous les candidats ne partent pas sur le même pied d’égalité en termes de moyens (financiers, logistique, humains etc).

Par ailleurs l’égalité de temps de parole ne signifie pas un traitement égalitaire, ou ne serait-ce qu’équitable, des candidatures. Il suffit de voir comment sont traités les petits candidats comme Cheminade, Artaud, Poutou ou NDA. C'est règle n'est donc qu'une garantie a minima. Rappelons aussi qu'elle ne s’applique qu’aux média télé et radio.

Or je trouverai là aussi plus équitable que chaque journal soit tenu d’assurer une première page à chaque candidat (comme Libération lors des primaires citoyennes) ainsi qu’un certain nombre d’entretiens. Mais ceci dit les sites des périodiques font quand même un gros effort pour couvrir toutes les candidatures.

« Quatre candidats ont accaparé à eux seuls un tiers des temps de parole alors qu'ils n'ont obtenu que 4,1% des suffrages »  Et combien auraient-ils obtenus s’ils n’avaient pas eu accès aux média ? Ils sont drôles les média, le système de parrainage leur parait trop restrictif mais ils n’ont même pas de considération pour les candidats qui les obtiennent.

15:00 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (3)

14 mars 2012

Trilemmes mondiaux

Résumé de l’intervention de Dominique Strauss-Kahn (DSK) à Cambridge, que l’on peut consulter en intégralité (mais en anglais) sur le site Les Echos.

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Trilemme : situation dans laquelle trois objectifs également souhaitables ne peuvent être atteints simultanément, obligeant à en choisir deux sur les trois.

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Trilemme Mundell-Flemming: Une économie ne peut avoir simultanément une politique monétaire indépendante, un marché de capitaux ouvert et un taux de change fixe.

Trilemme Dani Rodrick : On ne peut avoir à la fois, la souveraineté nationale, la démocratie et une intégration économique approfondie.

Trilemme Pisani-Ferry : Il y a incompatibilité entre une union monétaire, des systèmes bancaires nationaux et l'absence de responsabilité commune sur la dette publique.

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Les pays de la zone euro ont fait le choix de marchés de capitaux ouverts, d’un taux de change fixe (l’euro), et l’abandon de la politique monétaire dévolue à la BCE indépendante.

Le cas de la Grèce reflète bien l'impossibilité de garantir à la fois la souveraineté nationale, la démocratie et une vraie intégration au reste de l'Europe.

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Les principales conclusions de DSK :

Il ne peut y avoir de solution domestique aux problèmes économiques globaux. Il faut donc limiter l'importance de l'Etat nation en faveur d'un système de gouvernance mondial.

Plus d'intégration suppose moins de souveraineté si on ne veut pas sacrifier la démocratie. Il faut donc aller vers un système budgétaire fédéral, rendu difficile avec l’euroscepticisme.

11:27 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie, europe, dsk

09 mars 2012

Sarko ou le complexe de Zorro

Il s’agit d’un livre d’entretien entre l’ancien Ministre de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche du gouvernement Jospin, et le journaliste Dominique de Montvalon. Pour Claude Allègre, dans un contexte de crise internationale historique, l’élection présidentielle à venir se résume à la question suivante : « à qui confier le navire France par si gros temps ? ».

Et pour lui, c’est Sarkozy. Pour expliquer ce choix, il va faire le bilan du quinquennat. Il le félicite entre autre pour sa gestion de la crise en Ossétie, de la crise des subprimes, pour sa présidence de l’UE, pour les nombreuses réformes entreprises en politique intérieur (RSA, l’université, les retraites, les collectivités, la Constitution, la carte judiciaire…).

Il se montre plus critique sur l’ouverture (Kouchner inadapté aux Affaires étrangère), sur le Grenelle de l’environnement (parasité par le courant écologique qu’il exècre), sur la dérive droitière de la majorité (discours sur les immigrés) ou sur la portée de certaines réformes (il souhaite aller plus loin sur l’université et les retraites).

Il relativise l’épisode du Fouquet’s, le voyage chez Bush, la candidature du fils à l’EPAD etc. en essayant d’expliquer les évènements. Il revient sur le bilan de Jospin dont il critique les 35h mais salue les emplois jeunes, la réforme de la recherche ou de la justice. Il explique sa récente mission des Assises européennes de la recherche.

Par rapport au PS, il regrette que DSK ne soit pas candidat, aime bien Martine Aubry qui a un vrai bilan ministériel et municipal, éprouve une sympathie pour Montebourg qui apporte au débat d’idées. Vis-à-vis d’Hollande, il balaye les critiques faites par la droite, mais le juge incapable de présider au vue de son bilan à la tête du PS.

Je suis assez réservé sur l’ensemble de l’entretien. Alors qu’il n’a été ni acteur, ni témoin de certains évènements, sauf à avoir fait partie du premier cercle sarkozyste, il revient sur ceux-ci pour en expliquer le déroulement et exonérer Sarkozy. C’est une posture bien moins crédible que son témoignage de l’époque Jospin.

On ne pourra pas nier que Sarkozy a entrepris un nombre important de réformes. Mais que ce soit sur la Constitution, la carte territoriale ou les retraites, Allègre manque d’« objectivité » et de recul. Saluer les réformes sur le seul principe qu’elles ont eu lieux, c’est quand même très court. Ca ne fait pas un projet de société.